Pour bien comprendre pourquoi les élections birmanes ont une certaine importance au niveau régional comme international, je ne peux que vous conseiller l'un des numéros du Dessous des Cartes :Pour la première fois depuis vingt-cinq ans, les Birmans ont participé, en masse, à des élections libres. Dès lundi 9 novembre au matin, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), de l’opposante et Prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, a annoncé une victoire écrasante de son parti. Vêtus de rouge, ils se sont massés devant le siège du parti, criant en choeur une des chansons phare de la campagne d’Aung San Suu Kyi, « Réveille-toi, Birmanie ! La LND arrive ». Les partisans du régime sont restés, eux, étonnamment discrets et le président Thein Sein, un ancien général en charge de la transition post-junte depuis 2011, n’est pas apparu en public.
Donnée grande favorite de ce scrutin qui doit parachever la transition amorcée en 2011 par les ex-dirigeants militaires, la LND affirme avoir gagné « avec plus de 70 % des sièges à travers le pays ». Un pourcentage qui leur permettrait d’avoir la majorité absolue au parlement malgré la présence d’un quart de députés militaires non élus. (...)
Au-delà des législatives, l’enjeu est l’élection du président, par le Parlement, dans quelques mois. Aung San Suu Kyi, empêchée d’accéder à la présidence par la Constitution héritée de la junte, a prévenu qu’elle « dirigerait le gouvernement » et serait « au-dessus du président » en cas de victoire de la LND.
Pour son parti, la tâche est compliquée par le fait que l’armée conserve un quart des sièges du Parlement, réservés à des militaires non élus. Cela veut dire que, pour diriger le pays et pouvoir choisir le président, la LND, seule ou avec ses alliés, doit remporter plus des deux tiers des sièges mis en jeu.
Si la victoire de la LND est acceptée cette fois-ci par l’armée, les généraux devraient continuer à disposer d’importantes prérogatives. Des positions ministérielles sont réservées à l’armée, la Constitution lui donne le droit d’outrepasser les décisions du gouvernement dans certaines circonstances, et les militaires détiennent, à travers des sociétés holding, une forte emprise sur l’économie.
Le Monde
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Aung San Suu Kiy a beau avoir fait gagner son parti aux législatives, elle ne pourra pas prétendre à la présidence parce que la Constitution empêche quiconque marié avec un étranger ou ayant eu des enfants avec un étranger d'accéder à la présidence. Elle pourrait néanmoins être à la tête du gouvernement.
Le Dessous des Cartes rappelle qu'il faut une majorité de 75 % pour pouvoir modifier la Constitution. Son score peut paraître écrasant mais il peut être encore insuffisant pour pouvoir modifier une constitution qui accorde de larges pouvoirs aux militaires. La partie est donc loin d'être gagnée.