Le rôle de l'école:
Parce que je trouve fréquemment chez Jacques Julliard l'écho de ce que je pense mais qu'il exprime infiniment mieux que moi, je vous relaye son analyse sur les 2 écoles :
Il existe, au chapitre de cette École, deux projets concurrents qui se sont révélés, à l’usage, incompatibles. Le premier est d’en faire un instrument de diffusion du savoir et de la culture. On a cru longtemps qu’il ne saurait y en avoir d’autre. Erreur ! Depuis un bon demi-siècle existe en effet un autre projet qui consiste à faire de l’École un instrument de réduction des inégalités sociales. Appelons le premier « le projet Jules Ferry » ; c’est celui de la IIIe République. Et appelons le second « le projet Bourdieu-Meirieu » ; c’est le projet de la sociologie critique et des pédagogistes professionnels.
...
https://www.laicite-republique.org/j-ju ... ep-17.html
Votre avis sur cette vision ?
Le rôle de l'école
Re: Le rôle de l'école
La question est mal posée. Les deux fonctions proposées (diffuser le savoir ou bien réduire les inégalités) ne sont nullement incompatibles. En effet, l'école comme instrument de diffusion du savoir et de la culture permet de réduire les inégalités, car elle permet aux jeunes issus de milieux défavorisés d'accéder à des connaissances auxquelles ils ne pourraient pas accéder autrement, dans leur milieu familial.
Le projet Bourdieu-Meirieu qui a pris le pouvoir au Ministère de l'Education nationale dans les années 70 n'est qu'une dérive idéologique très particulière. Une dérive qui a fait beaucoup de mal. Sous prétexte de lutter contre les inégalités, de mettre l'élève au centre du système éducatif, il y a eu un énorme nivellement par le bas. La lutte contre les inégalités ne fut qu'un prétexte à un renversement des principes pédagogiques.
Mais à la base, fondamentalement, il n'y a aucune opposition entre la mission de diffuser le savoir et la mission de réduire les inégalités. Au contraire, ce sont deux missions très complémentaires.
Le projet Bourdieu-Meirieu qui a pris le pouvoir au Ministère de l'Education nationale dans les années 70 n'est qu'une dérive idéologique très particulière. Une dérive qui a fait beaucoup de mal. Sous prétexte de lutter contre les inégalités, de mettre l'élève au centre du système éducatif, il y a eu un énorme nivellement par le bas. La lutte contre les inégalités ne fut qu'un prétexte à un renversement des principes pédagogiques.
Mais à la base, fondamentalement, il n'y a aucune opposition entre la mission de diffuser le savoir et la mission de réduire les inégalités. Au contraire, ce sont deux missions très complémentaires.
Re: Le rôle de l'école
Mon avis est que c'est légèrement plus compliqué, mais que les grandes lignes sont là. Il y a bien opposition entre deux visions opposées de l'école, l'une qui met en avant l'instruction de savoirs et l'autre qui a d'autres objectifs. Mais le second projet n'a pas vraiment l'objectif premier de réduire les inégalités. C'est un argument qui est souvent utilisé pour sa défense ou pour sa promotion, mais c'est plus une conséquence souhaitée de cette seconde vision.
La réalité est que le second projet est un amas protéiforme de visions pédagogiques reliées entre elles, mais assez disparates, qui ont un air de famille, mais pas ont des objectifs et méthodes différentes. Par exemple, c'est là dedans que se rangent les méthodes pédagogiques dites actives/constructivistes, où l'élève construit son savoir, où il découvre les choses par lui-même. C'est aussi là dedans que se range ceux qui considèrent que faire apprendre des connaissances est devenu inutile à l'heure d'internet et qu'il vaut mieux apprendre aux élèves des compétences de raisonnement, de réflexion, d'esprit critique et d'autres compétences générales de haut niveau. Merieu en est le représentant le plus caricatural. Les objectifs sont variés, mais l'un est que l'enseignement serait plus efficace ainsi (même si les études sur le sujet semblent aller dans le sens contraire), d'autres ont des objectifs plus politiques pas forcément liés aux inégalités (apprentissage de la coopération et du travail de groupe pour les pédagogies par projet, par exemple).
