Le Chritianisme est-il une branche ou une racine de l'Humani

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GIBET
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Message non lu par GIBET » 14 mars 2011, 15:18:00

Sur un fil qui n'était pas adapté à cela j'avais commencé un échange avec Patjol sur ce sujet.
Le débat à tourné court malgré qu'il me paraissait intéressant d'un point de vue plus philosophique que politique.
Il m'a semblé utile de le relancer ici, cette fois à la bonne place, et de manière argumentée pour offrir à chacun la possibilité de s'exprimer sur ce sujet.
J'aurai pu choisir la notion de face à face mais je trouve qu'une solution plus ouverte permet à tous de participer. C'est pourquoi j'ai privilégié ce fil.

Il est difficile de faire une thèse sur le Christianisme et l’humanisme. Poser la question de leur préséance s’est d’abord s’interroger sur leur contenu car q a quoi sert de savoir qui précède l’autre s’ils appartiennent à des sphères différentes.


Pour faire simple deux lignes résument les principales différences fondamentales:

CHRISTIANISME: péché originel - humilité - esprit de sacrifice - Dieu au centre de l’Univers - Jugement de Dieu
HUMANISME: bonté de l’Homme - aspiration à la connaissance universelle - amour des plaisirs terrestres - Homme au centre de l’Univers - liberté de l’Homme

Sont ainsi posés des fondamentaux d’origine qui sépare distinctement les deux doctrines.

D’ailleurs Patrick Giovannini Président du Parti Républicain Chrétien ne s’y trompe pas quand il affirme : « Il existe dans les faits, un clivage réel et non reconnu, opposant les partisans de l’hédonisme et de l’individualisme aux partisans des valeurs, de la solidarité et de l’intérêt général. Ce clivage met en opposition l’Humanisme, qui place l’homme et son plaisir au dessus de tout, et le Christianisme, qui reconnaît Jésus-Christ comme le seul Chemin, la seule Vérité et la seule Vie. Le PRC s’appuie avec fermeté sur la conviction que c’est le Christianisme et non l’Humanisme qui peut permettre une évolution dans le bon sens de la société. L’Homme doit redevenir libre et maître du système dans lequel il évolue. Seules les valeurs de l’Evangile sont aptes à provoquer un renouveau".

C’est en totale conformité avec les statuts de ce Parti qui prétendent : « "Nous affirmons que l’Evangile est le recueil le plus achevé des droits et des devoirs de l’Homme. Il est donc évident d’en faire la source de toute constitution et de tout ordonnancement juridique et d’en conserver l’esprit pour en obtenir les fruits espérés."

Pour ma part je pense que confondre humanisme et christianisme entretien une confusion de genre qui sert une idéologie chrétienne de la « croyance » plutôt que l’affirmation de l’importance centrale de l’Homme.

L'humanisme est un socle qui pose le principe du positionnement de l'homme au centre de l'Univers.
L'homme existe alors comme une fin en soi. Il n'est déterminé par rien et ne s'inscrit que dans sa volonté d'être et d'en assumer la responsabilité. L'homme tient une place essentielle au sein des espèces, qu'il justifie par une philosophie et une philanthropie non partagés par le règne animal - végétal ou minéral. L'homme à une capacité d'exploration métaphysique et est doté du libre arbitre.

Dans un second temps l'homme se situe par rapport à son environnement. Il peut adopter une posture égoïste, égocentriste, solidaire ou collectiviste. Mais avant de placer son "ego" il doit auparavant placer l'homme dans le bâti de sa société. L'individualisme est alors une démarche collective qui laisse une place de décision à chaque unité composante de la société.
Ainsi l'humanisme ne s'oppose pas à l'individualisme qui n'est qu'un sous produit de la philosophie de l'Homme.
L'homme n'est jamais un concept pour les humanistes, mais une réalité ontologique. Et rien ne tn’empêche de conserver ta liberté d'action individualiste sans nécessité d’appartenir à une communion..

En parallèle l'apprentissage de la religion dans notre pays s'est fait sur deux bases:

* la famille
* le catéchisme

Il serait trop facile d'incriminer l'éclatement du noyau familial pour justifier cette perte d'une éducation religieuse, même si sans doute il ne serait pas totalement faux de le dire. Mais je crois plutôt à la nature même de l'enseignement plutôt qu'à son impossibilité familiale. L'école s'est investie sur un enseignement de la raison qui a favorisé les cultures scientifiques. L'école assène des vérités et les prouve par les mathématiques, la physique, la chimie et les sciences naturelles de l'évolution.

Ce qui n'est pas certain, comme l'histoire, la géographie est relégué au deuxième plan. Toute la vie scolaire puis universitaire va être fondée sur ce schéma d'appropriation. Le scolaire et l'étudiant apprennent à douter, à prouver, à ne pas accepter ce qui n'est pas démontré par un processus scientifique.

Comment dans un tel contexte la mère de famille, car c'était plutôt son rôle, peut-elle tenir avec des vérités révélées par l’église et non discutables puisque dogmatiques, des mystères, des contraintes morales et des exigences restrictives de liberté?

On retrouve la même difficulté sur les bancs du catéchisme quand après avoir obligé les enfants à se poser des questions, après les avoir analysées à l'école, on va répondre à leurs questions religieuses précises par la déformation des textes sacrés. Postuler que les enfants sont les équivalents d'un peuple analphabète incapable de comprendre les symboles et obligé à lire des vérités exprimées dans la pierre ou dans les vitraux ou les peintures murales des églises et des catéchismes, ne pouvait tenir longtemps face à des enfants ouverts au modernisme et au progrès par l'école. Ainsi expliquer à des filles lettrées et à des garçons sourcilleux du détail que Eve à fait manger la pomme à Adam et que cet acte insignifiant les a condamnés à la damnation éternelle et à la souffrance dès que chassés du paradis par un Dieu colérique et irascible, ne prépare positivement à écouter la suite.

Le catéchisme de mon enfance n'était même pas un conte mais plutôt un cauchemar de violence ou un père divin laissait mourir sur la croix son fils pour le plus grand bienfait des hommes ... Cette caricature réellement enseignée aux enfants que nous étions et qui posions des questions insensées pour ces dames catéchèses, s'acheva dans le silence de celles qui ne savaient plus quoi répondre.

Peut-on voir dans cet histoire de notre évolution réligieuse la moindre empreinte de l’humanisme ?

Et pourtant les questions de l'esprit doivent être traitées par l'esprit. Quelques explications seulement de faits rétablis dans leur environnement et expliqués conformément aux textes sacrés répondent aux questions et ne s'exposent qu'à incompréhension mais pas à un jugement de mensonge.
C'est donc toute l'éducation religieuse de base qui a été manquée pendant des générations ou l'école aurait dû offrir à l'église l'opportunité d'aborder sérieusement les choses sacrées et non comme s'adressant à des ignorants.

C'est peut-être comme cela que l'incompréhension religieuse des familles a entamé progressivement la foi elle même et bien sûr le sacerdoce.

Je ne cherche pas à justifier mais à expliquer. La laïcité n'a pas interdit les explications religieuses de la sphère privée, mais l'église perdant son rang semble avoir abandonné ces sphères en ne se mettant pas à leur portée pour y faire l'apprentissage de la spiritualité et non du catéchisme.

Pour ma part je ne sais pas dire si le sacré à besoin de faste et de liturgie. Mais elle a besoin d'être savamment présentée, discutée car si la foi est croyance les enseignements de l'Eglise passent par un apprentissage clair , précis des faits et des environnements de la Bible , de la Torah, du Coran ou des Evangiles.

L'église n'aurait pas eu besoin de tant se mettre à la portée du fidèle si elle n'avait pas préféré son rôle de précepteur de la conscience morale de la société à celui de privilégier l'explication de l’Homme et de l’humanisme auquel elle prétend depuis Vatican2.

Dans son livre « Le christianisme est un humanisme » Henrik Lindell explique son titre : « C’est un titre un peu provocateur. Le Christ n’est pas un philosophe au sens où on l’entend dans la tradition universitaire. La philosophie fait référence à la raison et non à la foi. Mais dans le message du Christ, il y a aussi un message rationnel. Bien entendu, Jésus fait constamment référence à Dieu et se présente comme l’envoyé de Dieu. Mais les grands principes évangéliques sont si fondés en raison et universels qu’ils vont jouer un rôle déterminant dans l’histoire de l’Occident. Érasme, le grand penseur de la Renaissance, disait qu’il faudrait enlever tout le fatras théologique qui alourdit le message du Christ pour retenir la substantifique moelle des grands principes évangéliques qu’il appelait « la philosophie du Christ ». Les Évangiles sont ainsi devenus l’une des principales sources de l’humanisme moderne. »

« Il faudrait enlever tout le fatras théologique… » c’est à mes yeux effectivement toute la différence entre « une religion » et une « philosophie » et donc toute la différence entre le christianisme et l’humanisme .

