Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

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Cobalt

Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par Cobalt » 05 oct. 2011, 09:40:11

Le paradis fiscal qu'est la Suisse ! bien pratique ces paradis fiscaux pour mettre le pognon des mallettes qui ne vont pas qu'en Suisse mais font presque le tour du monde de ces paradis qui du coup empêche de porter la preuve et de retrouver l'oseille,si ces pratiques sont tolérés par tous nos politiques du monde c'est qu'ils le veulent,c'est bien pourquoi ils existent et demeurent,ça devrait donner des idées à nos indignés,faire abolir ce système ça c'est concret et ça changerait certaine pratique mafieuse de nos politiques dans le monde !

Cobalt

Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par Cobalt » 05 oct. 2011, 09:41:23

Il faut prendre le mal à la racine !

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El Fredo
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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par El Fredo » 05 oct. 2011, 09:47:48

La Suisse n'est un paradis fiscal que pour les riches expatriés qui négocient leurs impôts au forfait avec des cantons complaisants, le reste des habitants paie un niveau d'impôt comparable aux autres pays développés (il y a même un impôt sur la fortune).

http://www.francemondexpress.fr/IMG/pdf ... suisse.pdf
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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par Cobalt » 05 oct. 2011, 10:07:58

Oui,je sais,delon,auteuil,béart et la petite amie laroche du ministre des finances baroin, qui a vite rapatrié son pognon depuis qu'elle est avec baroin c'est vrai ça la fout mal quand même !

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johanono
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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par johanono » 05 oct. 2011, 13:53:27

Bocian a écrit :L'essence du fédéralisme est dans la répartition négociée (si possible, bien pensée...) des compétences entre échelons de gouvernements, et dans le contrôle démocratiques des dits "échelons".

Instaurer un authentique fédéralisme (i.e : pas d'autosaisine de compétences hors du pacte conclu, et pas de pouvoirs sans contrôle démocratique) est le seul moyen de réduire l'impuissance politique et le déficit démocratique dont souffre aujourd'hui l'Union européenne.
Le fédéralisme européen ne marche pas et ne peut pas marcher. Je renvois à ce que j'avais indiqué en décrivant le Triangle de Rodrik :
Dani Rodrik nous enseigne que pour comprendre la mondialisation, il faut se référer à une sorte de trinité dans laquelle il faut choisir deux des trois éléments suivants (et donc en sacrifier un des trois) :
- la représentation démocratique des peuples,
- le respect de la souveraineté des Etats nationaux,
- l'intégration des marchés.

Il y a donc trois possibilités :

1) Sacrifier la représentation démocratique des peuples au profit de l'intégration des marchés et des Etats nationaux. C'est ce que Rodrik appelle "la camisole de force dorée", et c'est ce qui se rapproche le plus de la construction européenne actuelle. Dans un contexte d'intégration croissante des marchés, les Etats concèdent des parcelles de souveraineté mais continuent à se faire concurrence entre eux, avec notamment des pratiques de dumping social et fiscal et des initiatives diplomatiques isolées les unes des autres. A l'intérieur de chaque Etat, le constat est le même malgré les alternances politiques, le citoyen n'a plus grand-chose à dire.

2) Le fédéralisme global consiste à choisir la démocratie et l'intégration des marchés. Les Etats disparaissent, remplacés par des institutions fédérales dignes de ce nom et respectueuses de la volonté populaire. C'est l'exemple des EU.

3) L'exemple du compromis de Bretton-Woods : on garde la démocratie et les Etats, mais il faut alors accepter une moindre intégration des marchés. C'était comme ça jusque dans les années 80. Il y avait des accords internationaux, mais l'intégration des marchés était très relative, et les Etats pouvaient continuer à mener leurs propres politiques avec leurs propres institutions en réponse aux demandes de leurs citoyens.

Cette théorie peut tout à fait s'appliquer à la construction européenne (tout dépend du périmètre géographique retenu).

Selon ce schéma, la construction européenne doit donc faire un des trois choix suivants :
- une marche forcée vers le fédéralisme, avec abandon des prérogatives nationales,
- sacrifier l'intégration des marchés (par exemple abandonner l'euro, ou restreindre la libre circulation des capitaux, des biens et des hommes,
- conserver la camisole de force dorée actuelle, dans laquelle la démocratie a été sacrifiée et où le citoyen n'a plus grand chose à dire.

