Je crois que tout le monde avait bien compris que les sanctions économiques n'avaient qu'une efficacité à moyen / long terme (voir les exemples de sanctions à l'égard de la Corée du Nord, l'Iran, Cuba, la Syrie, le Venezuela, etc.). La Russie en paie le prix et en paiera de plus en plus le prix mais les sanctions économiques n'ont presque jamais un effet immédiat et personne n'a sérieusement imaginé que les sanctions serviraient à dissuader la Russie de poursuivre sa guerre à très court terme.johanono a écrit : ↑25 août 2022, 11:53:03Je ne sais pas si la Russie a les moyens de faire sa guerre. Elle a l'arme nucléaire, en tout cas, elle sait que les Occidentaux n'oseront jamais l'affronter directement, même s'ils aident l'Ukraine. Cela lui procure beaucoup de certitudes. Elle dispose aussi de beaucoup de matières premières, et elle sait qu'à la longue, les Européens rechigneront à se passer de son gaz. Donc le rapport de forces entre la Russie et les Européens est plutôt favorable à la Russie, malgré les faiblesses de l'économie russe.
La motivation des sanctions était de forcer Poutine à faire machine-arrière. Or Poutine ne fait pas machine-arrière. L'hypothèse la plus probable aujourd'hui est celle d'un conflit qui s'enlise et qui dure, avec des morts qui s'accumulent (notamment côté ukrainien) et donc des Européens qui risquent d'être pénalisés pendant longtemps. Il y a de quoi douter.
Tu parles de notre protection sociale, mais nous la finançons au prix de cotisations sociales très élevées (qui grèvent la compétitivité de notre économie) et au prix de déficits publics très élevés (ce qui nous place sous la dépendance des marchés financiers). Ce n'est pas très satisfaisant, quand même...
Le cas des pays baltes est intéressant. Si j'ai bien compris, ils ont anticipé les difficultés, il y a déjà quelques années, en entreprenant de diversifier leurs approvisionnements. C'est très bien. Nous aurions dû faire pareil, en exploitant mieux l'atout que constitue (constituait ?) notre parc nucléaire, pour faire en sorte d'être complètement autonomes en matière de production électrique : une production électrique abondante et autonome nous aurait permis de nous passer plus facilement du gaz russe. Les gouvernements qui se sont succédé ces dernières années n'ont rien anticipé du tout, préférant au contraire sacrifier sur l'autel de l'intégration européenne un système de production d'électricité qui fonctionnait plutôt bien (sous-investissement dans l'entretien des centrales existantes, tergiversations sur l'EPR, fermeture de Fessenheim, mise en place du mécanisme ubuesque de l'ARENH, tarif unique européen de l'électricité, etc.). Donc contrairement aux gouvernements baltes, nos gouvernements n'ont rien anticipé (c'est pareil en Allemagne : il faudra d'ailleurs un jour s'interroger sur le bilan de Mme Merkel). Et clairement, je leur reproche cette absence totale de vision stratégique.
La conséquence de tout ça, c'est qu'aujourd'hui, contrairement aux pays baltes, nous n'avons pas les moyens de nous passer du gaz russe.
Si on voulait de la dissuasion à court terme, il aurait fallu une réponse militaire, sans doute déjà en amont de la guerre.
Tu fais erreur quand tu crois que les Européens rechigneront "à la longue" à se passer du gaz russe. Tout simplement parce qu'à la longue et même avant, d'ici 3-4 ans, nous nous serons déjà passés du gaz russe et nous n'en aurons plus besoin. Il y aura forcément quelques moments un peu plus compliqués que d'autres à passer durant ces années de transition mais ensuite nous serons débarrassés de ce problème. Si on ne le fait pas maintenant, on le fera jamais.
L' "avantage" de cette guerre, s'il y en a un, c'est d'avoir engagé les Européens à marche forcée dans la réduction drastique d'importation des énergies russes, à défaut de l'avoir entamé en 2014 comme nous aurions déjà dû le faire. Je ne vois vraiment aucun intérêt à vouloir maintenir coûte que coûte notre dépendance au gaz russe.
On peut faire la leçon sur le nucléaire, et je pense que les Allemands ont tout intérêt à faire tourner leurs centrales quelques années encore, mais je rappelle juste au passage que depuis 50 ans le nucléaire est un mode de production qui n'est absolument pas maîtrisé au niveau des déchets et pas complètement au niveau de la sécurité durant la production (Fukushima). Donc le nucléaire est très loin d'être la panacée et ne le sera probablement jamais tant que nous n'aurons pas industrialisé la fusion nucléaire (qui règle à peu près tous les problèmes).
Et contrairement à ce que tu dis, la France a évidemment beaucoup plus les moyens de se passer du gaz russe (dont elle dépend déjà aujourd'hui très peu) que les Baltes.