GIBET
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Cobalt

Message non lu par Cobalt » 14 mars 2011, 18:57:00

Je me languis de voir ce débat s'animer car il y a pas mal de chos à dire la dessus,c'est vrai qu'à courrir derrière le futile on oublit pa fois l'e ;) ssentiel

lambertini
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Message non lu par lambertini » 15 mars 2011, 09:11:00

ce qui est futile pour un peut etre essentiel pour l autre.
on peut dire que les religion, ont bien foutues la me..., a travers les siecles
la caravane passe et les chiens aboient

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racaille
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Message non lu par racaille » 15 mars 2011, 21:00:00

Personnellement je ne suis pas certain qu'on puisse opposer aussi frontalement humanisme et christianisme, tout du moins dans le contexte contemporain. Cela a peut-être été vrai lorsque la soif de connaissance ne pouvait plus se satisfaire des imbécilités de la doctrine chrétienne hard-core, de la Renaissance jusqu'à l'avènement du rationalisme. J'ai tendance à voir plus facilement les éléments qui rapprochent le christianisme et l'humanisme que les ceux qui les séparent.

Tous deux sont fondés sur l'idée de transcendance, l'humanisme se contentant de prendre à Dieu pour donner à l'Humanité. C'est précisément ce que Stirner et Marx ont critiqué chez leur ami Bruno Bauer.

Et puis ce sont aussi deux courants d'idées qui partagent le goût de l'universalité - découlant directement de cet amour de la transcendance. Cette universalité qui donne d'un côté les droits de l'Homme et qui a même pu justifier la colonisation au XIXème siècle.

Les deux partagent la même obsession du droit. Le droit inaliénable humaniste tel qu'il est retranscrit dans les déclarations des droits de l'Homme et autres pétitions de principes renvoie directement au droit naturel de Thomas d'Aquin.

On peut aussi noter que christianisme comme humanisme en sont restés à des conceptions anciennes du monde, complètement dépassées par ce que nous savons désormais du réel. On pourrait presque dire que christianisme comme humanisme sont restés figés au XVIIIème siècle. Je cite Irène Peirera qui résume bien la philosophie des Lumières :
1) Une ontologie essentialiste : la nature est un ordre immuable et fixe, déterminé, dont il est possible de tirer des principes d’organisation politique. 2) Une anthropologie essentialiste : il existe une nature humaine qui serait fondamentalement bonne 3) L’histoire est orientée selon un principe de progrès qui dérive du progrès des sciences et des techniques 4) Le pouvoir serait une substance qui serait concentré dans l’Etat, le Capital ou l’Eglise.
J'ai tendance à m'inscrire dans une autre manière de voir les choses - très liée à l'anarchisme et à la pensée post-moderne - qui ne verse ni dans le christianisme ni dans l'humanisme. Une fois de plus résumée par I. Pereira :
1) Une ontologie anti-essentialiste : la réalité est un flux, en constant changement, sans ordre et livré au hasard 2) Une anthropologie anti-essentialiste : le « je » est un composé de forces multiples et en constant changement, il est le produit d’un processus 3) Il n’y pas de principe de progrès dans l’histoire, l’histoire des sciences ne fonctionne pas selon un processus cumulatif 4) Le pouvoir est un rapport, il est donc multiple et présent dans tous les rapports entre les êtres.
NB : A noter que la notion moderne d'individualité est assez récente. JM. Guyau, Stirner, Nietzsche, Simondon entre autres. Et ce qui est encore plus récent c'est l'éclatement du sujet selon la citation célèbre de Rimbault "Je est un autre", ou celle de Proudhon "l'homme vivant est un groupe".
Ce qui distingue principalement l'ère nouvelle de l'ère ancienne, c'est que le fouet commence à se croire génial. K M

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GIBET
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Message non lu par GIBET » 16 mars 2011, 12:44:00

Cher Lambertini je ne rentrerai pas dans le débat de l'utilité d'une religion. Ce ne sont pas les religions qui ont tué les hommes, ce sont les intolérances des hommes qui les pratiquent et qui veulent y lire de la haine pour autrui. Je sais qu'en disant cela je vais avoir la citation de sourates mais je reste pour ma part un fervent adepte d'Averroès sur l'islam.

Ami Rascail - Vatican 2 qui a quand même très d visé le monde Chrétien...ce qui démontre que les préceptes n'étaient pas universellement ancrés dans la lecture des évangiles. Vatican 2 ce sont de nombreuse réunions très débattus, un recadrage du pape lui même et quelques colères œcuméniques. Mais il est vrai que l'homme est mieux pris en compte comme participants à sa foi que les préceptes évangéliques qui inscrivaient la parole christique comme vérité et Dieu comme centre de l'union des hommes. Cela n'a pas été remis en cause.

C'est vrai que la colonisation aurait pu être une catéchisation, mais il aurait fallu que la chrétienté pose le principe de l'universalité de l'Être humain dans son ontologie. Il fallut un procès mémorable à Valadolid pour que soit reconnu l'existence d'une âme chez les indiens ...ce qui justifiait qu'on les pille. Mais je dois à la vérité de dire que ce fut un religieux qui défendit l'Homme contre le philosophe qui démontrait la différenciation ontologique. Donc la philosophie n'est pas forcément une universalité de valeurs et le christianisme a pu être plus humaniste que le philosophe. Il n'en reste pas moins que l'église elle m^me s'est fourvboyée car en 835 au 2è concile de Macon et à l'instigation d'un évêque, fut posé la question de savoir si on pouvait utiliser le terme de "homo" pour identifier ua femme pour laquelle on utilisait plutôt Mulier. "mulierem non posse dici hominen" N'était-ce que grammatical ou bien l'homo terrenus de la genèse excluait-il la femme? On voit bien que l'église aussi a des tendances  hylémorphistes et Jean Paul II s'inscrit totalement dans ces différenciations d'espèces quand il dit "l'âme elle même ne peut être qualifiée de féminine ou appartenant au genre féminin, mais plutôt l'âme d'une femme qui est un être humain féminin" Ainsi on revenait philosophiquement sur l'universalité de l'Être pour lui substituer une doctrine non humaniste et différencialiste. Ne sommes-nous pas dans la ligne de 1595 qui lança clairement la "disputatio perjucunda qua anonymus probare nititur milereshomines non esse" (Discussion nouvelle contre les femmes où il est démontré qu'elles ne sont pas des êtres humains)?
Tu cites la philosophie essentialiste qui juge l'homme en fonction de son essence et qui peut en tirer des différenciations "naturelles" là où l'Être est et n'est pas selon Héraclite (mais je ne vais pas entrer dans cette thèse philosophique complexe du moi et du soi qui a elle seule mériterait un développement que je ferais seulement s'il vous intéresse).
L'essentialisme qui n'est pas humanisme est déterministe (donc plus christianiste) et refuse à l'homme son libre arbitre
Pour ma part il me semble que l'humanisme est plus existentialiste, non déterministe, et qui fait de l'homme le seul décideur de son existence non influencée par l'immanence.
L'anarchisme libertaire est très existentialiste et très humaniste. car l'homme y prend toutes la plénitude de son libre arbitre et d'un sens de responsabilité collective qui n'impose plus aucune hiérarchie que l'intérêt général et l'individualisme de satisfaction personnelle à chacun selon ses besoins.
Il démontre justement la limite de séparation entre humanisme et christianisme ce dernier étant fédérateur des relations morales et sociales de l'homme qui se structure autour d'une croyance qui relie (re ligerer - réunir), plutôt qu'autour de l'Homme comme le préconise l'anarchie.
GIBET
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racaille
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Message non lu par racaille » 16 mars 2011, 16:34:00

Effectivement l'humanisme chrétien a été long à venir comme tu le démontres avec ces quelques exemples tirés de l'histoire du catholicisme. Ce qui ne contredit pas la revendication universaliste du droit divin, revendication partagée par l'humanisme lorsqu'il s'agit d'imposer un droit naturel, axiomatique, à la totalité des individus sur Terre.
C'était surtout là où je voulais en venir avec mes comparaisons entre chrétienté et humanisme : ces deux conceptions se retrouvent au moins sur ce thème de l'universalité comme sur celui de la transcendance (même si celle de l'humanisme avance masquée).

NB : J'en rajoute une couche puisque j'ai oublié d'en parler hier soir. Un autre point commun de la chrétienté et de l'humanisme consiste à tenir pour acquis une différence de nature entre l'homme et le règne animal. L'une par l'action de la grâce divine et l'autre par la capacité de l'homme à l'abstraction considérée comme unique et absolu.

***

Je sais que c'est hors-sujet et je m'excuse d'avoir parlé d'anarchisme ici hier soir. Cependant j'ai jugé nécessaire de signaler qu'il existe d'autres voies possibles que la foi - qu'elle soit en Dieu ou en l'Humanité.