La situation actuelle ne donne pas satisfaction.

La solution fédéraliste pourrait être intéressante, mais elle se heurte à une difficulté de taille : les Européens occupent peut-être un même continent, mais ils ont des traditions sociales, politiques, économiques très différentes d'un pays à l'autre. La France présente certains particularismes (laïcité, services publics, indépendance diplomatique, agriculture forte) et risque d'être mise en minorité sur ces différentes questions.

Bref, les Français ne trouveront probablement pas leur bonheur dans la solution fédérale, si bien que le fédéralisme risque de leur apparaître comme antidémocratique.

La troisième solution, c'est de l'Europe de la coopération entre Etats-nations, apparaît donc comme la plus réaliste, quoique moins ambitieuse en apparence.
Contrairement à ce que l'on croit, les Européens ne forment pas un peuple uni. Certes, ils ont comme point commun d'être des démocraties, mais ça ne suffit pas pour caractériser un peuple. Le fait est que les Européens se sont déchirés, se sont fait la guerre comme peut-être nulle part ailleurs dans le monde, et qu'ils ont des traditions politiques, économiques et sociales différentes.

En France, on continue de rêver au couple franco-allemand. Pourtant, ces deux pays ont un rapport à l'Europe totalement différent, résultant de deux parcours historiques différents depuis le Traité de Verdun en 843. La France eut assez tôt un territoire stable et un Etat fort. Pour la France, l'idée européenne ne fut jamais fondamentale, elle ne constitue que l'expression d'une sorte de vocation universaliste. L'Europe est pour la France une terre de conquête, mais elle n'est pas sa substance, gardée intacte depuis des siècles. Il en va autrement de l'Allemagne, qui depuis le traité de Verdun, a toujours eu une identité et une territoire mouvants, et a cherché pendant des siècles à reconstruire l'ancien Empire Romain, au détriment d'un Etat fort (car le Saint-Empire Romain Germanique, composé d'une multitude de pays et de principautés, n'était qu'un agrégat sans forces). Pour l'Allemagne, l'Europe est un moyen de recouvrer son identité et de restaurer sa souveraineté perdue. L'Allemagne rêve donc d'une Europe à son image, fédérale, dont elle serait le centre de gravité, et à qui elle imposerait ses conditions économiques et politiques.

Le Royaume-Uni reste tourné vers l'Amérique. Les Pays de l'Est considèrent l'Europe comme un simple guichet à subventions...

Les pays européens ne sont d'accord sur rien entre eux, ils ne sont même pas d'accord sur la nature même de l'Union européenne. Comment arriver à une solution fédérale dans ces conditions ?

Un "authentique fédéralisme" est une solution intellectuellement séduisante, théoriquement à même de réduire l'impuissance politique des Etats européens, sauf que pour surmonter cette impuissance politique, il devra nier les différences de traditions politiques, économiques et sociales entre les différents pays européens, et il sera donc considéré comme anti-démocratique.

Pour en revenir à Alain Juppé, il est quand même remarquable que ce soit un homme politique considéré comme gaulliste qui fasse aujourd'hui cette proposition sur l'Europe fédérale. Qu'un prétendu gaulliste se dise aujourd'hui pour l'Europe fédérale montre quand même bien que tous ces gaullistes de l'ancien RPR ont trahi l'héritage politique qu'ils étaient censés défendre.

Cobalt

Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par Cobalt » 05 oct. 2011, 14:00:04

Nous sommes en 2011 pas en 1962,les choses changent et qui sait ce qu'en penserait de Gaulle aujourd'hui,tu serais peut être étonné^^

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El Fredo
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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par El Fredo » 05 oct. 2011, 15:25:21

johanono a écrit :Contrairement à ce que l'on croit, les Européens ne forment pas un peuple uni.
Ah parce qu'il y en a qui croient à ça ?
If the radiance of a thousand suns were to burst into the sky, that would be like the splendor of the Mighty One— I am become Death, the shatterer of Worlds.

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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par johanono » 05 oct. 2011, 19:49:19

El Fredo a écrit :
johanono a écrit :Contrairement à ce que l'on croit, les Européens ne forment pas un peuple uni.
Ah parce qu'il y en a qui croient à ça ?
Oui : tous les fédéralistes.