Généralement, ce second camp regroupe ceux qui veulent changer l'éducation soit par des réformes pédagogiques d'ampleur, soit par de l'innovation pédagogique. Et ceux qui ont cette mentalité sont fatalement de gauche, ont à cœur de réduire les inégalités et adorent faire dire aux sociologues ce qu'ils ne disent pas. Ce qui leur amène à penser que leurs méthodes innovantes vont réduire les inégalités ou sont basées sur la sociologie, mais c'est plus un vœux pieux de leur part qu'autre chose. Manque de bol, ce sont ceux qui sont les plus influents en matière de pédagogie à l'heure actuelle, que ce soit dans le ministère ou dans la formation des professeurs.
Mais quand on lit un peu les études des sociologues, les choses sont différentes. Franchement, pour m'être intéressé au sujet, les avis des sociologues sont beaucoup plus variés et on en trouve facilement qui sont clairement mesurés, voire critique vis-à-vis des innovations et des réformes pédagogiques récentes. Personnellement, j'aime beaucoup les travaux du GRDS (Groupe de réflexion sur la démocratisation scolaire), qui regroupe des chercheurs de SHS.
Bref, comme tous les débats un peu techniques, c'est compliqué.
La réalité est que le second projet est un amas protéiforme de visions pédagogiques reliées entre elles, mais assez disparates, qui ont un air de famille, mais pas ont des objectifs et méthodes différentes. Par exemple, c'est là dedans que se rangent les méthodes pédagogiques dites actives/constructivistes, où l'élève construit son savoir, où il découvre les choses par lui-même. C'est aussi là dedans que se range ceux qui considèrent que faire apprendre des connaissances est devenu inutile à l'heure d'internet et qu'il vaut mieux apprendre aux élèves des compétences de raisonnement, de réflexion, d'esprit critique et d'autres compétences générales de haut niveau. Merieu en est le représentant le plus caricatural. Les objectifs sont variés, mais l'un est que l'enseignement serait plus efficace ainsi (même si les études sur le sujet semblent aller dans le sens contraire), d'autres ont des objectifs plus politiques pas forcément liés aux inégalités (apprentissage de la coopération et du travail de groupe pour les pédagogies par projet, par exemple).
Généralement, ce second camp regroupe ceux qui veulent changer l'éducation soit par des réformes pédagogiques d'ampleur, soit par de l'innovation pédagogique. Et ceux qui ont cette mentalité sont fatalement de gauche, ont à cœur de réduire les inégalités et adorent faire dire aux sociologues ce qu'ils ne disent pas. Ce qui leur amène à penser que leurs méthodes innovantes vont réduire les inégalités ou sont basées sur la sociologie, mais c'est plus un vœux pieux de leur part qu'autre chose. Manque de bol, ce sont ceux qui sont les plus influents en matière de pédagogie à l'heure actuelle, que ce soit dans le ministère ou dans la formation des professeurs.
Mais quand on lit un peu les études des sociologues, les choses sont différentes. Franchement, pour m'être intéressé au sujet, les avis des sociologues sont beaucoup plus variés et on en trouve facilement qui sont clairement mesurés, voire critique vis-à-vis des innovations et des réformes pédagogiques récentes. Personnellement, j'aime beaucoup les travaux du GRDS (Groupe de réflexion sur la démocratisation scolaire), qui regroupe des chercheurs de SHS.
Bref, comme tous les débats un peu techniques, c'est compliqué.
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Re: Le rôle de l'école
"C'est aussi là dedans que se range ceux qui considèrent que faire apprendre des connaissances est devenu inutile à l'heure d'internet et qu'il vaut mieux apprendre aux élèves des compétences de raisonnement, de réflexion, d'esprit critique et d'autres compétences générales de haut niveau."
Ceci est effrayant. Si plus personne n'est capable de dire d'où viennent les connaissances (et pour cela, il faut au minimum les avoir), ça rabaissera le savoir au rang d'une religion dont Internet serait la Bible.
Ceci est effrayant. Si plus personne n'est capable de dire d'où viennent les connaissances (et pour cela, il faut au minimum les avoir), ça rabaissera le savoir au rang d'une religion dont Internet serait la Bible.
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