Le patron de l'Apec en révolte contre le Medef

Venez discuter des problèmes du travail dans notre pays, mais aussi des problèmes sociaux ( retraites, chomage...)
Répondre
Avatar du membre
El Fredo
Messages : 26459
Enregistré le : 17 févr. 2010, 00:00:00
Parti Politique : En Marche (EM)
Localisation : Roazhon
Contact :

Message non lu par El Fredo » 14 janv. 2011, 11:52:00

http://www.lexpansion.com/economie/le-p ... -contre-le…
Le patron de l'Apec en révolte contre le Medef

Eric Verhaeghe, membre du Medef et président de l'Apec, a démissionné de toutes ses fonctions mercredi. Il publie un livre décapant pour expliquer les raisons de ce coup de colère. Il y fustige, entre autres, les positions du Medef sur le coût du travail et la fiscalité.

A priori, Eric Verhaeghe n'a pas le profil d'un révolté. Enarque, ex-haut fonctionnaire, aujourd'hui directeur des affaires sociales de la Fédération française des sociétés d'assurance, il faisait partie des pontes du Medef, au nom duquel il avait été nommé président de l'APEC (l'association pour l'emploi des cadres), mais aussi administrateur de l'Agirc, de l'Acoss, de la Cnav, de l'Unédic et de Pôle emploi. Un habitué des cercles de pouvoir, donc, plus enclin à la discrétion qu'à la polémique. Eh bien, c'est ce même personnage qui vient de claquer la porte de l'organisation patronale avec pertes et fracas, et par la même occasion, de démissionner de tous ses mandats.

Raison de sa colère : un désaccord avec les orientations de l'organisation de Laurence Parisot. D'abord sur l'avenir de l'APEC, qui fait actuellement l'objet de négociations entre les syndicats et le patronat. « Mais cela n'était que le symptôme d'un malaise plus profond », a-t-il précisé mercredi au cours d'une conférence de presse. En réalité, la crise de 2008 lui a fait prendre conscience que les idées du Medef sur le coût du travail ou le poids de la fiscalité « mettait en danger notre pacte républicain et risquait de favoriser les extrêmes ».

Pour expliquer le cheminement qui l'a amené à cette conclusion, il publie jeudi 13 janvier un livre* décapant. Point de départ de sa réflexion : la crise de 2008 et l'attitude des grands patrons, à ce moment surtout préoccupés, selon lui, par la préservation de leurs avantages (parachutes dorés...) : « Alors que les entreprises allaient mal, que des charrettes de licenciements étaient annoncées, une seule chose occupait les esprits : la situation juridique des dirigeants ». Ce constat est pour lui un véritable choc qui, de fil en aiguille, lui fait prendre conscience que « sous couvert de mener de grandes réformes économiques libérales, une aristocratie a dévoyé notre régime démocratique et l'a capté à son profit ».

Le discours sur le coût du travail en France (trop élevé selon le patronat) en particulier, l'inquiète: « En pesant sur les conditions de vie des salariés, on pousse ceux-ci à s'endetter pour vivre. Or, la crise a démontré les dangers de l'endettement ». Il défend aujourd'hui l'idée que les « élites doivent assumer leur part d'effort » pour redresser la situation financière du pays : « Le niveau atteint par la dette ne permet plus de financer des baisses d'impôts ciblées sur les plus hauts revenus ». Des positions qui, on le comprend, rendaient difficile la poursuite de ses activités au sein du Medef. En revanche, à 18 mois des prochaines élections présidentielles, on peut parier qu'elles intéresseront nombre de politiques...


* « Jusqu'ici tout va bien ! Enarque, membre du Medef, président de l'Apec, je jette l'éponge »
Eric Verhaeghe, Editions Jacob-Duvernet, 190 pages, 19,90 euros.
If the radiance of a thousand suns were to burst into the sky, that would be like the splendor of the Mighty One— I am become Death, the shatterer of Worlds.

Avatar du membre
Nombrilist
Messages : 63371
Enregistré le : 08 févr. 2010, 00:00:00

Message non lu par Nombrilist » 14 janv. 2011, 12:11:00

Pour résumer, nous avons un médéfien qui s'est réveillé un jour avec un début de fibre sociale. Une auto-guérison, presque un miracle ! En tout cas, il en a mis du temps à voir que les aristos dirigent la France.