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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par Bocian » 05 oct. 2011, 20:25:24

Non, Monsieur, "tous les fédéralistes (ne)croient (pas) que les Européens forment un peuple uni" (sic). Comme j'ai la faiblesse de croire que je connais assez bien ceux là (i. e : adhérents de l' "UEF-France", du "Mouvement Européen-France", des "Jeunes Européens-France", des "Jeunes Européens Fédéralistes / JEF-Europe", etc) je peux vous assurer qu'aucun ne va jusque là, même les plus idéalistes qui soient.

En revanche, il y a effectivement plutôt consensus chez eux pour estimer que - ponctuellement, sur des questions bien précises - les citoyens européens pourraient fort bien - à l'avenir - former au moins un "corps électoral" : notamment lors des élections européennes (encore que : tant que nous en resterons à des circonscriptions européennes en fait inscrites dans les limites du territoire national, nous n'en serons pas là...).

Pour réfuter l'idée du fédéralisme, vous vous appuyez sur le fait que les européens aient des traditions sociales, politiques, économiques très différentes d'un pays à l'autre ; et on en peut en effet qu'être d'accord sur le constat (la France présentant effectivement certains particularismes forts : laïcité, services publics, indépendance diplomatique, agriculture forte).

Sauf que vous oubliez là un "petit" détail : l'Etat fédéral n'est pas un super-Etat qui - à l'image de l'Etat jacobin centralisé français - régirait toutes les compétences étatiques. A la base du fédéralisme, il y a la fission de l'atome de la souveraineté sur divers niveaux de gouvernements et la répartition de ces compétences entre les divers contractants que seraient l'Union et ses Etats composantes.

Et, suivant le détail de la répartition des compétences, il ne serait donc pas complètement impossible que certaines des questions auxquelles vous êtes visiblement sensible reste du domaine des Etats membres (plutôt qu'être transférées à l'Union...).

Par exemple, je serais assez d'accord avec vous pour dire que tout ce qui touche à la laïcité et aux services publics doit (par exemple) rester domaine de compétence des Etats membres. En revanche, je crois qu'il serait bon que l'Europe se dote effectivement d'une diplomatie propre. Et comme nous ne sommes sans doute pas d'accord sur ce point, je ne vois guère qu'un arbitrage possible : celui des citoyens.

C'est pourquoi, en bon fédéraliste et comme l'ensemble de mes petits camarades (voir supra) je souhaite en effet que - lorsque l'Union se sera enfin dotée d'un "pacte fédéral de répartition de ses compétences" (voire, éventuellement, une espèce de "règlement intérieur" qu'on pourrait alors - comme de bien entendu - appeler "Constitution"...) que ces documents soient présentés à tous citoyens européens que nous sommes, pour débat voire approbation (ou plus encore, si affinités...).

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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par Bocian » 05 oct. 2011, 21:14:22

Pour info, aux Etats-Unis (Etat fédéral, s'il en est...) toutes les compétences ne sont pas non plus centralisées à Washington :

Il y a des Etats où l'on pratique la peine de mort, d'autres où cette pratique a été abolie ; il y a des Etats encore sous le régime de la prohibition, et d'autres où la vente d'alcool est (seulement) réglementée ; chaque Etat peut mettre en place la fiscalité directe et indirecte qu'il souhaite (jusqu'à taxer les salariés - et les migrations de travail pendulaires - venant de l'Etat voisin) (et cela allant même jusqu'à taxer spécifiquement certains produits venant d'autres Etats !) ; de même, chaque Etat a son propre code de la route (seulement harmonisés entre eux pour faciliter la circulation sur certains axes routiers...) ; éventuellement son propre code de lois, son propre régime linguistique (son propre parlement - bicaméral ou monocaméral, c'est selon - mais aussi sa propre constitution, son drapeau, sa devise, et son identité...).

Tout cela non pas pour dire les Etats-Unis sont un paradis à imiter en tous points (certes pas...) mais au moins pour réfuter l'idée erronée selon laquelle le fédéralisme serait la centralisation des compétences et l'uniformisation des sociétés. Bien au contraire.

Comme le proclament très justement les devises des Etats-Unis et de l'Union européenne : "E pluribus unum" là-bas ou "In varietate, concordia" ; soit, en résumé : "Unis dans la diversité" dans les deux cas.