Je ne suis pas d'accord avec toi lorsque tu dis que l'anarchisme est humaniste. Il l'a peut-être été, naïvement, lors de son émergence chez certains auteurs n'ayant pas encore digéré Guyau, Stirner et Nietzsche (et encore, à condition de clarifier leur usage du vocabulaire, souvent à double sens lorsqu'il s'agit d'employer des termes génériques tels que liberté, humanité, société, responsabilité, etc). Proudhon, dans son éloge de la Justice (chez lui écrit avec la majuscule), démontre son humanisme de manière flagrante. Déjacque dans son Humanisphère, élève l'humanité au-dessus de la société civilisée pour lui rendre sa liberté. Il faut y lire une influence encore considérable de la philosophie des Lumières même si on commence déjà à noter un dépassement de ces valeurs.

L'anarchisme contemporain - qualifié parfois de post-anarchisme - ne se reconnait pas dans cette perspective, il ne parle pas de liberté mais plus volontiers de puissance individuelle. Il y a ce que nous pouvons faire et ce que nous ne pouvons pas faire. Rien d'autre. Suivant cette idée, ce que nous désirons est directement conditionné par notre capacité individuelle à l'action en un temps donné. Il est ancré dans la tradition spinozienne qui aurait tendance à définir la liberté comme un trompe-l'oeil résultant de notre incapacité à prendre conscience de nos déterminismes.

il ne se reconnait pas non plus dans la notion de droit naturel - même immanent à notre nature humaine - puisque selon lui nous "portons tous notre propre droit en nous" (Piotr Archinov).

De manière générale le vocabulaire de l'anarchisme contemporain diffère largement de celui de l'humanisme. La dignité, pour ne prendre qu'un seul exemple, très ça la mode aussi bien en France avec le dernier bouquin de S. Hessel que chez les révolutionnaires tunisiens, n'est pas une préoccupation anarchiste puisqu'elle suppose nécessairement la notion de droit naturel. La dignité est toute libérale et en aucun cas libertaire ;)

L'anarchisme est aussi un individualisme forcené et il ne reconnait aucune valeur à la transcendance, qu'elle soit incarnée par Dieu ou par une Humanité (avec la majuscule) qui flotterait au-dessus de nos têtes et à laquelle l'individu puissant et désirant devrait soumettre son action. La défiance de l'individu envers la société - incarnation de l'Humanité dans le réel - est un fil rouge qui traverse l'anarchisme de part en part. Même les auteurs les plus communisants de l'anarchisme restent d'indécrottables individualistes ; ils n'entendent proposer l'organisation de la société qu'en partant de la puissance individuelle des êtres et en cherchant à lui permettre sa pleine expression.

Reste la question de la foi, puisque chrétienté comme humanisme la nécessitent. On trouvera évidemment beaucoup d'anars pour avoir la foi (dans l'humanité, dans la révolution, dans le progrès...) mais selon moi ils ne sont pas représentatif de la puissance de ce courant d'idée, comme s'ils avaient peur de s'approprier toute l'amoralité contenue dans cette conception du monde.
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Message non lu par GIBET » 17 mars 2011, 12:59:00

Excuses-moi ami Racaille je ne t'oublie pas mais je pars quelques jours (8 jours) avec mes enfants et petits enfants et je travaille la réponse sur le plan de la philosophie anarchiste qui m'interpelle sur l'individualisme tel que tu le proposes et je veux y réfléchir avant de répondre, car la philosophie libertaire me touche.

En effet nous sommes partis de la question de savoir si le christianisme est une branche ou une racine de l'humanisme et je me proposai dans notre échange d'affirmer que ce n'est pas une racine et que j'ai du mal à considérer que c'en est une branche.
Mais là tu m'amènes à un thème ou tu excelles et ou je suis très certainement moins bien informé que toi.
D' un mot sur l'universalité et la transcendance. Dire que  l'humanisme recherche l'universalité c'est tout à fait exact mais au titre de l'essence ontologique de l'Homme. C'est parce qu'il est homme que par essence il est  ... et non par la légitimation d'une puissance immanente. Le fait de le placer au centre de l'univers n'en fait pas un Dieu mais un homme libre. A ce titre l'humaniste recherche ce qui dirige l'homme ce qui le motive car il n'existe aucune autre axiomatique que la raison. La raison est-elle pour autant universelle et suffisante?
Je donnerai mon opinion dès mon retour en parlant de l'anarchie
Amicalement
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Message non lu par racaille » 19 mars 2011, 19:10:00

Oui désolé pour la digression sur l'anarchisme, j'aurais du m'abstenir afin de rester dans la thématique chrétienté-humanisme.

Pour revenir au sujet, ta question est intéressante et nécessite peut-être de faire une sorte de généalogie pour savoir si le christianisme pré-existait à l'humanisme ou si c'est le contraire. Par exemple, peut-on considérer la philosophie eudémoniste grecque - particulièrement centrée sur la question de l'ataraxie - comme une sorte d'humanisme ? On peut aussi se demander si l'humanisme est une spécificité occidentale où si l'on peut en trouver des traces ailleurs (comme en chine par exemple, avec Lao Tseu). Je ne suis pas assez calé pour répondre à ces questions simples ni même pour savoir si elle sont vraiment pertinentes.

Mon point de vue est naïf et tient l'humanisme occidental comme une évolution du christianisme, une évolution abstraite et dégagée de la mystique religieuse. Néanmoins, comme je l'ai écrit plus haut, j'y vois une filiation évidente dans la conception du monde (d'où ma citation sur l'essentialisme ontologique). Au final ce que je peux reprocher à l'humanisme n'est pas son intention mais sa conception de l'être et de la manière dont il évolue dans le temps et l'espace. Ce qui m'a amené à sortir un peu du thème du topic en parlant du post-anarchisme, par contraste. L'humanisme part de l'abstraction d'un droit naturel à vocation universelle là où l'anarchisme part des situations concrètes dans une optique presque casuistique. en guise d'exemple, je repense à l'abécédaire de G. Deleuze à "G comme gauche" où il traite un peu des droits de l'homme. Extrait :
Claire Parnet : Et ce respect des Droits de l'Homme qui est tellement à la mode aujourd'hui, c'est pas le devenir révolutionnaire, ça?

Gilles Deleuze : Tout le respect des droits de l'homme, c'est... vraiment, on a envie presque de tenir des propositions odieuses. Ça fait tellement partie de cette pensée molle de la période pauvre dont on parlait. C'est du pur abstrait. Les droits de l'homme, mais qu'est-ce que c'est? C'est du pur abstrait. C'est vide. C'est exactement ce qu'on disait tout à l'heure pour le désir, ou ce que j'essayais de dire pour le désir. Le désir, ça ne consiste pas à ériger un objet, à dire: je désire ceci. On ne désire pas, par exemple, la liberté et cetera. C'est zéro. On se trouve dans des situations.

Je prends l'exemple de l'Arménie. Qu'est-ce que c'est, la situation? Si j'ai bien compris... on me corrigera, mais si on me corrige, ça ne change pas grand chose. Il y a cette enclave dans une autre république soviétique, il y a cette enclave arménienne. Il y a une république arménienne et il y a une enclave. Bon, ça, c'est une situation. La première chose. Il y a ce massacre, là, que des Turcs, des semblants... des espèces de Turcs, je ne sais pas, pour autant qu'on sache actuellement, je suppose que ce soit ça, massacrent des Arméniens une fois de plus, dans leur enclave. Les Arméniens se réfugient dans leur république, je suppose - tu corriges toutes mes erreurs -, et là : il y a un tremblement de terre. On se croyait dans le Marquis de Sade ! Des pauvres hommes ont traversé les pires épreuves vécues des hommes, et à peine ils arrivent là, à l'abri : c'est la nature qui s'y met.

On dit: les droits de l'homme. Mais enfin : c'est des discours pour intellectuels, et pour intellectuels odieux, et pour intellectuels qui n'ont pas d'idées. D'abord, je remarque que toujours ces déclarations des droits de l'homme, elles ne sont jamais faites en fonction, avec les gens que ça intéresse. Les sociétés d'Arméniens, les communautés d'Arméniens et cetera, leur problème, c'est pas les droits de l'homme !

C'est quoi? Voilà un Agencement. Comme je disais, le désir, c'est toujours à travers des agencements. Voilà un agencement. Qu'est-ce qui est possible pour supprimer cette enclave ou pour faire que cette enclave soit vivable? Qu'est-ce que c'est, cette enclave là-dedans? Ça, c'est une question de territoire. Ce n'est pas une question de droits de l'homme, c'est de l'organisation de territoires! Qu'est-ce qu'ils vont supposer que Gorbatchev va tirer de cette situation, comment il va faire pour qu'il n'y ai pas cet enclave arménienne livrée là aux Turcs menaçants autour? Ce n'est pas une question de droits de l'homme. Ce n'est pas une question de justice. C'est une question de jurisprudence. Toutes les abominations que subit l'homme sont des Cas. C'est pas des démentis à des droits abstraits. C'est des cas abominables. On dira que ces cas peuvent se ressembler, mais c'est des situations de jurisprudence.

