Près du marché au poisson de Joal, sur les côtes du Sénégal, les femmes qui traditionnellement achetaient chinchards, anchois, maquereaux et sardinelles pour les fumer se sont retrouvées au chômage. Ces petits pélagiques, moins nobles que le thon ou la daurade, fondent la base de la cuisine jusque dans l’arrière-pays. Mais voilà que depuis quelques années des fabricants de farine de poissons coréens, russes, chinois se sont installés sur place et raflent tout en offrant quelques centimes de plus par caisse débarquée des pirogues de pêche artisanale.
C’est l’un des effets du boum de l’aquaculture. La population mondiale qui croît est de plus en plus gourmande de protéines animales. Il lui faut de plus en plus de farines et d’huile de poisson. Voilà pourquoi les sardinelles africaines réduites au rôle de fourrage vont nourrir des saumons norvégiens, des truites polonaises, des anguilles chinoises, des crevettes thaïlandaises, mais aussi des carpes a priori herbivores, des volailles, ou encore des visons, des chiens, des chats…
L’ONG Bloom sonne l’alerte sur cette façon de livrer « de la confiture aux cochons », selon sa formule. En effet la pêche minotière, largement pratiquée par les grandes flottilles asiatiques dans les eaux des pays du Sud, contribue à mettre en péril la ressource alimentaire des populations littorales, déjà mise à mal par la surexploitation des grands poissons prédateurs au large.
Mardi 14 février, l’association a rendu publique son analyse du secteur, mettant à plat les ressorts et les conséquences de ce qu’elle appelle « l’envers du décor de l’aquaculture ».
Un quart des poissons réduit en farine
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