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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par johanono » 06 oct. 2011, 00:32:17

Les fédéralistes européens font souvent référence aux Etats-Unis d'Amérique. D'ailleurs, ils emploient souvent l'expression "Etats-Unis d'Europe" pour illustrer leur ambition fédéraliste. L'exemple américain est très intéressant, en effet.

Rappelons que ce sont des colons anglais qui ont émigré en Amérique pour y fonder un pays neuf, quasiment de toutes pièces. Les différences de traditions politiques, économiques ou sociales qui bloquent le fonctionnement de l'Union européenne n'avaient pas lieu aux EU, puisqu'il s'agissait d'un pays tout neuf fondé par des colons issus d'une même mère patrie et ayant la même histoire entre eux. Il était donc beaucoup plus facile de créer un Etat fédéral pour les colons anglais en 1776 que pour les Européens aujourd'hui. Le pire, c'est que malgré ces facilités qu'ils ont eues, ils n'ont même pas su échapper à une guerre civile. Et oui, si les EU existent encore aujourd'hui, c'est parce que les Etats du Nord hostiles à toute sécession ont remporté une victoire militaire sur les Etats du Sud... Cela donne une idée du caractère utopique, voire insurmontable, du fédéralisme européen...

Alors bien sûr, aux EU, toutes les compétences ne sont pas centralisées à Washington. Pourtant, cela n'empêche pas l'Etat fédéral américain d'être rejeté dans l'Amérique profonde, d'être considéré comme trop cher voire antidémocratique. Beaucoup d'Américains considèrent aujourd'hui qu'il a trop de pouvoirs. Donc malgré l'histoire commune qui est la leur, malgré le fait que leur Etat fédéral a pu voir le jour assez facilement, les Américains ne sont plus d'accord entre eux, aujourd'hui, sur les contours de cet Etat fédéral. Et vous voudrez que les Européens, perclus de guerres et de divisions, s'entendent entre eux...

Alors vous dites :

"Et, suivant le détail de la répartition des compétences, il ne serait donc pas complètement impossible que certaines des questions auxquelles vous êtes visiblement sensible reste du domaine des Etats membres (plutôt qu'être transférées à l'Union...).

Par exemple, je serais assez d'accord avec vous pour dire que tout ce qui touche à la laïcité et aux services publics doit (par exemple) rester domaine de compétence des Etats membres. En revanche, je crois qu'il serait bon que l'Europe se dote effectivement d'une diplomatie propre. Et comme nous ne sommes sans doute pas d'accord sur ce point, je ne vois guère qu'un arbitrage possible : celui des citoyens."

Mais tout le problème est là. Un sujet jugé sensible dans tel pays européen ne le sera pas dans un autre. Chaque pays a ses propres préoccupations. Si vous admettez qu'un sujet sensible reste du domaine des Etats membres, alors chaque pays viendra avec sa propre revendication, et si vous admettez les revendications de tous ces pays, alors plein de domaines de compétences resteront du domaine des Etats membres, et alors vous ruinerez votre propre ambition fédéraliste.

Vous en appelez à l'arbitrage des citoyens. Mais de quelle façon ? En conservant un vote Etat par Etat, ou en organisant un scrutin européen global ? Si vous gardez un vote Etat par Etat, alors vous en revenant au problème que je viens d'évoquer, c'est-à-dire que les citoyens de chaque pays demanderont à conserver leur compétence nationale sur les sujets auxquels ils sont sensibles, et alors vous ruinez votre propre ambition fédéraliste. Si vous faites un scrutin européen global, alors ça veut dire que les Français pourront être mis en minorité par le reste des citoyens européens sur des questions telles que la laïcité ou les services publics, questions auxquels peu de pays européens sont sensibles. Les Français n'accepteront sans doute pas d'être mis en minorité, et ils auront raison.

Intéressons nous aux questions économiques et sociales. Le fait est qu'il y a en Europe un marché unique, une "concurrence libre et non faussée", et que ce marché unique concerne des pays aux caractéristiques sociales, économiques et fiscales très différentes. D'où les problèmes de distorsions de concurrence, d'où les problèmes de dumping social et fiscal. La libre concurrence avec des pays aux normes sociales et fiscales plus faibles que les nôtres favorise les délocalisations et le dumping social et fiscal. Nous avons donc le choix entre sacrifier nos acquis sociaux sous prétexte de nous adapter à la concurrence internationale, ou alors refuser de nous adapter, au risque de subir les délocalisations. Cette situation européenne est donc fondamentalement incompatible avec le souci de préserver un système social digne de ce nom.