Le problème arménien là, c'est typiquement ce qu'on appellera un problème de jurisprudence. C'est extraordinairement complexe. Que faire pour sauver les Arméniens, et que les Arméniens se sauvent eux-mêmes de cette situation de fous dans laquelle ils sont? Et en plus, ce tremblement de terre s'y met. Un tremblement de terre qui a aussi ces raisons, des constructions qui n'étaient pas bien, qui n'étaient pas faites comme il fallait. Tout ça, c'est des cas de jurisprudence. Agir pour la liberté, devenir révolutionnaire, c'est opérer dans la jurisprudence. Quand on s'adresse à la justice, la Justice ça n'existe pas, les Droits de l'Homme ça n'existe pas. Ce qui compte c'est la jurisprudence. C'est ça l'invention du droit. Alors, ceux qui se contentent de rappeler les droits de l'homme et de réciter les droits de l'homme, c'est des débiles. Il ne s'agit pas de faire appliquer des droits de l'homme. Il s'agit d'inventer des jurisprudences où, pour chaque cas, ceci ne sera plus possible. C'est très différent.

Je prends un exemple que j'aime beaucoup, parce que c'est le seul moyen de faire comprendre ce que c'est que la jurisprudence. Les gens n'y comprennent rien, enfin, pas tous. Les gens ne comprennent pas très bien. Je me rappelle, moi, le temps où il a été interdit de fumer dans les taxis. Avant, on fumait dans les taxis. Il y avait un temps où on n'avait plus le droit de fumer dans un taxi. Les premiers chauffeurs de taxi qui ont interdit de fumer dans les taxis, ça a fait du bruit, parce qu'il y avait des fumeurs. Et il y avait un, c'était un avocat.

J'ai toujours été passionné par la jurisprudence, par le droit. Si je n'aurais pas fait de philosophie, j'aurais fait du droit, mais justement, pas du droit de l'homme, j'aurais fait de la jurisprudence. Parce que c'est la vie. Il n'y a pas de droits de l'homme, il y a la vie, il y a des droits de la vie. Seulement la vie c'est cas par cas.

Donc, les taxis. Il y a un type qui ne veut pas être interdit de fumer dans un taxi. Il fait un procès au taxi. Je me souviens très bien, parce que là, je m'étais occupé d'avoir les attendus du jugement. Le taxi était condamné. Aujourd'hui, pas de question. Il y aurait le même procès, il ne serait pas condamné le taxi, ce serait le usager qui serait condamné. Mais au début, le taxi a été condamné. Sous quels attendus? Que, lorsque quelqu'un prenait un taxi, il était locataire. Donc, l'utilisateur de taxi a été assimilé à un locataire. Le locataire a le droit de fumer chez lui. Il a le droit d'usage et d'appui. C'est comme s'il faisait de location. C'est comme si ma propriétaire me disait: non, tu ne va pas fumer chez toi. Si, si je suis locataire, je peux fumer chez moi. Donc le taxi a été assimilé à un appartement roulant dont l'usager était le locataire.

Dix ans après, ça s'est absolument universalisé, il n'y a pratiquement plus de taxi où on peut fumer. Au nom de quoi ? Le taxi n'est plus assimilé à une location d'appartement, il est assimilé à un service publique. Dans un service publique, on a le droit d'interdire de fumer. Tout ça est jurisprudence. Il n'est pas question de droit de ceci ou de cela. Il est question de situation, et de situation qui évolue. Et lutter pour la liberté, c'est réellement faire de la jurisprudence.

Alors là, l'exemple de l'Arménie me parait typique. Le droits de l'homme, ça veut dire quoi? Ça veut dire: ah, les Turcs, il n'ont pas le droit de massacrer les Arméniens. D'accord, les Turcs n'ont pas le droit de massacrer les Arméniens. Et après? C'est vraiment des débiles. Ou pire, je crois que c'est tellement des hypocrites, là, toute cette pensée des droits de l'homme. C'est zéro, philosophiquement c'est zéro. Et la création du droit, ce n'est pas les déclarations des droits de l'homme. La création, en droit, c'est la jurisprudence. Il n'y a que ça qui existe. Donc: lutter pour la jurisprudence. C'est ça, être de gauche. C'est créer le droit.
Bon je dois partir dans quelques minutes, je reviendrais d'ici peu. Bonne semaine Gibet !
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GIBET
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Message non lu par GIBET » 30 mars 2011, 21:30:00

Allez juste un peu d'histoire sur les pères de l'humanisme né bien avant Jésus Christ et pas si aveugles que cela sur les problèmes du monde .
L'humanisme est Stoïciens et les Stoïciens précèdent de 2 siècles le Christianisme, ce qui devrait régler la question du premier arrivé
Juste un  petit rappel du Stoïcisme emprunté sur le net et qui me paraît être une bonne synthèse:


L’école stoïcienne
Après la défaite de la Grèce suite aux guerres du Péloponnèse et la mort d ‘Alexandre, la cité grecque retrouve une certaine autonomie politique ; De nombreuses écoles philosophiques fleurissent sans que l’on ne puisse savoir le degré de leur influence :
l’Ecole Platonicienne à l’Académie avec Speusippe, Xénocrate puis Polémon qui soutient que « nul n’est méchant volontairement » ;
l’école aristotélicienne au Lycée avec Théophraste qui affirme au contraire que c’est l’activité qui détermine notre caractère et donc qu’inversement nul ne peut devenir juste involontairement ;
l’école cynique crée par Antisthène et Diogène de Sinope qui enseigne l’autarcie, l’autosuffisance dans un climat provocateurs et impudiques ;
l’école Cyrénaïque avec Aristippe de Cyrène avec une philosophie hédoniste, une morale du plaisir ;
l’école mégarique [/b]avec Euclide de Mégare qui à l’aide des sophismes réfutent tous les systèmes ; l’école sceptique avec Pyrrhon qui professe l’indifférence de toute chose en raison de la régression à l’infini ( un énoncé ne peut être vérifié que par un énoncé antérieur ) et la nécessité de postulats invérifiables ;
l’école épicurienne ou école du jardin qui prône une doctrine du plaisir : On est heureux si on satisfait ses plaisirs naturels et nécessaires ( manger , boire, dormir..) ; le plaisir est le commencement et la fin de la fin de la vie heureuse ; l’idéal en fait est l’ataraxie ( absence de tension de l’âme, une paix intérieure), c’est à dire un état de tranquillité de l’âme sans souffrance et sans passion d’où l’idée qu’il faut à la fois modérer ses souffrances et ses plaisirs non nécessaires; par ailleurs il faut s’affranchir de la crainte de la mort, qui n’est rien pour nous ; avant la mort, nous ne la craignons pas puisque nous ne la vivons pas et après la mort nous n’avons plus de sensibilité et donc nous ne pouvons souffrir ;

Le stoïcisme est une école fondée par ZENON de Citium, élève du cynique CRATES et de l’académicien POLEMON . Stoïcisme vient du mot grec STOA qui signifie portique ; Zénon enseignait sous un portique « poikilé » recouvert de peintures, les colonnes avaient été peintes pour purifier le lieu où 1400 citoyens avaient été massacrés dans la tyrannie de Trente. Les 2 aspects les plus populaires sont : l’impassibilité du sage et sa soumission au destin. La liberté stoïcienne oppose les éléments qui dépendent de nous comme nos jugements, nos tendances et nos désirs et sur lesquels nous pouvons avoir une maîtrise et les éléments qui ne dépendent pas de nous et dont il faut prendre de la distance : la santé du corps, la richesse et le pouvoir. On distingue traditionnellement 3 grandes époques dans la pensée stoïcienne:
- le stoïcisme ancien qui s’est développé au deuxième et premier siècle avant JC ; les 3 grands représentants sont : ZENON de Cittium ; Cléanthe d’Assos son successeur et Chrysippe de Soles
- le moyen stoïcisme au II° siècle avant JC : la conquête romaine entraîne la quasi disparition de l’école d’Athènes ; Panétius de Rhodes introduisit le stoïcisme à Rome en particuliers chez certains Aristocrates « cercle de Scipion » ; il en atténue la dureté d’origine ; Posidonius d’Apamée établi à Rhodes, admiré par Pompée et Ciceron essaya de rapprocher le stoïcisme du platonisme.
- Le stoïcisme de l’époque impériale au I° et II° siècle avant JC ; la logique et le physique sont quasiment délaissés au profit de la morale ; Les principaux représentants sont : SENEQUE, précepteur de l’empereur Néron, Musonius RUFUS, chevalier romain exilé par Néron, maître d’Epictète, esclave affranchi ; il ouvrit une école stoïcienne à Nicopolis ; son disciple Arrien consigna ses leçons dans le livre : Entretiens et dans le Manuel ; Marc aurèle ( 121-180 ) créa à Athènes des chaires impériales de philosophie ; il laissa une sorte de journal philosophique personnel : les pensées
Le stoïcisme est ensuite de moins en moins diffusé au profit du platonisme, Aristotélisme. Les écrits des Stoïciens grecs de l’époque Hellénique ont été perdus ; il ne reste que quelques fragments parfois des citations ou des résumés repris par des auteurs non stoïciens ( Ciceron, Diogène Laërce) ; Hymne à Zeus poème de Cléanthe, vie et Doctrines des philosophes illustres de Diogène. [/font]Les écrits de la période impériale sont plus nombreux comme les « questions naturelles », la vie heureuse, lettres à Lucilus de SENEQUE ; le manuel de théologie grecque de Cornutus, Les pensées de Marc Aurèle.

