Les bacs pros dans la galère universitaire

Venez nous parler des problèmes de nos écoles ( service minimum, l'accueil des enfants, effectifs dans les classes ... )
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politicien
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Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par politicien » 28 sept. 2012, 21:51:20

Bonjour,
Inscrits en première année de faculté de lettres modernes, ou d’histoire, sans avoir jamais rédigé la moindre dissertation, ni même parfois lu autre chose que des magazines, ils n’ont, statistiquement, quasiment aucune chance de se hisser en deuxième année. Mais depuis deux ou trois ans, ils affluent à l’université de Cergy-Pontoise (Val-d’Oise), ces bacheliers professionnels et techniques que leur cursus secondaire destinait à des études supérieures bien moins conceptuelles.

Phénomène de crise, comprend-on en filigrane des explications fournies par Didier Desponds, vice-président (chargé de la formation et de la vie étudiante) d’une université que ce bouleversement des profils étudiants oblige aujourd’hui à se repenser.

D’un côté, "les filières sélectives, comme les BTS, les IUT, attirent davantage de jeunes issus de bacs généraux". Qui se saisissent là de diplômes immédiatement monnayables sur le marché du travail, quitte à poursuivre ensuite. "Les bacheliers professionnels et technologiques s’en trouvent évincés, et s’orientent vers l’université par défaut." De l’autre, "les jeunes issus de bacs généraux qui privilégient les classes préparatoires", susceptibles de mener aux grandes écoles, et à leurs diplômes censés protéger à vie contre le chômage. Ceux-là désertent l’université.

Résultat, dans une université de périphérie comme Cergy, au recrutement local, insuffisamment prisée pour se permettre de sélectionner à l’entrée, les bacs professionnels représentent cette année 16% des inscrits en première année de lettres et sciences humaines (contre 7% en 2009), 15% de ceux d’économie-gestion (contre 9%), 9% en langues, 5% en droit. Les bacheliers technologiques comptent pour 18% ou 19% des étudiants de première année de droit, d’économie-gestion ou de lettres, et pour plus du quart des étudiants de langues.

Les statistiques disent le nombre. Implacables, elles disent aussi l’hécatombe. "Le taux de réussite des bacs pro avoisine les 0% dans à peu près toutes les filières", regrette M.Desponds. Un élève, en moyenne, en réchappera sur une cinquantaine d’inscrits. En économie, en langues, aucun n’est parvenu l’an dernier à se frayer un chemin vers la seconde année de licence. C’est à peine mieux pour les bacs techno, avec des taux de réussite avoisinant certes les 20% en lettres, les 16% en langues, mais qui chutent à 9% en droit ou en sciences, à 5% en économie.
(...)

Vanessa sort d’un bac pro commerce. Elle voulait être commerciale ou travailler dans une banque.

"Déjà, j’ai été mal orientée au collège, parce que c’est le bac vente et pas commerce que j’aurais dû faire. Après, j’ai cherché un patron pour un BTS “négociations-relations clients” en alternance. Je n’ai pas trouvé. Alors j’ai tenté de faire un BTS sans alternance, mais les deux lycées que j’ai demandés m’ont refusée." Un douze ou treize de moyenne n’y change rien, l’a-t-on éclairée dans son lycée. Les places sont comptées, et les bacs généraux passent devant. "Je ne suis pas la seule de ma classe à n’avoir rien. Cette année, il y a eu beaucoup de réussite au bac pro."

Sa mère lui a dit qu’elle ne pouvait pas ne rien faire, ce que la fille n’était pas loin de penser elle-même. La voilà donc inscrite en fac. Plus de place en gestion administrative. Restent les lettres modernes. "Même si je n’aime pas trop le français, l’écriture." Même si "lire, ce n’est pas mon truc, sauf Closer. Mais on ne fait pas toujours ce qu’on aime dans la vie". Même si "les dissertes, je ne sais pas trop à quoi ça ressemble". Pour l’instant, les cours lui plaisent. "Ça améliore… Comment on dit ? Ça améliore comment je m’exprime."

(...)

Ou par Thibault, ex-bac pro hôtellerie-restauration, et lecteur "de livres de cuisine, surtout", qui transforme cette grande angoisse en volontarisme forcené. Inscrit en histoire parce qu’il se passionne pour les batailles napoléoniennes et qu’il ne se voyait pas "servir des gens toute la vie", il veut prouver à tous ceux qui écarquillent les yeux devant son parcours qu’il peut réussir. "Ici, l’avantage, c’est qu’on ne sait pas qui vient d’un lycée général, techno ou pro." Il vient de dépenser tout ce qu’il avait gagné en travaillant cet été pour se doter d’un petit ordinateur portable. "Je ne me voyais pas écrire soixante pages à la main par jour. Nous, en classe, on nous donnait des photocopies !"