Les fédéralistes ont donc inventé une réponse : l'harmonisation fiscale et sociale, impliquant notamment un "gouvernement économique européen". Mais une fois qu'on a dit ça, on n'a rien dit. Sur quelles bases faire cette harmonisation ? La France est un des pays aux normes fiscales et sociales les plus élevées, donc au coût du travail le plus fort également. Croyez-vous vraiment que l'Allemagne acceptera d'instituer un SMIC juste pour nous faire plaisir ? Croyez-vous vraiment que les pays de l'Est acceptera de doubler ou tripler leurs salaires moyens juste pour ne plus nous faire de concurrence déloyale ? C'est irréaliste ! Si harmonisation il devait quand même y avoir, elle ne pourrait se faire que sur une base médiane, qui serait synonyme de régression sociale pour la France, ce que les Français n'accepteraient pas.

Vous évoquez la diplomatie européenne. Encore une utopie. Rappelons-nous qu'au moment de la guerre d'Irak, la plupart des pays européens étaient d'accord pour suivre les EU. La France était minoritaire. Si on suit votre logique, avec une diplomatie et une armée européennes, des soldats français auraient dû aller combattre aux EU, malgré le refus de la France...

Il y a donc une contradiction fondamentale entre l'efficacité européenne, qui commande une solution fédérale, et l'acceptation démocratique de l'Europe par les peuples, qui commande de préserver les souverainetés nationales. Vous êtes conscient de cette contradiction potentielle, c'est pour cela que vous admettez qu'il puisse y avoir des exceptions aux transferts de souveraineté. Ce faisant, vous ruinez vous-même votre propre ambition fédéraliste...

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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par Bocian » 06 oct. 2011, 06:04:33

D'abord, juste préciser que ce n'est pas par souci de contourner un obstacle que les fédéralistes admettent qu'il puisse y avoir des exceptions aux transferts de souveraineté, mais bien par principe : leur ambition n'est pas de construire un super Etat à l'échelle continentale qui reproduirait les défauts - en plus grand - du centralisme jacobin.

Pour ce qui est de la diplomatie européenne (et de la position des Etats européens lors de la crise d'Irak) je crois qu'il serait tout de même bon de rappeler que si certains Etats étaient interventionnistes, ce n'était pas le cas de leurs opinions (même au Royaume-Uni). Depuis lors, certains de ces Etats ont d'ailleurs du se rétracter. Quant à une future diplomatie européenne : elle serait donc mise en oeuvre par la Commission, sous contrôle démocratique du Parlement européen ; et non pas seulement le résultat des sommets entre Etats, où ce genre de choses se décident dans l'opacité et sans aucun contrôle démocratique effectif (on pourrait y voir un progrès démocratique). Quant à l'engagement militaire des forces armées des Etats membres, on peut également envisager des clauses d'exemption : après tout qu'elle n'intervienne absolument pas en Irak n'a pourtant pas empêché la France de regagner le commandement intégré de l'OTAN.

Sur les questions économiques et sociales, afin de palier aux situations de déséquilibre dont vous soulignez l'existence, plutôt que de parler d'harmonisation brusque sans doute faudra-t-il d'abord organiser une convergence souple des systèmes, comme ce fut déjà partiellement réalisé sur le plan monétaire (et ce qui peut fort bien se négocier, eu égard aux avantages que les pays réticents à ce sujet tirent néanmoins de leur appartenance à l'Union). Quoi qu'il en soit, croyez-vous vraiment que les économies du Maine et de la Floride, du Montana et de la Californie, de l'Alaska et de la Caroline du sud soient vraiment semblables en tous points ?

Par ailleurs, il me semble que vous surestimez le rejet de l'Etat fédéral aux Etats-Unis même : c'est là tout de même une option politique très marginale (mais effectivement assez bruyante) dans le paysage politique américain.

Enfin, sur le plan historique, c'est là une inexactitude qu'on retrouve souvent chez les français que de croire que les Etats-Unis sont sortis tout armés de la tête de Jupiter (et que la mise en place des Etats-Unis fut une chose relativement facile...) : il n'en fut rien. A l'époque, chaque Etat a sa propre identité marquée et, une fois l'autorité coloniale britannique expulsée du continent, bien peu d'entre eux souhaitent vraiment abandonner sa nouvelle souveraineté à quelque autorité supérieure que ce soit.