La pensée stoïciennes Les stoiciens proposent un naturalisme : l’homme doit vivre en accord avec la nature en admettant l’ordre des évènements exprimant la volonté de Dieu. La philosophie est comparée à une bête avec son squelette et ses nerfs constituant la LOGIQUE
( l’art du bien penser ) ; la chair est la physique ( l’art du bien donner ) ; l’âme est l’Ethique ( l’art du bien vivre ). On l’a aussi comparé à un œuf avec sa coquille la logique ; le blanc : la physique ;le jaune l’éthique ; ou enfin à un champ fertile avec la clôture : la logique ; le fruit la morale ; la terre ou les arbres la physique
Dans tous les cas, c’est la connaissance de la nature qui doit fonder la sagesse d’où le rôle de la physique dans l’approche philosophique.

La Logique: La logique stoïcienne s’oppose à la logique aristotélicienne ; en effet la proposition stoïcienne, contrairement qui attribue un prédicat à un sujet au moyen du verbe être ( Socrate est mortel ), repose sur des implications de relation temporelle ; c’est la théorie des « syllogisme hypothétiques » exposés par Chrysippe comme base rigoureuse de la causalité ; 5 formes sont mises en évidence :
1- Si A existe , B existe ; or A existe donc B existe aussi : s’il fait jour, il fait clair, or il fait jour donc il fait clair
2- Si A existe, B existe aussi, or B n’existe pas donc B n’existe pas non plus : s’il fait jour il fait clair or il fait nuit, donc il ne fait pas jour
3- A et B ne peuvent exister ensemble ; or A existe donc B n’existe pas ; il n’est pas vrai que Socrate soit vivant et mort ; or Socrate est mort donc Socrate n’est pas vivant
4- Soit A soit B existe ; or A existe donc B n’existe pas ; soit il fait jour soit il fait nuitor il fait jour donc il ne fait pas nuit
5- Soit A soit B existe or B n’existe pas donc A existe ; soit il fait jour soit il fait nuit oril ne fait pas jour, donc il fait nuit ;
Cette Logique rigoureuse permet d’affirmer que tout événement a une cause d’où la cosmologie du DESTIN comme loi de l’ordre des choses ; les stoïciens ne sont pas fatalistes , ils ne pensent pas que tout est défini à l’avance ni nécessitaristes ( tout doit nécessairement se passer ) mais tout événement à une cause ; l’ordre du monde est animé par le fait de l’activité d’un architecte divin ; cependant il est en notre pouvoir d’accepter ou refuser les choses intérieures en usant de sa raison.
Le Stoïcisme propose une logique du langage ; derrière chaque mot , il est possible de retrouver une origine étymologique ; le langage fait appel à 3 éléments :
- le signifiant qui est une image sonore formulée par la voix
- l’objet réel : qui appartient au domaine de la physique
- le signifiant : produit d’une activité intellectuelle

LA THEORIE DE LA CONNAISSANCE
Les stoïciens ont développé un SYSTEME ; la raison devient « un système de représentations » . Tout objet provoque sur notre organe des sens une affection, une impression qui déclenche une impression dans l’âme appelée REPRESENTATION. La connaissance part de la représentation ; selon Cléanthe, on pourrait la comparer à l’empreinte d’une bague dans la cire . Mais cette représentation n’est pas totalement objective ; le sujet la perçoit avec ses dispositions propres ; il en découle un jugement sur les choses qui sera ou non donné
avec l’assentiment de l’âme. On aura alors
- une compréhension ou catalepsis perception de l’objet immédiate en tant que certitude « le savoir est une compréhension inébranlable et qui n’est destructible par aucun principe rationnel
- une non compréhension

Pour les stoïciens, il n’existe pas d’objet neutre qui ne déclenche ni une impression vraie ni une impression fausse ; une réalité est vraie ou fausse ; » il n’existe pas deux grains de sable identiques dans tout l’univers » ( Plutarque dixit Zénon ). En cas d’erreur, il s’agit d’un assentiment erroné à une représentation non compréhensive ; le sage ne peut donner son assentiment à une représentation non compréhensive Certaines représentations peuvent se présenter naturellement à l’âme : ce sont des PRENOTIONS ou PROLEPSIS ou anticipations ; ces prénotions ont une valeur de raison chez les jeunes enfants ; ce sont des représentations auxquelles l’âme consent instinctivement. il y a entre représentation et assentiment, une harmonie nécessaire » ; la science est l’élément qui permettra à l’homme son adhésion ; cette participation émane du LOGOS ou raison et permet une mise en résonance avec la nature « la raison n’est pas autre chose qu’une part prolongé dans le corps des hommes »


Les idées stoïciennes se retrouvent chez Montaigne ( les essais ) ; le consentement à l’ordre cosmique, à la nature dirigée par la Providence ; la nécessité d’une liberté intérieure qui libère l’homme des aléas de la fortune . Pascal fait la synthèse ente Epictète et Montaigne ; il montre le caractère ambigu de l’homme faible en tant que pêcheur mais très grand en tant que créature de Dieu ; l’homme est à mi chemin entre le suprême savant qu’est le sage stoïcien et le suprême ignorant du sage sceptique.
La théorie des compossibles de la philosophie de Leibniz est d’inspiration stoïcienne théorie selon laquelle certains évènements sont inexorablement liés )

Le naturalisme du stoïcisme est repris par Spinoza ; La puissance de la nature n’est pas autre chose que la puissance de Dieu ; pour les stoïciens il faut accepter l’univers ; à défaut d’avoir ce que l’on veut il faut vouloir ce que l’on a ; Spinoza reprend cette idée en affirmant que tout ce qui arrive était nécessaire ; il met en résonance notre intelligence et la nécessité inévitable ; nous sommes soumis à « une servitude originelle » qui nous fait perdre notre liberté ; la liberté étant la faculté d’être la seule cause de ses actes or il existe de nombreuses causes extérieures qui régissent mon comportement, donc la liberté est une illusion ; Le seul moyen de recouvrer une impression de liberté est d’accepter la nécessité.
On retrouve l’influence du stoïcisme sur Baudelaire à travers le dandysme « on voit que, par certains côtés le dandysme confine au spiritualisme et au stoïcisme » il s’agit d’une transgression de l’éthique stoïcienne transformant le culte de la vertu pour elle-même en un culte de soi-même. Alfred de Vigny s’inspira du stoïcisme dans « la mort du loup »

On retrouve des attitudes stoïques dans la conditions humaine de Malraux ( refus d’une mort par le feu et don du cyanure à autrui ) ou le suicide de Montherlant.
Actuellement , on peut retrouver une influence de la philosophie stoïcienne en médecine dans les mouvements en faveur de l’euthanasie ou la revendication du droit de mourir dans la dignité en cas de phase terminale de la maladie. Dans ces cas de maladies évoluées, les malades ou leur famille réclament une abstention de l’acharnement thérapeutique et un accompagnement médical à cette fin de vie ; Suite aux souffrances de la maladie, on accepte et on invite un destin triomphant."

