En quoi les jeunesses de banlieue sont-elles des «jeunesses françaises» ?
D’abord, parce que c’est ce qu’indique, pour l’écrasante majorité, leur carte d’identité. Les jeunes que j’ai suivis sont issus de l’immigration et font partie des classes populaires, ils vivent dans des quartiers avec très peu de mixité sociale, à la périphérie, en Seine-Saint-Denis. C’est un miroir grossissant des villes françaises, et d’une structure urbaine héritée de l’après- Trente Glorieuses. Ils sont le produit d’une histoire nationale. Et puis, la République est censée offrir à tous la possibilité de sortir de sa condition à travers l’école. Dans les inconscients, la France, c’est l’égalité des chances par l’instruction. J’ai eu envie de prendre ce roman national au sérieux, c’est-à-dire à ras du sol. La question de «l’identité nationale» ou de «la réussite» est toujours posée d’en haut, cette jeunesse étant perçue comme une anti-France supposée - parce que trop musulmane, ou trop africaine, ou trop urbaine. On en fait quelque chose d’essentialisé qui ne bougera jamais, mais ces jeunes se construisent plutôt au cours d’un long processus mouvementé.
Avec comme point cardinal l’obtention du bac ?
Dans les lycées où j’ai enseigné, ils font face à une acculturation scolaire par rapport à leurs parents qui ne sont que 2 sur 10 à avoir le bac. Il existe un vrai hiatus par rapport à la norme française et ses «80 % de réussite au bac» (qui serait lettre morte sans les «bacs pros» et les «bacs technos»). Lorsqu’on décroche le diplôme, on devient comme les autres, d’où ce que j’appelle le «certificat de conformité». En même temps, il s’agit pour les lauréats d’un moment exceptionnel et festif. Après le bac, les jeunes de ces quartiers, de conditions relativement similaires, n’ont plus du tout les mêmes histoires s’ils décident de continuer en classe prépa, en IUT, à la fac à Paris ou en banlieue. Le système de l’enseignement supérieur est très éclaté.
Mais souvent, leurs grands frères ou sœurs ont fait des études, ils ont été défricheurs…
Dans les familles, on sait déjà ce qui est rentable et permet de s’insérer sur le marché de l’emploi. Alors que le système d’enseignement supérieur se tourne vers davantage de professionnalisation et de management, chacun veut sa part du gâteau. Il y a aujourd’hui un attrait prononcé pour l’enseignement privé chez les jeunes de classes populaires. Mais en fin de parcours, certains peuvent nourrir une vive déception, notamment ceux passés par une école de commerce. Prenez Sébastien qui rentre avec un 20/20 lors de son oral de concours et sort diplômé en dénonçant «la mafia» dans laquelle il a l’impression d’avoir trempé ! En ce sens, ils dénoncent un enseignement pas toujours à la hauteur, avec un manque de travail de réflexion. Dans ces business schools, par leur demande de savoir, ils semblent à nouveau désajustés, mais cette fois de manière paradoxale et ironique, presque théâtrale.
http://www.liberation.fr/debats/2015/12 ... es_1420738
«Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
- Vincent_L
- Messages : 460
- Enregistré le : 17 juin 2015, 08:06:23
- Parti Politique : Parti Socialiste (PS)
- Localisation : Toulouse
«Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
La politique est la science qui consiste à faire dire ses idées à son adversaire.
- mordred
- Messages : 7238
- Enregistré le : 22 mai 2012, 11:40:06
- Localisation : Tout à l'Ouest (France)
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Le Chômage; plaie universelle; plaie intemporelle; plaie mortelle.
"La mer était très forte. Je pense qu'il était bien trop vieux pour aller à la pêche aux maquereaux".
Feu Dédé la fleur; bien souffrant (Ouessant) et Yann Tiersen (mondialement connu).
Feu Dédé la fleur; bien souffrant (Ouessant) et Yann Tiersen (mondialement connu).
- Vincent_L
- Messages : 460
- Enregistré le : 17 juin 2015, 08:06:23
- Parti Politique : Parti Socialiste (PS)
- Localisation : Toulouse
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Les jeunes de banlieue, même ceux qui sont sans diplômes sont "comme les autres".
La politique est la science qui consiste à faire dire ses idées à son adversaire.
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
"Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres"
Sans blague ?
Sans blague ?
- Vincent_L
- Messages : 460
- Enregistré le : 17 juin 2015, 08:06:23
- Parti Politique : Parti Socialiste (PS)
- Localisation : Toulouse
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
C'est ce qu'ils pensent.johanono » 17 Déc 2015, 22:21:28 a écrit :"Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres"
Sans blague ?
La politique est la science qui consiste à faire dire ses idées à son adversaire.
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Oui, j'ai bien compris. Mais cette affirmation me semble tellement évidente que je ne comprends même pas en quoi elle justifie un topic.
- Vincent_L
- Messages : 460
- Enregistré le : 17 juin 2015, 08:06:23
- Parti Politique : Parti Socialiste (PS)
- Localisation : Toulouse
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Tous les élèves sont soumis à la même éducation. Je veux bien que ce soit plus difficile dans les banlieues mais, même sans diplômes, ils sont "comme les autres". Celui qui veut réussir en banlieue, il réussi. Comme dans les campagnes.johanono » 17 Déc 2015, 22:25:03 a écrit :Oui, j'ai bien compris. Mais cette affirmation me semble tellement évidente que je ne comprends même pas en quoi elle justifie un topic.
La politique est la science qui consiste à faire dire ses idées à son adversaire.