Par ailleurs il est également inexact d'affirmer que les colons américains constituaient une société homogène (ce qui expliquerait leur unité ultérieure...) ou qu'ils venaient tous d'une même mère patrie : à moins de considérer que cette "unique" mère patrie soit l'Europe elle-même, dont les colons partis vivre aux Amériques reproduisent là les clivages et parfois même les haines nationales et religieuses de l'époque. Où certains Etats sont alors massivement germanophones (Pennsylvanie), majoritairement néerlandophones New York), catholiques (Maryland) ou viscéralement puritains protestants (Massachusetts). Faute de mieux, les constituants de 1787 avaient envisagé de prendre pour langue officielle de l'Etat fédéral : l'allemand voire... le grec (avant de finalement renoncer à l'idée même d'une langue officielle...).

Et si les Etats-Unis ont été, par la suite, structurés de façon rationnelle sous la forme d'une fédération (en 1787) c'est effectivement pour échapper aux risques de... guerre entre Etats qu'induisait alors le système bancal et inefficaces des "Articles de confédération" ayant cours depuis l'indépendance (et 1777). Une situation alors anarchique et désordonnée assez comparable à celle de l'Union européenne actuelle, finalement...

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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par Bocian » 06 oct. 2011, 06:23:12

Sur le sujet :

(1) Les Etats-Unis d’Amérique : un modèle ?
En quoi le Fédéralisme américain est-il un exemple à suivre ?

http://www.taurillon.org/Les-Etats-Unis ... -un-modele


(2) Histoire du Fédéralisme en Amérique du Nord
La naissance des Etats-Unis : le fruit d'une longue maturation

http://www.taurillon.org/Histoire-du-Fe ... ue-du-Nord


(3) Quelles différences entre les États-Unis d’Amérique et l’Union européenne ?

http://www.taurillon.org/Quelles-differ ... et-l-Union


(4) USA : Le fédéralisme dans tous ses États

http://www.taurillon.org/USA-Le-federal ... -ses-Etats


(5) En quoi le fédéralisme européen sera-t-il différent ?

http://www.taurillon.org/En-quoi-le-fed ... -different

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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par El Fredo » 06 oct. 2011, 10:09:53

johanono a écrit :Rappelons que ce sont des colons anglais qui ont émigré en Amérique pour y fonder un pays neuf, quasiment de toutes pièces. Les différences de traditions politiques, économiques ou sociales qui bloquent le fonctionnement de l'Union européenne n'avaient pas lieu aux EU, puisqu'il s'agissait d'un pays tout neuf fondé par des colons issus d'une même mère patrie et ayant la même histoire entre eux. Il était donc beaucoup plus facile de créer un Etat fédéral pour les colons anglais en 1776 que pour les Européens aujourd'hui.
C'est faux. Au moment de l'indépendance, la Pennsylvanie était peuplée de Suédois et d'Allemands, New York d'Anglais et de Hollandais, le New Jersey d'Ecossais, la Virginie de Polonais, etc. Et les différences religieuses et linguistiques étaient tout aussi significatives. Et après l'indépendance des 13 colonies il a fallu compter avec l'apport de Français, d'Espagnols, de Mexicains, et également de tous les esclaves Africains et des immigrants Irlandais, Italiens, Juifs, etc. C'est la fondation des USA qui a créé le peuple américain, et qui fait qu'un O'Malley, un Van Doren, un Anderson, un Wagner, un Guttierez, un Pulawski, se sentent américains. Et c'est à cause de ces différences que les Pères Fondateurs ont choisi le fédéralisme et non le centralisme. D'ailleurs les USA n'ont jamais eu de langue officielle au niveau fédéral.
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Re: Alain Juppé se prononce pour une Europe fédérale

Message non lu par marco » 06 oct. 2011, 10:55:31

pour couper court a toute imprécision historique.

http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/amnord/us ... stoire.htm
http://compte-a-rebours-francois-hollande.fr/
Le défaut du capitalisme c'est qu'il répartit inégalement la richesse; la qualité du socialisme c'est qu'il répartit la misère équitablement.

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