L’université n’était pas pensée pour ces étudiants. "Ont-ils les prérequis pour pouvoir s’y débrouiller ? La réponse est non", pose sans ambages Didier Desponds, qui énumère les insuffisances : capacités de lecture, de rédaction et d’analyse de textes complexes, culture générale, niveau de maths pour l’économie et les sciences… "Certains peuvent y arriver mais ils partent de beaucoup plus loin. D’autant que s’ils ont fait un bac pro, c’est souvent qu’ils avaient des difficultés d’apprentissage avant le lycée."

Alors que faire ? Se fermer ou s’adapter ? Baisser les bras et laisser la sélection s’opérer. Au risque de plomber les taux de réussite en première année (37%) et de ne pas parvenir à faire le plein des masters maison.

(...)

D’où, encore, le renforcement à l’université du rôle d’orientation des secrétaires pédagogiques vers les différents services qui peuvent aider. Les conseils dispensés par des enseignants "référents", proches des professeurs principaux du lycée. Les tests de français, d’anglais, de maths, organisés en début d’année pour identifier les publics en difficulté et les soumettre à des séances de rattrapage. Les travaux dirigés en groupes restreints, les cours en amphithéâtre qui se raréfient. Les réorientations possibles à tout moment, en interne (vers d’autres filières ou vers un semestre de remise à niveau) ou en externe, avec quelques places réservées en BTS.

Et ce grand chantier lancé sur les manières d’enseigner. Diversifier les pratiques pédagogiques, ne pas se limiter aux cours magistraux, imaginer des cours à distance… Réflexion rendue nécessaire par ces nouveaux publics accueillis mais dont tous les étudiants pourraient à l’avenir profiter.

L'intégralité de cet article sur Le Monde.fr
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Golgoth
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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Golgoth » 28 sept. 2012, 22:12:00

Qu'est-ce qu'il ne faut pas lire... Un bac pro n'est pas fait pour faire la fac, point. Même l'enseignement général y est tourné vers le concret et le pragmatique et les élèves ne sont pas formés à avoir des capacités d'abstraction.
Bien entendu, il peut y avoir des réussites individuelles, mais cela reste anecdotique.

Après un bac pro, on fait un BTS ou on bosse, le reste est illusoire ou stupide.
T'es vraiment kon François, fallait créer une SCI. :mrgreen2:

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Florian » 28 sept. 2012, 22:22:32

Golgoth a écrit :Qu'est-ce qu'il ne faut pas lire... Un bac pro n'est pas fait pour faire la fac, point. Même l'enseignement général y est tourné vers le concret et le pragmatique et les élèves ne sont pas formés à avoir des capacités d'abstraction.
Bien entendu, il peut y avoir des réussites individuelles, mais cela reste anecdotique.

Après un bac pro, on fait un BTS ou on bosse, le reste est illusoire ou stupide.
Absolument. Pour aller faire des facs qui plus est généralistes, il y a des bacs généraux en quantité suffisante. On est donc en train de créer des facs poubelles où on stocke des jeunes qui ne veulent pas aller bosser (alors qu'on a pourtant encore des emplois vacants dans le secteur du bâtiment, des métiers de la restauration, boucherie, charcuterie, boulangerie, etc. Evidemment des salaires limités, de la pénibilité, etc... Je vois les deux frangins poissonniers en face de chez moi, ce matin un arrivait de Rungis et déchargeait les merlus et saumons à 7h du mat? mais la boutique ferme à 19h30 ... et ils ne sont que 3 ou 4 à bosser là-dedans.

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par mps » 28 sept. 2012, 23:03:34

Décrépitude des universités, qui vont sans doute recruter leur clientèle en garantissant des masters à des illettrés.

Sûr qu'après 5 ans de dur labeur, les titulaires de ces diplômes seront ultra convoités sur le marché du travail.
C'est quand on a raison qu'il est difficile de prouver qu'on n'a pas tort. (Pierre Dac)

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Golgoth » 28 sept. 2012, 23:07:09

Tu peux avoir un bac pro et être parfaitement lettré :mrgreen: Le problème, c'est plus la façon de raisonner et les habitudes de travail.
T'es vraiment kon François, fallait créer une SCI. :mrgreen2:

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Adeline » 28 sept. 2012, 23:20:58

Oui, je pense aussi que les techniques d’apprentissage en Bac pro sont différentes des Bacs traditionnels et notons que ceux qui sortent des bacs traditionnels, rencontrent souvent des difficultés, en BTS, en raison de rythmes de travail, auxquels ils ne semblent visiblement pas habitués.
C'est flagrant dans la promo de mon fils. Les 5 premiers de promo sortent de bac pro et sur les 28 étudiants de la première année, il n'en reste que 22. les 6 qui ont redoublé leur année où quitté l'école, sortaient de bacs traditionnels.