Avatar du membre
KALIKO
Messages : 498
Enregistré le : 20 juil. 2010, 00:00:00
Localisation : 69100
Contact :

Message non lu par KALIKO » 14 janv. 2011, 17:52:00

sic : "... mais aussi administrateur de l'Agirc, de l'Acoss, de la Cnav, de l'Unédic et de Pôle emploi."...
bin voyons !!!... quoi d'autre encore que nous ignorons...
Et monsieur crache dans la soupe... à quel âge...? Piqué par quelle mouche?... Pis surtout maintenant que tout a été cassé et que tout est prêt pour déglinguer la sécurité sociale... Allez ! barrons-nous vite avant qu'on nous mette tout ça sur le dos...
Sombre ahuri... Farceur misérable.
PAS MORT ?... PLUS FORT !

Avatar du membre
El Fredo
Messages : 26459
Enregistré le : 17 févr. 2010, 00:00:00
Parti Politique : En Marche (EM)
Localisation : Roazhon
Contact :

Message non lu par El Fredo » 22 janv. 2011, 23:39:00

Voici une interview très intéressante du sieur en question :
http://humanite.fr/19_01_2011-éric-verh ... -la-porte-…
Le MEDEF parle d'in monde qui n'existe pas

Non, le coût du travail n’est pas trop élevé, c’est la rapacité de l’oligarchie qu’il faut attaquer ! Ex-directeur des affaires sociales de la fédération patronale des assurances, Éric Verhaeghe claque la porte du Medef. Il dénonce une doctrine économique qui met en péril la société et la démocratie.

Vous venez de quitter avec fracas le Medef que vous représentiez dans de nombreux organismes paritaires comme, par exemple, l’Apec, la Cnav ou encore l’Unedic. Dans le même élan, vous publiez un livre dans lequel vous remettez en cause, un à un, tous les dogmes économiques du patronat. Quel a été le déclic ?

Éric Verhaeghe. J’ai voulu exercer un droit d’inventaire sur la pensée économique dominante depuis quarante ans. Né à la fin des années 1960, je suis d’une génération qui n’a jamais connu que la crise, une génération qui a vécu dans la nostalgie des Trente Glorieuses. Avec l’implosion du modèle soviétique, quand l’économie de marché est restée comme seul système global, il y a eu un pari : plus on développera ce système, plus vite on arrivera à l’essence du marché en concurrence libre et parfaite, plus vite on sera prospères et on renouera facilement avec la croissance des Trente Glorieuses. Pendant la décennie 1980, on a fait de la privatisation à tout-va ; pendant la décennie 1990, on a abaissé le coût du travail – on a quand même dépensé 1,5 point de PIB en allégements de charges… Le résultat est terrible. En réalité, au bout de quarante ans, non seulement ça ne va pas mieux, mais au contraire, le système est en train de s’autodétruire. Cette crise n’est pas imputable à la rigidité du marché, mais au contraire, à sa flexibilité. Cela oblige à remettre en cause nos vieilles croyances. Collectivement, les élites de ce pays ne peuvent plus continuer à soutenir que les recettes d’avant 2008 vont nous sortir du marasme, elles sont la cause de la crise !

 «Prédateurs», «nomenklatura capitaliste», «médias stipendiés par le pouvoir»… Ce vocabulaire fleuri auquel vous recourez dans votre livre peut surprendre venant d’un acteur du système…

Éric Verhaeghe. Ce sont les mots de quelqu’un qui a vu… Aujourd’hui, chacun doit prendre sa responsabilité. Je m’adresse aux citoyens. Et les patrons sont des citoyens, aussi. Croire que travailler dans l’univers patronal signifie endosser forcément des doctrines qui sont dangereuses pour l’économie de marché est une erreur. Et je dis très clairement qu’aujourd’hui la doctrine du Medef est dangereuse parce qu’elle est potentiellement productrice d’un risque systémique. À mes yeux, ce qui ressort de la crise de 2008, c’est que la pérennité de l’économie de marché tient beaucoup plus aux salariés qu’à leurs patrons.