Il est vrai que l'humanisme tel que nous le connaissons aujourd'hui est plus issu du siècle des Lumières que de la tradition philosophique stoïcienne. C'est pourquoi l'humanisme a été  influencé il est vrai par une culture Chrétienne très forte et par une branche qui a conduit aux Droits de l'Homme.
Il ne faut pas oublier quand même le contexte de l'ancien régime et les Droits de l'homme constituent alors un phare de l'humanisme. Il ne faut pas confondre l'humanisme dans sa philosophie et ce que les hommes en ont fait.  
Il est facile aujourd'hui de décrier les Droits de l'Homme quand au fond on les possède tous , y compris le droit d'instruction et de citoyenneté que l'on a tant galvaudé mais qui faisaient la fierté de nos aïeux qui se battaient pour elle encore hier. Mettre du vide dans les Droits de l'Homme c'est faire affront à des hommes morts il y a mois de 2 siècles pour les posséder .
J'entends aujourd'hui des hommes dirent que l'on parle trop des droits de l'Homme et pas assez de ses devoirs. Mon grand père né en 1883 parlait lui des devoirs que tous lui imposaient, alors il a lutté pour avoir quelques droits.
L'anarchisme a érigé l'homme en individualité qui n'existent pourtant que parce qu'une culture du passé leur a reconnu le droit de vivre, le droit d'être libre , le droit d'être ou de ne pas être inclus dans une communauté, mais aussi des règles qu'il conteste. Au fond ce sont les règles qui ne découlent pas des droits de l'homme mais d'une communauté bourgeoise qui a conduit certains à revendiquer leur libre arbitre sans exigence d'une hiérarchie normative qui dit ce qui doit être fait.  Mais la plupart des droits et des devoirs que les anarchistes veulent bâtir sont nés d'une vision de l'homme père de famille , de l'homme travailleur, de l'homme responsable , de l'homme libre, de l'homme qui assume , de l'homme qui veut le juste, de l'homme qui souhaite la reconnaissance  de son juste besoin , de l'homme qui se veut autonomie , de l'homme qui veut maîtriser l'agir, ...mais donc : de l'HOMME!
Et ce ne serait pas un humanisme?
Non je ne remplace pas "Homme" par le mot "vie" car ce qui fait la vie c'est l'homme!!

Merci pour tes vœux ami Racaille (je suis rentré lundi) et au plaisir de te lire bientôt
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Message non lu par racaille » 31 mars 2011, 00:47:00

Je connais un peu les stoïciens. j'ai lu les lettres à Lucilius et consolation à Helvia de Sénèque, les entretiens d'Epictète et les paradoxes des stoïciens de Cicéron. Et puis ce qu'en dit Diogène Laerce. Mais j'avoue que ça fait un bail et je n'en ai pas gardé un très bon souvenir :D
Il est évident que les premiers intellectuels chrétiens s'en sont inspirés. Il y a certes une grande humanité, mais hélas noyées dans une sauce épaisse de masochisme contrit. J'ai aussi détesté leur idéalisme dualiste avec lequel je suis en opposition totale. J'ai trouvé que leur acceptation de notre impuissance à maîtriser les évènements qui nous sont extérieurs confine au tragique là où elle débouche sur la joie chez Spinoza.

Sur la question des droits de l'homme. Ce que je reproche à cette doctrine c'est d'être un vulgaire voeux pieux, de ceux qui malgré la bonne foi ne peuvent empêcher les guerres, les dictatures, pas même les tremblements de terre.
Le texte que j'ai cité plus haut dit clairement que les droits de l'homme c'est de l'idéalisme béat, complètement déconnecté du réel et de son altérité. Les humanistes persistent à ignorer que chaque situation est un cas particulier, que la résolution des problème sociaux est une science de l'exception et non pas l'art de rédiger des pétitions de principe ;)

Entracte : Je n'aime pas trop les arguments du style "ça c'est du sacré, pas touche, des gens sont morts pour avoir ce droit, etc". Tu as peut-être raté ma dernière signature, citation d'Octave Mirbeau, rappelant que des gens sont morts pour conquérir le droit de voter pour des bourgeois qui vont s'empresser de les tondre. A vrai dire, en regardant rapidement notre l'histoire, nous nous sommes beaucoup battus et entretués pour des tas de conneries. Avec BHL nous déclarons même la guerre par amour de l'Humanité dans une vaste croisade (dixit Guéant) pour la liberté.

L'anarchisme ne partage pas cette obsession du droit canonique. Mis à part Proudhon à un certain degré on ne peut pas dire que ce soit une thématique qui ait beaucoup passionné les théoriciens du mouvement. La position classique c'est que nous portons tous en nous notre propre droit. Le reste se limite à une association libre entre individus dans le meilleur des cas et l'oppression dans le pire. C'est à nous d'aller au bout de ce que nous pouvons pour exister.
Le post-anarchisme, plus proche de la tradition individualiste que de celle de l'anarcho-syndicalisme - développe cette idée en mettant l'accent sur
le concept deleuzien de devenir révolutionnaire et sur une sorte de matérialisme vitaliste hérité de Nietzsche, Stirner, Bakounine & Co, opposant au droit - et à la liberté qui en découle - des concepts tels que le désir et la puissance.

La responsabilité n'est pas une valeur qui fait unanimité dans l'anarchisme. Pas plus qu'elle ne l'est ailleurs, et même dans le christianisme dans l'idée de prédestination. L'anarchiste se sentant proche de Spinoza ne pourra pas invoquer l'idée de libre-arbitre comme un humaniste chrétien (et pourquoi pas libéral) s'empresserait de le faire.

L'anarchisme est-il un humanisme ? Appelons ça comme on veut. Ce qui est certain c'est qu'il reconnait que la part altruiste - incontestable - de l'individu participe d'une stratégie comportementale purement égoïste. Quoi qu'on en pense, l'individu est toujours au centre du monde qu'il perçoit, il est l'exception la plus singulière de sa propre existence :)
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Message non lu par GIBET » 31 mars 2011, 02:38:00

racaille a écrit :Je connais un peu les stoïciens. j'ai lu les lettres à Lucilius et consolation à Helvia de Sénèque, les entretiens d'Epictète et les paradoxes des stoïciens de Cicéron. Et puis ce qu'en dit Diogène Laerce. Mais j'avoue que ça fait un bail et je n'en ai pas gardé un très bon souvenir :D
L'Ecole a réussi la prouesse de rendre indigeste le meilleur et de donner raison à Edouard Herriot quand il prétendait que "La culture c'est ce qui reste quand on a tout oublié!!"

racaille a écrit :Il est évident que les premiers intellectuels chrétiens s'en sont inspirés. Il y a certes une grande humanité, mais hélas noyées dans une sauce épaisse de masochisme contrit. J'ai aussi détesté leur idéalisme dualiste avec lequel je suis en opposition totale. J'ai trouvé que leur acceptation de notre impuissance à maîtriser les évènements qui nous sont extérieurs confine au tragique là où elle débouche sur la joie chez Spinoza.
L'humanisme c'est la place primordiale faite à l'homme et les Stoïciens sont cet égard des précurseurs: "Contrairement aux Epicuriens, qui soutiennent que le monde est composé de particules élémentaires, les atomes, entouré par du vide les Stoïciens pensent que le monde est continu ; le vide n’est qu’à l’extérieur du monde ; il existe une substance volatile appelée Pneuma ou souffle qui parcourt le monde et maintient une interaction mutuelle entre les êtres et les choses appelée SYMPATHIE ; cette interaction traduit la continuité de la nature en un tout unique qui n’est autre que Dieu lui-même ; l’homme est un élément du tout ; on n’est plus citoyen d’un pays mais un citoyen du monde ( vision cosmopolite );
ou encore:
"Par ailleurs, si le destin guide toute occurrence, il n’existe plus de liberté et l’homme ne peut être considéré comme un être moral c’est à dire responsable"
Comment ne pas voir là les bases d'une organisation des hommes fondée sur leur capacité à savoir faire et leur libre arbitre pour assumer qui fondent l'anarchie?

