Forts des raids aériens de l'Otan, depuis Ajdabiya, les insurgés libyens sont repartis à l'offensive samedi 16 avril en direction de l'ouest de la Libye. Dans le même temps, les troupes fidèles à Kadhafi ont continué de pilonner Misrata, sans doute avec des armes "interdites".
L'armée régulière libyenne pilonne Misrata
A 200 km à l'est de Tripoli, la ville de Misrata, tenue par les rebelles et littéralement assiégée par l'armée régulière libyenne depuis près de deux mois a encore connu une journée difficile et meurtrière.
"Il y a eu beaucoup de blessés" a indiqué à l'AFP Paolo Grosso, un médecin italien de l'association Emergency, tandis que d'autres sources médicales ont fait état d'au moins six morts et 31 blessés ces dernières vingt-quatre heures.
D'après les observations d'un photographe de l'AFP, comme l'avaient dénoncé vendredi les insurgés et l'ONG Human Rights Watch, les pro-Kadhafi auraient effectivement eu recours à des des bombes à sous-munitions, interdites depuis 2010 par une convention internationale, car susceptibles de tuer et de mutiler à des dizaines de mètres autour de leur point d'impact.
Des morts, des blessés et des affamés
Vendredi, "nous avons eu cinq blessés qui ont dû subir une amputation", trois du pied et deux de la main a confirmé Mustafa, un kinésithérapeute devenu urgentiste par la force des choses à l'hôpital Hikma de Misrata.
Selon Jiraal, un Libyen rentré d'Angleterre pour prendre part au combat, les forces loyalistes ne tentent pas seulement de tuer les combattants adverses, mais elles cherchent à affamer la ville, par exemple "en attaquant l'usine de produits laitiers", qui s'est consumée toute la journée, ou en détruisant le site de purification d'eau.
De leur côté, les insurgés auraient détruit samedi quatre chars qui étaient dissimulés dans des maisons pour échapper aux raids de l'Otan, a affirmé un médecin présent sur les lieux.
Des évacuations par voie maritime
Alors que les combats ne semblent pas près de s'arrêter et que la situation humanitaire empire, Médecins sans frontières a annoncé avoir évacué par voie maritime 99 blessés, dont dix dans un état critique, vers Zarzis, dans le Sud tunisien, où le Croissant rouge et les autorités sanitaires les ont pris en charge.
De même, c'est par la mer que l'Organisation internationale pour les migrations, qui a affrété un second bateau, a indiqué avoir permis à des milliers de réfugiés de quitter le pays. Dans des conditions plus que précaires, ils survivaient dans un camp situé près de Misrata.
Les rebelles de nouveau à l'offensive
Dans l'est de la Libye, le front a encore bougé. Progressant de nouveau vers l'ouest, les insurgés partis de Misrata ont repris une quarantaine de kilomètres en direction de Brega, l'un des ports pétroliers du pays. Mais à mi-chemin ils ont essuyé une attaque meurtrière de roquettes, ont indiqué des responsables de l'hôpital d'Ajdabiya qui ont réceptionné six corps sans vie et une vingtaine de blessés.
"J'étais là-bas, au km 40. Il y a beaucoup de petites roquettes Grad qui nous sont tombées dessus" a raconté à l'AFP Maher Salim, un combattant insurgé d'une trentaine d'années. De même, un journaliste de l'AFP a témoigné avoir vu trois corps carbonisés et de nombreux blessés, dont les plus graves devaient être acheminés vers Benghazi.
L'Otan poursuit ses opérations, mais manquerait de munitions
Dans le même temps, l'intervention de l'Otan a redoublé d'intensité, l'aviation menant comme ces trois derniers jours des bombardements intensifs pour leur ouvrir la route de Brega ont indiqué les insurgés.
Par ailleurs selon l'agence officielle Jana, les avions de chasse de l'Alliance atlantique auraient de nouveau attaqué Syrthe, la ville natale de Mouammar Khadahi, et la région d'Al-Hira, au sud de Tripoli.
Toujours sur le terrain militaire, selon le Washington Post qui cite des hauts responsables de l'Otan, il est à noter que les forces alliées seraient à court de certains types de munitions et en particulier de bombes de précision. De là, l'idée que sans les Etats-Unis, France, Royaume-Uni et consorts ne seraient pas en mesure de gérer une telle offensive...
Pendant ce temps sur la scène diplomatique...
Quoi qu'il en soit, sur le terrain diplomatique, d'une même voix, Barack Obama, David Cameron et Nicolas Sarkozy ont réaffirmé vendredi dans quatre journaux de premier plan qu'il était "impossible d'imaginer que la Libye ait un avenir avec Kadhafi".
Côté russe, on estime que l'Otan a d'ores et déjà outrepassé le mandat délivré par l'ONU et l'on appelle à "avancer vers un règlement politique et diplomatique".
Côté Français, en la personne d'Alain Juppé, le ministre des Affaires étrangères, on assure qu'il n'est "nul besoin d'une nouvelle résolution" onusienne pour faire tomber Kadhafi, vu sa perte totale de légitimité.
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