Qu'en pensez vous ?Seul face à une opposition divisée, Wade s'est octroyé le droit à un troisième mandat.
Le bruit sec d'une détonation de grenade lacrymogène suivi d'un brouhaha lointain. «Ça commence», grogne Amadou, un petit vendeur ambulant. Devant la place de l'Indépendance, au centre de Dakar, une poignée de manifestants affrontent la police. La scène se renouvelle chaque soir depuis une grosse semaine.
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Une certaine incurie du pouvoir
Ce débat a fini par occulter tous les autres, y compris celui autour du bilan plus que contrasté du chef de l'État. Les douze années de pouvoir ont abîmé l'ancien opposant chantre d'une République idéale. Les scandales et les rumeurs de corruption se sont accumulés. Le plus célèbre reste l'affaire Segura, du nom de l'ancien représentant du FMI à Dakar. Lors de son départ, l'entourage de Wade a «offert» à ce haut fonctionnaire une valise avec 100.000 euros et 50.000 dollars. «Cette histoire a été mal perçue par les Occidentaux et les intellectuels. Mais le peuple est plus choqué par les grosses voitures ou les problèmes d'électricité», assure le chercheur Gilles Yabi.
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Face à cet équipage un rien hétéroclite, Wade se dit certain d'une victoire dès le premier tour. Refusant de spéculer sur les scores, l'opposition affirme, pour une fois en bloc, que toute réélection immédiate de Wade est impossible. «C'est sans doute le plus gros souci. Même si Wade devait gagner légalement au premier tour, ses adversaires crieraient à la fraude, ce qui placerait le Sénégal dans une situation dangereuse», remarque un analyste occidental.
Méfiance internationale
Consciente des risques, la communauté internationale a décidé de peser pour calmer les esprits et les velléités d'un pouvoir dont elle se méfie désormais. «S'il y a une fraude nous la verrons», prévient Thijs Berman, le chef de la mission d'observation de l'Union européenne. À Paris, Alain Juppé a appelé au «changement de génération». Washington s'est montré encore plus direct en «regrettant» la candidature du président. Pour augmenter un peu plus la pression, Johnnie Carson, sous-secrétaire d'État chargé des Affaires africaines, s'est invité vendredi à Dakar.
Face à ce front, le vieux président ne pourra sans doute pas compter sur ses frères africains. À commencer par l'ex-président Nigérian Olusegun Obasanjo, aujourd'hui chargé de surveiller le vote pour l'Union africaine. «En 2006, Wade m'avait conseillé de ne pas briguer un troisième mandat. Je ne l'ai pas fait. Il doit savoir aujourd'hui ce qu'il a à faire», a-t-il expliqué, dans un demi-sourire, à peine arrivé à Dakar. À deux jours du scrutin, Abdoulaye Wade apparaît plus que jamais seul contre tous. Retrouvez l'intégralité de cet article sur
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