racaille a écrit :Sur la question des droits de l'homme. Ce que je reproche à cette doctrine c'est d'être un vulgaire voeux pieux, de ceux qui malgré la bonne foi ne peuvent empêcher les guerres, les dictatures, pas même les tremblements de terre.
Le texte que j'ai cité plus haut dit clairement que les droits de l'homme c'est de l'idéalisme béat, complètement déconnecté du réel et de son altérité. Les humanistes persistent à ignorer que chaque situation est un cas particulier, que la résolution des problème sociaux est une science de l'exception et non pas l'art de rédiger des pétitions de principe ;)
Mais les droits de l'homme ce ne sont pas des droits pour l'homme ce sont les critères existentiels pour qu'il soit. En 1766, sous le titre "Paradoxe sur les femmes où l'on voit qu'elles ne sont pas de l'espèce humaine", Charles Clapiès, docteur en médecine, se fait en plein siècle des Lumières, le porteur de la ségrégation qui faisait débat depuis l'an 585 (Concile de Macon). 1000 ans de contestation de l'essence homo d'un être humain ce n'est pas rien. Alors il ne faut pas voir dans les Droits de l'Homme des règles destinées à guérir des guerres et des maladies, mais à poser des valeurs existentialistes de l'homme dans une fraternité d'espèce , dans une recherche d'égalité des genres et dans la liberté ontologique. C'est cela l'humanisme et la déclaration des droits de l'Homme. Au 21è siècle (soit 500 ans plus tard) cette affirmation des réalités ontologiques de l'homme ne fait pas l'unanimité sur la planète. Il n'y a donc pas de vœux pieux dans l'humanisme de la déclaration des Droits de l'Homme et ceux qui la lisent comme une déclaration de droits civils ou civiques n'ont rien compris à la dimension philosophique de l'humanisme qui fondait cette déclaration..
racaille a écrit :Entracte : Je n'aime pas trop les arguments du style "ça c'est du sacré, pas touche, des gens sont morts pour avoir ce droit, etc". Tu as peut-être raté ma dernière signature, citation d'Octave Mirbeau, rappelant que des gens sont morts pour conquérir le droit de voter pour des bourgeois qui vont s'empresser de les tondre. A vrai dire, en regardant rapidement notre l'histoire, nous nous sommes beaucoup battus et entretués pour des tas de conneries. Avec BHL nous déclarons même la guerre par amour de l'Humanité dans une vaste croisade (dixit Guéant) pour la liberté.
Là tu ne m'as pas compris. Tout peut-être remis en cause et y compris l'égalité des races, des sexes mais le faire place l'Humanité dans un éclatement des espèces dont je ne prendrai jamais le risque . Quand à mon exemple il évoquai la confusion faite de plus en plus souvent entre Droits de l'Homme et devoirs de l'homme qui me démontre que trop de gens ne savent même pas qu'il a fallu affirmer l'unité de l'espèce humaine tandis que l'hylémorphisme existe toujours
racaille a écrit :L'anarchisme est-il un humanisme ? Appelons ça comme on veut. Ce qui est certain c'est qu'il reconnait que la part altruiste - incontestable - de l'individu participe d'une stratégie comportementale purement égoïste. Quoi qu'on en pense, l'individu est toujours au centre du monde qu'il perçoit, il est l'exception la plus singulière de sa propre existence :)
Si comme je le défend depuis longtemps l'humaniste c'est de placer l'Homme au centre des choses et bâtir pour lui et autour de lui alors l'anarchisme est un humanisme
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Message non lu par racaille » 31 mars 2011, 21:03:00

GIBET a écrit :L'humanisme c'est la place primordiale faite à l'homme et les Stoïciens sont cet égard des précurseurs: "Contrairement aux Epicuriens, qui soutiennent que le monde est composé de particules élémentaires, les atomes, entouré par du vide les Stoïciens pensent que le monde est continu ; le vide n’est qu’à l’extérieur du monde ; il existe une substance volatile appelée Pneuma ou souffle qui parcourt le monde et maintient une interaction mutuelle entre les êtres et les choses appelée SYMPATHIE ; cette interaction traduit la continuité de la nature en un tout unique qui n’est autre que Dieu lui-même ; l’homme est un élément du tout ; on n’est plus citoyen d’un pays mais un citoyen du monde ( vision cosmopolite );
ou encore:
"Par ailleurs, si le destin guide toute occurrence, il n’existe plus de liberté et l’homme ne peut être considéré comme un être moral c’est à dire responsable"
Comment ne pas voir là les bases d'une organisation des hommes fondée sur leur capacité à savoir faire et leur libre arbitre pour assumer qui fondent l'anarchie?
Personnellement je m'inscris plus volontiers dans la tradition matérialiste qui est à mon humble avis bien plus immanente que le stoïcisme.

En ce qui me concerne je ne parle jamais de destin qui est un terme religieux. Le devenir, pas plus que les déterminismes, ne peut être assimilé au destin. Nous nommons Liberté l'illusion consécutive à notre incapacité à percevoir les causes qui nous déterminent. Prendre conscience de la nature de cette illusion ne nous aliène pas, au contraire, c'est cela qui nous libère. Nous pouvons alors prendre connaissance de ce que peut notre corps.

Mais tu fais bien de lier le concept de libre-arbitre à celui de la responsabilité ; c'est précisément l'invocation du libre-arbitre et de la responsabilité qui en découle qui permet à la société de punir l'individu ou de le récompenser en fonction de son comportement et des lois en vigueur. Pour moi ce libre-arbitre n'est pas une réalité, c'est un parti-pris, une convention sociale permettant de gommer les aspérités de la vie en justifiant la neutralisation de ceux qui ne sont pas comme les autres (ici les fous, les déviants/apostats/hétérodoxes, là les meurtriers et les mauvais garçons). Sur ce point l'humanisme et la chrétienté fusionnent.

Comme je le disais précédemment, la notion de responsabilité n'est pas unanime dans l'anarchisme (voir mon dernier message).
GIBET a écrit :Mais les droits de l'homme ce ne sont pas des droits pour l'homme ce sont les critères existentiels pour qu'il soit. En 1766, sous le titre "Paradoxe sur les femmes où l'on voit qu'elles ne sont pas de l'espèce humaine", Charles Clapiès, docteur en médecine, se fait en plein siècle des Lumières, le porteur de la ségrégation qui faisait débat depuis l'an 585 (Concile de Macon). 1000 ans de contestation de l'essence homo d'un être humain ce n'est pas rien. Alors il ne faut pas voir dans les Droits de l'Homme des règles destinées à guérir des guerres et des maladies, mais à poser des valeurs existentialistes de l'homme dans une fraternité d'espèce , dans une recherche d'égalité des genres et dans la liberté ontologique. C'est cela l'humanisme et la déclaration des droits de l'Homme. Au 21è siècle (soit 500 ans plus tard) cette affirmation des réalités ontologiques de l'homme ne fait pas l'unanimité sur la planète. Il n'y a donc pas de vœux pieux dans l'humanisme de la déclaration des Droits de l'Homme et ceux qui la lisent comme une déclaration de droits civils ou civiques n'ont rien compris à la dimension philosophique de l'humanisme qui fondait cette déclaration..
J'ai peut-être mal compris car les droits de l'homme et leurs déclarations nous sont imposés universellement comme un absolu indépassable de sagesse et de foi. Or il ne s'agit, tu le dis toi-même, que d'une ontologie axiomatique ; une tradition mystico-métaphysique vendue pour une "réalité" qui n'engage bizarrement que ceux qui s'en revendiquent. Sur ce point, nous ne sommes vraiment pas loin de la foi religieuse qui prend ses croyances pour des réalités universelles :)

Par contre, ce que tu ne dis pas, c'est que ces propositions ontologiques humanistes débouchent sur des chartes et déclarations d'ordre éthique qui, elles, ont une influence directe sur le comportement des gens, en particuliers de ceux qui récitent sans chercher à comprendre. Il ne va pas, par exemple, nécessairement de soi que notre nature humaine puisse justifier la propriété privée ou l'existence d'une force publique étatique (tel que déclaré dans la DDHC).

Les thèses humanistes et l'éthique qui en résulte devraient être présentées comme une idéologie - quasi politique - inscrite dans le marbre plus que comme une description objective du réel. Cela suffirait amplement à relativiser leur portée et à les rendre plus crédibles.
GIBET a écrit :Quand à mon exemple il évoquai la confusion faite de plus en plus souvent entre Droits de l'Homme et devoirs de l'homme qui me démontre que trop de gens ne savent même pas qu'il a fallu affirmer l'unité de l'espèce humaine tandis que l'hylémorphisme existe toujours
Je ne me soucie pas vraiment du droit alors tu te doutes que la notion de devoir ne me passionne pas des masses :)
Quand on me dit "droit" je ne pense pas par opposition "devoir" mais plutôt "volonté", "puissance" ou "désir".
GIBET a écrit :Si comme je le défend depuis longtemps l'humaniste c'est de placer l'Homme au centre des choses et bâtir pour lui et autour de lui alors l'anarchisme est un humanisme
GIBET
Justement les choses ne sont pas aussi simples. Beaucoup d'anarchistes considèrent que l'humain n'est pas le centre du monde et qu'il convient de le replacer dans son contexte comme tout écologiste le fait désormais quotidiennement. Beaucoup ne considèrent pas que l'humanité est en lutte contre la nature et que sa fonction principale soit de la transformer à sa propre convenance. D'autres ne se soucient pas de l'humanité, pas plus que de la société (puisque la fonction de celle-ci est de broyer l'individu), et ne considèrent que leur existence propre ainsi que leurs multiples associations avec d'autres individus libres. A vrai dire une grande part de l'anarchisme échappe aussi bien au gauchisme qu'aux idées libérales.
L'anarchie est souvent décrite comme l'absence d'organisation politique dans le but d'émanciper l'individu. A priori cela a peu à voir avec l'humanisme :)
Ce qui distingue principalement l'ère nouvelle de l'ère ancienne, c'est que le fouet commence à se croire génial. K M

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Message non lu par GIBET » 01 avr. 2011, 04:54:00

racaille a écrit :Personnellement je m'inscris plus volontiers dans la tradition matérialiste qui est à mon humble avis bien plus immanente que le stoïcisme.