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Lucas » 29 sept. 2012, 09:24:28

Oui mais lisez bien les parcours des jeunes, après leur Bac pro ils n'ont pas pu faire un Bts soit en Alternance, soit en initial, du coup pour ne pas se retrouver sans rien faire ils sont parties à la Fac.

C'est notre système qui va mal, il faut absolument développer l'apprentissage en Bts, et puis la plupart des Bac pros devraient être accepté obligatoirement en Bts en initial.

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Blaise
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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Blaise » 29 sept. 2012, 09:25:03

Tout à fait.
Les Français vont instinctivement au pouvoir; ils n'aiment point la liberté; l'égalité seule est leur idole. Or l'égalité et le despotisme ont des liaisons secrètes. Chateaubriand

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Golgoth » 29 sept. 2012, 09:27:29

Il y a quand même un truc que je dois écrire, entre le type qui ne fait rien de l'année et celui qui s'inscrit à la fac quitte à n'aller qu'aux exams et se planter, la différence c'est que le deuxième touche une bourse.
Je connais plusieurs (mauvais) élèves de bac pro qui ont raisonné ainsi :mrgreen:
T'es vraiment kon François, fallait créer une SCI. :mrgreen2:

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Blaise » 29 sept. 2012, 09:28:22

Ah tiens oui je n'avais pas pensé à ça. Mais les bourses sont assez difficiles à obtenir, non ?
Les Français vont instinctivement au pouvoir; ils n'aiment point la liberté; l'égalité seule est leur idole. Or l'égalité et le despotisme ont des liaisons secrètes. Chateaubriand

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Golgoth » 29 sept. 2012, 09:30:52

J'ai enseigné à des endroits où 90 % des élèves étaient boursiers. A la fac, les critères ne sont pas très différents je pense.
Comme les profs ne font pas l'appel en TD, certains en profitent. Attention, je parle d'une minorité mais ça existe.
T'es vraiment kon François, fallait créer une SCI. :mrgreen2:

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par politicien » 29 sept. 2012, 09:32:11

J'ai fait un Bts, en ayant fait un Bac pro (et un Bep), la majorité des élèves venaient d'un Bac ES ou S, on était que 3 Bac pros sur 30 élèves (on était 20 à poser notre candidature dans ma classe de Bac Pro), car je me souviens que l'argument était : "Les Bac pros ont un niveau beaucoup plus faible que les Bac ES et S, donc on veut prendre peu de risque avec les Bac pros"

Sauf que sur les matières professionnelles on avait beaucoup d'acquis, il y avait des choses que les Bac ES n'avaient jamais vu.
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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Blaise » 29 sept. 2012, 09:34:51

@ Golgoth: C'est vrai que ça peut expliquer certains parcours à la marge.
@ Politicien: Tu pointes un problème important. Les filières BTS et DUT recrutent de plus en plus de bacheliers issus de séries générales, parce que ce sont des formations qui marchent et qui attirent. Résultat:ceux pour qui elles ont été conçues initialement se retrouvent parfois le bec dans l'eau, ce qui n'est pas normal.
Les Français vont instinctivement au pouvoir; ils n'aiment point la liberté; l'égalité seule est leur idole. Or l'égalité et le despotisme ont des liaisons secrètes. Chateaubriand

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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par Golgoth » 29 sept. 2012, 09:35:49

@Politicien : Je n'en doute pas Politicien. Tu as d'ailleurs un parcours exemplaire, que je ne manquerais pas de décrire à mes élèves. :P
Un problème c'est que normalement les mentions bien en bac pro sont prises de droit en BTS, sauf que le recrutement se fait avant le bac. Il faudrait aussi plus de BTS dans les locaux des lycées pro.
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Re: Les bacs pros dans la galère universitaire

Message non lu par politicien » 29 sept. 2012, 09:41:44

merci pour mon parcours, mais je suis pas sur qu'il soit exemplaire :)

Mais tu as raison on a été pris parce qu'on a eu une mention au Bac pro, mais la plupart des bac ES et S n'avaient pas eu de mentions et pourtant ils étaient 27/30 inscrits.
Les filières BTS et DUT recrutent de plus en plus de bacheliers issus de séries générales, parce que ce sont des formations qui marchent et qui attirent
C'est exactement cela, du coup ça bloque les Bac pros pour continuer leurs études. Car en Bac pro on a fait 90% de réussite, et la majorité avait le niveau pour faire un Bts, mais ils n'avaient pas eu de mentions.
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