En démontant les impératifs catégoriques de la modération salariale et des baisses d’impôts, vous vous attaquez au cœur des revendications traditionnelles du patronat. Le Medef n’est donc pas aussi « réaliste » qu’il le prétend ?

Éric Verhaeghe. Le Medef de Laurence Parisot nous parle d’un monde qui n’existe pas. Il nous parle de gens trop payés, d’un État qui a trop de recettes fiscales, il fait un certain nombre d’observations économiques qui sont totalement à côté de la plaque. Je me souviens d’une réunion, au mois de novembre 2008, sur la protection sociale, où les patrons présents se sont livrés à un exercice de comparaison de leurs retraites chapeau. Ce jour-là, on avait sorti un listing avec les 500 plus grosses retraites chapeau de France, et la seule question qui se posait, c’était : qui est dans le top 100 ? La réalité de la France, aujourd’hui, la voilà : d’un côté, des salariés qui ont envie que ça marche, et de l’autre, un certain nombre de patrons dont la première préoccupation en temps de crise est de vérifier qu’ils sont mieux payés que les autres. J’appelle ça le syndrome « 10 mai 1940 » : en pleine tourmente, l’obsession de l’état-major est de s’occuper de ses prébendes. Est-ce que mes mots sont durs ? Oui, ils le sont, mais parce que la réalité l’est !

À maintes reprises, vous comparez les privilégiés d’aujourd’hui à la noblesse de l’Ancien Régime…

Éric Verhaeghe. Le paradigme de 1789 permet en effet de comprendre notre époque… Avant la Révolution, il y a une crise des finances publiques et une crise économique ; les élites en profitent et ne veulent surtout pas faire le moindre effort pour enrayer la crise. Aujourd’hui, nous avons un phénomène absolument identique : par exemple, mesure-t-on bien que la dette publique, c’est de l’épargne garantie pour les très gros revenus ? Lorsque Liliane Bettencourt reçoit un chèque de 30 millions d’euros au titre du bouclier fiscal, ce chèque est financé par de la dette que Liliane Bettencourt achète sous la forme d’emprunts d’État et, du coup, quand on la rembourse, on lui fait un nouveau cadeau. Le bouclier fiscal est une opération de passe-passe qui permet d’accroître le patrimoine des gros revenus en le faisant financer par l’écrasante majorité des citoyens.

Alors que Denis Kessler, longtemps figure de proue des assurances et du patronat tout court, s’était réjoui de l’élection de Nicolas Sarkozy qui devait, selon lui, permettre de rompre avec l’héritage du programme du Conseil national de la Résistance (CNR), on peut, à vous écouter, vous imaginer plus proche de certains des objectifs de ce même CNR… « L’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie », cela vous parle ?

Éric Verhaeghe. La Sécurité sociale telle qu’elle existe n’est plus la déclinaison de cet objectif. Aujourd’hui, ce sont les salariés qui portent l’essentiel du financement de la protection sociale. En 1945, le travail était la source de la richesse, mais en 2010, le travail l’est beaucoup moins. Il y a une très grande partie de la richesse qui est aujourd’hui produite à partir de l’argent lui-même… Continuer à asseoir la Sécurité sociale sur le seul travail, cela conduit à faire porter aux salariés un poids exorbitant. On a un sujet de fond, là…

Par votre position professionnelle de directeur des affaires sociales à la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA)…

Éric Verhaeghe. Ex-position professionnelle ! Je ne suis pas encore licencié, mais c’est en cours…

… Vous pouvez être soupçonné de vouloir faire le jeu des assurances privées qui lorgnent sur le magot…

Éric Verhaeghe. Eh bien, je vais vous répondre de façon transparente. Lorsque la FFSA a proposé, en novembre, de défendre auprès du Medef une position consistant explicitement à baisser le rendement des retraites pour favoriser la vente de produits d’assurance, j’ai écrit à Bernard Spitz (président de la FFSA – NDLR) que je n’étais plus d’accord avec ces positions. Je lui ai fait part de mon intention de partir et, ce faisant, d’abandonner tous mes mandats au sein des organisations patronales.

Est-ce que l’on débat à l’intérieur du Medef ?