En ce qui me concerne je ne parle jamais de destin qui est un terme religieux. Le devenir, pas plus que les déterminismes, ne peut être assimilé au destin. Nous nommons Liberté l'illusion consécutive à notre incapacité à percevoir les causes qui nous déterminent. Prendre conscience de la nature de cette illusion ne nous aliène pas, au contraire, c'est cela qui nous libère. Nous pouvons alors prendre connaissance de ce que peut notre corps.

Mais tu fais bien de lier le concept de libre-arbitre à celui de la responsabilité ; c'est précisément l'invocation du libre-arbitre et de la responsabilité qui en découle qui permet à la société de punir l'individu ou de le récompenser en fonction de son comportement et des lois en vigueur. Pour moi ce libre-arbitre n'est pas une réalité, c'est un parti-pris, une convention sociale permettant de gommer les aspérités de la vie en justifiant la neutralisation de ceux qui ne sont pas comme les autres (ici les fous, les déviants/apostats/hétérodoxes, là les meurtriers et les mauvais garçons). Sur ce point l'humanisme et la chrétienté fusionnent.

Comme je le disais précédemment, la notion de responsabilité n'est pas unanime dans l'anarchisme (voir mon dernier message).
Je suis d'accord avec toi pour différencier "devenir" de destin. je suis pour ma part un existentialiste et je m'oppose à tous les déterminismes. mais en philosophie le devenir n'est pas chose simple. Hegel propose une dialectique qui introduit une triade. Quelle différence, se demande-t-il, pourrait-il y avoir entre être et non-être si l'être ne possède aucune qualité spécifique? Sa triade c’est d’affirmer qu’avec l'être et le non-être, existe « le devenir ». À l'intérieur du devenir, quelque chose change, quelque chose passe de l'être au non-être, et quelque chose retourne du non-être à l'être. Il y a ainsi une histoire. La négation est active et créatrice, elle est le moteur du devenir. C’est la démarche même de l’initiation qui déconstruit l’être pour le non être qui évolue en permanence pour construire un être qui n’est plus placé sur le même plan que le précédent.
Pour cela le non être a besoin d’une nouvelle identification. C’est son devenir qui se construit. Le vieil homme disparu le nouvel homme naît. Est-il pour autant autrui ou bien est-il resté le moi tel qu’il était avant ? Bergson dans « La pensée et le mouvant » dit : « Toutes les activités individuelles ou sociales de l’esprit, la perception, la pensée, le langage, conspirent à nous mettre en présence d’objets que nous pouvons tenir pour invariables et immobiles pendant que nous les considérons, comme aussi en présence de personnes, y compris la nôtre, qui deviendront à nos yeux des objets,
Pourtant le libre arbitre est une notion qui est effectivement récupérée par la religion bien handicapée pour expliquer que Dieu qui voit tout et sait tout se serait laissé berner par sa créature qui lui aurait échappée pour commettre le pêché. Dieu a-t-il pu être abusé? Non! Et ce concept fut inventé pour disculper Dieu de la responsabilité du mal en l’imputant à sa créature. Grâce au libre arbitre, Dieu reste impeccable. Thomas D’Aquin disait que seul l’homme agit d’après un jugement libre qui « n’est pas l’effet d’un instinct naturel s’appliquant à une action particulière, mais d’un rapprochement de données opéré par la raison (…) En conséquence il est nécessaire que l’homme ait le libre arbitre, par le fait même qu’il est doué de raison »
Ainsi humanisme et christianisme se rejoigne sur la responsabilité de l'homme car choisir, c’est toujours se déterminer, par l’intelligence, entre deux ou plusieurs possibles : c’est donc être libre. Le libre arbitre est ce droit sacré de notre volonté à se déterminer librement - voire arbitrairement – à agir et à penser, par opposition au déterminisme et au fatalisme.
Je ne te répondrai pas sur l'anarchisme parce qu'il est vrai que je connais mal cette doctrine fluctuante à travers ses commentateurs qui ne se sont pas donné une ligne unique

racaille a écrit : J'ai peut-être mal compris car les droits de l'homme et leurs déclarations nous sont imposés universellement comme un absolu indépassable de sagesse et de foi. Or il ne s'agit, tu le dis toi-même, que d'une ontologie axiomatique ; une tradition mystico-métaphysique vendue pour une "réalité" qui n'engage bizarrement que ceux qui s'en revendiquent. Sur ce point, nous ne sommes vraiment pas loin de la foi religieuse qui prend ses croyances pour des réalités universelles :)

Par contre, ce que tu ne dis pas, c'est que ces propositions ontologiques humanistes débouchent sur des chartes et déclarations d'ordre éthique qui, elles, ont une influence directe sur le comportement des gens, en particuliers de ceux qui récitent sans chercher à comprendre. Il ne va pas, par exemple, nécessairement de soi que notre nature humaine puisse justifier la propriété privée ou l'existence d'une force publique étatique (tel que déclaré dans la DDHC).

Les thèses humanistes et l'éthique qui en résulte devraient être présentées comme une idéologie - quasi politique - inscrite dans le marbre plus que comme une description objective du réel. Cela suffirait amplement à relativiser leur portée et à les rendre plus crédibles.
Ce qui fonde l'humanisme ce ne sont pas les droits de l'homme...mais on ne peut nier une filiation entre cette Déclaration des droits de l'homme et les humanistes du 18è siècle.
L'époque était fondatrice et le besoin était d'écrire ces textes fondateurs dont certains venaient d'ailleurs de la déclaration américaine. ce sont des textes de valeur (c'est l'humanisme) d'éthique (c'est de la morale et l'inspiration est nettement chrétienne) et d'économique (ce sont les intérêts de la bourgeoisie remplaçant l'aristocratie). Aujourd'hui on lit ses droits un regard unique embrassant les trois idéologies fondatrices dans une seule symbolique humaniste. C'est à mes yeux une erreur fondamentale de lecture qui fait naître l'humanisme ) à la révolution en faisant fi de tous les apports antérieurs balayés et réduits.
Alors oui la synthèse présentée est une idéologie d'éthique et de politique , humaniste uniquement sur le point de la valorisation de l'homme et de l'humanité promise eau progrès mais inspirée par des considérations socio-économiquers bourgeoises appartenant à la "classe sociale" qui a donné un projet de société révolutionnaire, à ce qui n'aurait qu'une révolte.
racaille a écrit : Je ne me soucie pas vraiment du droit alors tu te doutes que la notion de devoir ne me passionne pas des masses :)
Quand on me dit "droit" je ne pense pas par opposition "devoir" mais plutôt "volonté", "puissance" ou "désir".
Philosophiquement il me faudrait des pages pour nuancer mais sur la plan de ton libre arbitre tu as tout à fait raison de penser cela. icon_lol
Racaille a écrit : Justement les choses ne sont pas aussi simples. Beaucoup d'anarchistes considèrent que l'humain n'est pas le centre du monde et qu'il convient de le replacer dans son contexte comme tout écologiste le fait désormais quotidiennement. Beaucoup ne considèrent pas que l'humanité est en lutte contre la nature et que sa fonction principale soit de la transformer à sa propre convenance. D'autres ne se soucient pas de l'humanité, pas plus que de la société (puisque la fonction de celle-ci est de broyer l'individu), et ne considèrent que leur existence propre ainsi que leurs multiples associations avec d'autres individus libres. A vrai dire une grande part de l'anarchisme échappe aussi bien au gauchisme qu'aux idées libérales.
L'anarchie est souvent décrite comme l'absence d'organisation politique dans le but d'émanciper l'individu. A priori cela a peu à voir avec l'humanisme :)
Moi ma philosophie humaniste et existentialiste me conduit vers une approche de la théorie de la décroissance acceptable qui répond assez bien à ma vision de l'intégration de l'homme (contenu) à la nature (contenant) sans forcément adhérer à une démarche libertaire ou anarchiste. Mais là encore je pense que la démonstration serait trop longue et nous éloignerait de ce qui était le titre de notre fil.
Mais je te remercie sincèrement Racaille pour la qualité (rare ) de tes apports à notre échange et du niveau brillant de tes connaissances qui m'ont enrichi
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Message non lu par racaille » 01 avr. 2011, 18:04:00

Gibet je lis ton message maintenant mais je n'y répondrai que cette nuit ou ce weekend. Je n'ai pas le temps de rédiger quoi que ce soit maintenant et torcher un petit commentaire serait vraiment idiot de ma part.

I'll be back ;)
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Message non lu par GIBET » 03 avr. 2011, 02:26:00

Bon Week-End l'ami et reposes toi. Moi je suis à la retraite et je puis passer des nuits éveillé sans problème, D'autant que je suis entraîné pour avoir pendant plus de 40 ans dormi 3 heures par nuit. Cela donne du temps au temps!
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