Le lien de l'article : https://www.latribune.fr/regions/nord-p ... 89674.htmlÀ Dunkerque, plus besoin de payer pour monter dans le bus depuis le 1er septembre. Avec ses 200.000 habitants, la Communauté urbaine est la plus grande métropole d’Europe à choisir la gratuité pour ses transports.
« Il est temps de dépoussiérer les concepts et les pratiques : en proposant la gratuité d'accès aux transports, nous n'en devenons pas pour autant des élus mauvais gestionnaires, inconscients, insouciants », a prévenu Patrice Vergriete, maire de Dunkerque et président de la Communauté urbaine, visiblement échaudé par les remarques de ses opposants.
« J'en ai entendu des florilèges de préjugés, de dogmes et de contre-vérités », a-t-il poursuivi lors des premières rencontres des villes du transport gratuit, organisées les 3 et 4 septembre à Dunkerque pour justement « élever le débat ». La grand messe dunkerquoise a rassemblé des élus de villes françaises et européennes ayant eux aussi opté pour le transport gratuit, des chercheurs spécialisés sur la question, des techniciens mais aussi d'autres élus, curieux d'avoir des retours d'expériences.
Un projet d'ampleur
Car le projet d'accès à la gratuité du réseau dunkerquois impressionne par son ampleur et sa qualité : 17 lignes de bus irriguant toute la métropole et ses 200.000 habitants ; cinq lignes desservies toutes les dix minutes mettant 80% de la population à moins de 300 mètres d'un arrêt et à moins de 20 minutes de la gare de Dunkerque ; une plage horaire élargie de 5h30 à 22h30 ; des bus équipés de prises pour recharger les téléphones portables et du WIFI...
Maxime Huré, chercheur spécialiste de la gratuité dans les transports et président de l'association VIGS, a recensé 31 réseaux de transport gratuit en France : Dunkerque est la première grosse agglomération de cette taille à avoir franchi le pas.
Pourquoi la collectivité s'est-elle lancée dans cet ambitieux projet ? D'abord parce que ses transports en commun étaient largement sous-utilisés. À Dunkerque, en 2015, deux tiers des déplacements à l'échelle de l'agglomération s'effectuaient en voiture : avant la mise en place de la gratuité, le transport en bus ne représentait que 5% et le vélo 1%. La part de la voiture a même continué de progresser de 4% entre 2003 et 2015.
« La notion de gratuit crée un choc psychologique et frappe les esprits », concède le maire.
Des recettes qui se chiffrent à 4,5 millions d'euros
Ensuite, parce que les recettes commerciales n'étaient pas très élevées : les 4 millions et demi d'euros de recettes issues de la billettique ne pesaient que 10% des recettes globales de fonctionnement du réseau. Du coup, la suppression de la billetterie et des contrôles peut plus facilement compenser le manque à gagner sur les ventes.
Les données sont bien sûr différentes d'une ville à l'autre. À Aubagne, la billettique représentait 700.000 euros sur un coût de fonctionnement de 9 millions d'euros : le nombre de voyages annuels est passé de 1,9 million à 6 millions entre 2009 et 2017. Tandis qu'à Niort, passée à la gratuité en septembre 2017, les paiements ne couvraient que 12% des dépenses.
Je voulais partager cette prouesse de l'agglomération dunkerquoise car elle met en évidence que si on insiste souvent que le ticket de bus ne couvre quasiment rien du prix du trajet réel, pourquoi le maintenir ? Je suis bien conscient que ce modèle ne peut pas s'adapter aux villes saturées, mais dans le cas de Dunkerque, le réseau pâtissait au contraire d'une trop faible fréquentation.
D'un point de vue strictement comptable, c'est aussi de l'argent qu'on ne dépense pas en billetterie, en contrôleurs... S'il contribue à réduire efficacement la circulation automobile, le réseau routier se détériore moins vite et occasionne moins d'embouteillages, tout aussi coûteux.