Qu'en pensez vous ?Quelle "engatse" (prise de tête, en marseillais) ! Ce jour-là, à l'heure de l'apéro, alors que les nuages bas semblent accrochés aux parois de la calanque de Sormiou (quelques kilomètres à l'ouest de Marseille), Mireille, Denyse, Alain et Camille partagent un rosé de Provence au cabanon. Ils attendent avec impatience la création du parc national des Calanques.
Le lendemain, à la terrasse du restaurant Le Château, au cœur de la même calanque, alors que le soleil de midi illumine les falaises de calcaire blanc, ciselant le vert des pins, embrasant la mer azur, Béatrice, François, Claude et André, eux aussi "cabanoniers" pour la plupart, savourent un vin blanc de Cassis, trinquant à la quiétude du moment et du lieu. Eux pestent contre la création du parc.
(...)
"AIRE OPTIMALE D'ADHÉSION"
Le nouveau parc s'étend sur plus de 150 000 hectares, dont 51 800 de "cœur de parc" (43 500 en mer), auxquels s'applique une réglementation contraignante. Ils englobent les sites, mythiques pour les grimpeurs et les randonneurs, de Sormiou, Morgiou, Port-Pin, En-Vau, Port-Miou. Les 106 300 hectares de zones adjacentes, dont 8 300 hectares sur terre appelés "aire optimale d'adhésion", nécessiteront l'adhésion des municipalités et feront l'objet d'une politique contractuelle de développement durable, avec une charte, entre le parc national et les communes.
Le premier parc national "périurbain", aux portes de Marseille, deuxième ville de France avec ses 800 000 habitants, intègre même certains de ses quartiers. Une équation difficile à résoudre, dans un dossier très politique, sur fond de rivalités au sein de l'UMP en vue de la succession de Jean-Claude Gaudin, l'actuel maire de la ville.
Dans son vaste bureau dominant le vieux port, ce dernier est ému jusqu'aux larmes quand il évoque son enfance à Mazargues et à Sormiou, où il a encore le cabanon. "Avec l'engouement grandissant pour ces paysages magnifiques et fragiles, et ces gens qui ne sont pas tous attentionnés, il fallait protéger les calanques, faire un parc et en accepter les contraintes", dit-il. Mais comment préserver sans trop contraindre ?
Si les partisans du parc fêtent le décret tant attendu, certains regrettent les dérogations permettant le maintien de nombreuses activités dans le parc. Ou dénoncent les incohérences dans le tracé qui exclut certaines zones ou certains quartiers pour, disent-ils, "préserver des amis".
En face, entre fausses rumeurs, vrais fantasmes et craintes avérées, les représentants des pêcheurs, des cabanoniers, des chasseurs, des plongeurs, des plaisanciers, des grimpeurs, etc ..., craignent de perdre leur liberté. François Semeriva, 66 ans, chargé de la Société civile immobilière Marie de Sormiou, propriétaire d'une grande part des terrains où sont construits les 127 cabanons de la calanque, résume : "Il n'y a pas plus respectueux de l'environnement que nous. Les calanques, on les a toujours soignées, alors que la création du parc va attirer des millions de personnes et qu'avec les nouveaux règlements, les cabanoniers seront traités comme les touristes."
(...) Retrouvez l'intégralité de cet article sur Le Monde.fr
A plus tard,