Éric Verhaeghe. Sur les retraites, il y a eu un vrai débat parce que ce dossier était suivi par Jean-François Pilliard, de l’UIMM. C’est un vrai professionnel, c’est un vrai homme de dialogue. Sur le droit du travail, il n’y a aucun débat au sein du Medef : il y a un comportement extrêmement autoritaire que j’ai qualifié, et je persiste, d’immobilisme brejnevien.

Quel tableau !

Éric Verhaeghe. Quand j’étais petit, dans ma famille d’artisans du bâtiment, on disait déjà : « Il y a trop de charges ! » Trente ans plus tard, les grands patrons continuent dans la même veine. Ce discours est éternel dans le patronat, petit ou grand, quelles que soient les époques, quel que soit le montant des cotisations. Ce qui nous manque aujourd’hui, c’est une capacité à remettre en cause les tabous de la pensée unique. Et ça, c’est sûr que le Medef n’a aucune intention de le faire. En dehors de sa litanie traditionnelle – « soulageons-nous de toutes les charges que nous avons » –, il n’y a pas de pensée…

En même temps, ça marche : il suffit de regarder les montants en jeu…

Éric Verhaeghe. 30 milliards d’euros par an d’allégements de charges !

 Comment rompre avec ce système où la société paie à la place des détenteurs du capital ?

Éric Verhaeghe. La question n’est pas de savoir s’il faut des allégements de charges… Peut-être qu’il en faut, après tout ! Le vrai sujet, c’est le contrôle démocratique qui s’exerce. Et ce qui n’est pas admissible, c’est de faire vivre le mythe d’une économie de marché qui serait opprimée par l’État, alors qu’en réalité, l’économie de marché est subventionnée par le contribuable et qu’elle refuse dans le même temps tout contrôle sur les subventions qu’elle reçoit. Je préconise la transparence. On peut reprendre un système simple, prévu par la Déclaration de 1789 : « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée. » Dès lors qu’on met 1 euro public dans une activité, le citoyen doit avoir le droit de demander des comptes sur l’utilisation de cet euro.

D’une manière plus globale, il faut défaire l’emprise sur la vie sociale de quelques grandes entreprises, souvent issues du public, qui ont par leur structure capitalistique la capacité de dominer. C’est le cas fameux des entreprises dites « too big to fail » (trop grosses pour faire faillite – NDLR). Alors que le citoyen est obligé de trouver un contrat d’assurance pour toute activité, les banques, par exemple, ont droit à la garantie gratuite de l’État, quoi qu’elles fassent. Il faut commencer par informer les citoyens sur les privilèges exorbitants de ces grands groupes, il faut qu’on en ait conscience collectivement et que ça soit choisi. Je suis partisan du démantèlement des très grandes entreprises : dès lors qu’une entreprise atteint une taille qui la rend plus puissante qu’un État, il faut la démanteler. On sait le faire quand l’entreprise constitue une menace pour la libre concurrence. Je ne vois pas pourquoi on n’aurait pas ce pouvoir dès lors qu’elle menace la souveraineté des peuples.

Singulier parcours d’un affranchi

« Vous n’arriverez pas à me mettre dans une petite case », parie Éric Verhaeghe. Fils d’ouvrier grandi à Liège (Belgique), puisant dans la Révolution de 1789 une bonne partie de ses références politiques – « La France, c’était ça pour moi, le peuple qui s’affranchit de la tyrannie », écrit-il –, ce quarantenaire, au service de la FFSA et du Medef depuis 2007, a gardé de son parcours de haut fonctionnaire passé par l’ENA une certaine conception de l’intérêt général. Jusqu’ici tout va bien !, le livre qu’il vient de sortir aux Éditions Jacob-Duvernet (19,90 euros), en témoigne à foison.
If the radiance of a thousand suns were to burst into the sky, that would be like the splendor of the Mighty One— I am become Death, the shatterer of Worlds.

Avatar du membre
Golgoth
Messages : 22140
Enregistré le : 15 mars 2010, 00:00:00
Localisation : Chez moi

Message non lu par Golgoth » 24 janv. 2011, 21:23:00

Pas mal du tout cette interview icon_biggrin Va falloir que j'emprunte le bouquin.
T'es vraiment kon François, fallait créer une SCI. :mrgreen2:

Répondre

Retourner vers « Travail »

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré