Des murs décrépis, des préfabriqués du siècle dernier, des soupçons d’amiante, des salles de classe qui débordent, du mobilier de récup, une gestion des travaux, ubuesque et même une pénurie organisée de papier toilette… Bienvenue dans les écoles publiques de Marseille, la deuxième ville de France. Si la situation n’est pas nouvelle, la municipalité fait face, depuis quelques semaines, à une nouvelle fronde. Professeurs et parents en appellent cette fois à l’Etat, considérant que la municipalité, seule compétente légalement dans la construction et l’entretien des écoles, est défaillante.
Pourquoi cette mobilisation maintenant ?
Charlotte Magri, une enseignante affectée jusqu’à la semaine dernière dans une école des quartiers Nord de Marseille, a écrit une lettre ouverte fin novembre, relayée par plusieurs médias dont Libération, pour dénoncer les conditions de travail et d’accueil de ses élèves dans l’école. Sans réponse de la ministre, elle lance une pétition mi-janvier. Au compteur lundi soir, 15 000 signataires. «Tant que ces injustices ne seront pas médiatisées, il n’y aura aucune réaction des pouvoirs politiques, écrit-elle. Madame la ministre, par votre non-réponse, vous reconnaissez que malgré vos discours, notre éducation n’est plus nationale et que vous n’y pouvez plus rien.» L’enseignante dénonce le manque d’entretien de son école, les chauffages qui tombent régulièrement en panne, la présence d’amiante notamment dans les dalles du sol dégradées, établie par un rapport datant de 2007. Sur ce dernier point au moins, Danièle Casanova, l’adjointe à la mairie de Marseille en charge des écoles, veut bien répondre : «La commission de sécurité se tient à la disposition des directeurs d’école, chaque année, pour établir un diagnostic. Dans ce cas précis, l’amiante, en dose infinitésimale dans les dalles, n’a aucun effet nocif sur la santé des enfants, sinon des mesures auraient été prises.»
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Que font l’État et le gouvernement ?
Le ministère de l’Education nationale reconnaît être informé depuis longtemps. «Bien avant la lettre de Charlotte Magri, la ministre était préoccupée par la situation à Marseille», indique l’entourage de Najat Vallaud-Belkacem. Elle a encore appelé cette semaine le sénateur-maire Jean-Claude Gaudin (LR) pour en discuter. «L’Education nationale met des moyens très importants à Marseille : 330 nouveaux postes d’enseignants sont ouverts pour la rentrée prochaine, et 7 millions d’euros sont versés pour les activités périscolaires», précise le cabinet. Par ailleurs, le ministère de la Ville rappelle que 2,5 millions d’euros ont été versés à la mairie de Marseille depuis 2014 pour la rénovation des écoles dans le cadre de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru). Auxquels s’ajoute environ 1,4 million supplémentaire, toujours depuis 2014, pour les «petits travaux urgents» au nom de la dotation de la politique de la ville, surtout pour les quartiers prioritaires. Mais dans l’entourage du ministre Patrick Kanner, on reconnaît que la situation est tellement inquiétante qu’un rapport vient d’être commandé pour dresser un état des lieux précis des écoles marseillaises.
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http://www.liberation.fr/france/2016/02 ... re_1430436
Qu'en pensez vous ?La drogue, les armes, les réglements de comptes, les braquages, les agressions, le stationnement anarchique qui provoque des accidents : ils n'en parlent pas, ou si peu. Depuis longtemps déjà, tout cela fait tristement partie de leur quotidien. Aujourd'hui, quand on les invite à parler de l'insécurité dans leurs quartiers, c'est sur l'état de leurs écoles que les habitants des 15 et 16e arrondissement expriment spontanément leur "ras-le-bol". Avec des accents de révolte, qui ont jailli lundi dernier, lors d'une réunion publique organisée en mairie de secteur.
Leur colère fait écho à celle exprimée par Charlotte Magri, une enseignante des quartiers Nord, dont la tribune, "Je nous accuse" (lire ci-dessous), fait depuis des jours le buzz dans les médias nationaux. Et jusqu'au ministère de l'Education, qui l'aurait lue avec "beaucoup d'intérêt". Consolat, Campagne-Lévêque, La Castellane, Plan d'Aou, Verduron, la Granière, Jean-Perrin, La Maurelette, l'Estaque Plage : dans toutes ces écoles, le malaise est ancien. Et profond. Les parents d'élèves dénoncent des conditions d'accueil "inacceptables", un "délaissement", qui mettraient en danger la santé de leurs enfants. À Consolat, ainsi, on fait la classe aux enfants dans des préfabriqués provisoires... qui accueillaient déjà leurs parents, il y a 40 ans ! Les locaux, évidemment, ont vieilli : "Il y fait une chaleur intenable, il y a des moisissures partout, de l'amiante, des rats. Nos gosses se traînent des sinusites infectées, de l'eczéma, de l'asthme chronique", résume un papa. En 2014, la Ville elle-même a reconnu, au travers d'une délibération approuvée en conseil municipal que ce bâtiment "vétuste", ne "répond plus aux normesd'hygiène et de sécurité actuelles."
445 écoles maternelles et primaires à Marseille
La construction d'un bâtiment neuf a donc été votée. Mais les crédits n'ont finalement pas été affectés. "Et ce qui est incroyable : la commission de sécurité a donné un avis favorable pour le maintien du préfabriqué !" enragent les parents. À l'école Jean-Perrin, on a fait cours "en blouson", par 13ºC. Tandis qu'un rapport vieux de 2007 atteste la présence d'amiante dans l'air. Face à cette situation, "comment nos enfants se sentiraient-ils Français comme les autres ?" s'interroge une maman.
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http://www.laprovence.com/article/actua ... coles.html