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Mouhais...t'es sûr de ton truc là ? J'ai pas l'impression que les profs font le même boulot s'ils sont installés à La Courneuve ou à Versailles...Vincent_L a écrit :Tous les élèves sont soumis à la même éducation.johanono » 17 Déc 2015, 22:25:03 a écrit :Oui, j'ai bien compris. Mais cette affirmation me semble tellement évidente que je ne comprends même pas en quoi elle justifie un topic.
- Vincent_L
- Messages : 460
- Enregistré le : 17 juin 2015, 08:06:23
- Parti Politique : Parti Socialiste (PS)
- Localisation : Toulouse
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Normalement oui, et si ce n'est pas le cas, ce n'est pas normal. Je ne vois pas pourquoi celui qui est à La Courneuve aurait moins de chances de s'en sortir que celui qui est à Versailles. Celui qui veut s'en sortir, il s'en sort.Nolimits » 18 Déc 2015, 08:45:59 a écrit :Mouhais...t'es sûr de ton truc là ? J'ai pas l'impression que les profs font le même boulot s'ils sont installés à La Courneuve ou à Versailles...Vincent_L a écrit :Tous les élèves sont soumis à la même éducation.johanono » 17 Déc 2015, 22:25:03 a écrit :Oui, j'ai bien compris. Mais cette affirmation me semble tellement évidente que je ne comprends même pas en quoi elle justifie un topic.
La politique est la science qui consiste à faire dire ses idées à son adversaire.
- Nombrilist
- Messages : 63371
- Enregistré le : 08 févr. 2010, 00:00:00
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Tu veux dire: "tous les gosses reçoivent la même instruction" ? Mais même ça, c'est faux.
- Vincent_L
- Messages : 460
- Enregistré le : 17 juin 2015, 08:06:23
- Parti Politique : Parti Socialiste (PS)
- Localisation : Toulouse
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Il y a des profs plus ou moins compétents, mais ce n'est pas normal que celui de La Courneuve ne reçoive pas la même instruction que celui de Versailles ou d'ici en campagne par exemple. Il faut tout faire pour que ce ne soit plus le cas.Nombrilist » 18 Déc 2015, 08:53:26 a écrit :Tu veux dire: "tous les gosses reçoivent la même instruction" ? Mais même ça, c'est faux.
La politique est la science qui consiste à faire dire ses idées à son adversaire.
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Je suis pas sûr que le problème vienne de la compétence des profs...
Mais t'as jamais parlé à des profs qui bossent dans des collèges difficiles ?
Mais t'as jamais parlé à des profs qui bossent dans des collèges difficiles ?
- Vincent_L
- Messages : 460
- Enregistré le : 17 juin 2015, 08:06:23
- Parti Politique : Parti Socialiste (PS)
- Localisation : Toulouse
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Non, le problème ne vient pas de la compétence des profs. Mais, tu as raison, c'est très difficile d'enseigner en banlieue, mais l'élève qui veut s'en sortir peut s'en sortir.Nolimits » 18 Déc 2015, 09:11:57 a écrit :Je suis pas sûr que le problème vienne de la compétence des profs...
Mais t'as jamais parlé à des profs qui bossent dans des collèges difficiles ?
La politique est la science qui consiste à faire dire ses idées à son adversaire.
- Nombrilist
- Messages : 63371
- Enregistré le : 08 févr. 2010, 00:00:00
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
L'un des problèmes, c'est que le petit immigré de Saint-Denis ne peut pas suivre au même rythme que le petit Charles-Henri qui fréquente les établissements du XVIème.
Re: «Pour les jeunes de banlieue, décrocher un diplôme, c’est devenir comme les autres»
Là, tu décris un idéal. Mais dans la réalité, ça ne se passe comme pas ça. Dans la réalité, ils ne sont pas comme les autres. Parce qu'ils ne se sentent pas comme les autres, se sentent différents, voire nourrissent une forme de complexe social. Et parce que le reste de la société les considère également différemment.Vincent_L » Ven 18 Déc 2015 - 08:23 a écrit :Tous les élèves sont soumis à la même éducation. Je veux bien que ce soit plus difficile dans les banlieues mais, même sans diplômes, ils sont "comme les autres". Celui qui veut réussir en banlieue, il réussi. Comme dans les campagnes.johanono » 17 Déc 2015, 22:25:03 a écrit :Oui, j'ai bien compris. Mais cette affirmation me semble tellement évidente que je ne comprends même pas en quoi elle justifie un topic.
Dans ces conditions, il y a deux possibilités :
- soit ils se laissent intoxiquer par un certain discours de victimisation qui leur fait croire qu'eux et leurs parents sont de pauvres victimes de la société raciste, colonialiste et discriminante, ils développent alors une forme de repli sur leurs origines (idéalisées) et une haine du pays dans lequel ils vivent,
- soit ils aspirent à une forme d'ascension sociale, de reconnaissance sociale par le travail : réaction plutôt saine, que tous ces "jeunes de banlieue" devraient avoir, mais dont je crains qu'elle ne soit minoritaire parmi eux.
Quant à l'école, elle est la même pour tous en France. Grâce au système des ZEP, les écoles situées dans les quartiers difficiles reçoivent même davantage de moyens que les autres. Mais tout dépend ensuite de la façon dont elle est abordée. Dans une école peuplée d'élèves abrutis, influencés par les obscurantismes religieux de leurs parents, empreints d'une haine de la France, et qui ne veulent pas bosser, les conditions de travail sont forcément plus difficiles, et on avance moins vite dans le traitement des programmes.
Quoiqu'il en soit, ce débat nous renvoie à un problème crucial que j'ai déjà évoqué : la dimension culturelle de l'immigration. Ce sont des raisons d'abord culturelles, et non économiques, qui expliquent les difficultés d'intégration de certaines population d'origine immigrée.
Qui est en ligne
Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré