http://www.causeur.fr/quand-le-pcf-voul ... %BB,18593#Quand le PCF voulait « arrêter l’immigration »
(...)
Pourtant, Gérin n’est pas le premier communiste à réclamer une limitation de l’immigration. En janvier 1981, c’était le cas de… Georges Marchais. Le secrétaire général du PCF adresse alors une lettre au recteur de la Mosquée de Paris Hamza Boubakeur. A l’époque, le maire giscardien de Saint-Maur des Fossés fait détruire un foyer d’immigrés et les renvoie vers la ville communiste de Vitry. Les immigrés s’abritent dans un foyer insalubre. Face au danger, le maire PCF fait détruire ce foyer.
Loin de condamner son élu, Marchais prend la plume pour répondre au recteur de la Mosquée de Paris. Pour lui, la destruction du foyer de Vitry n’était qu’une « riposte à l’agression raciste » du maire de Saint-Maur, qui refusait de prendre sa part dans l’accueil des immigrés. Marchais va plus loin et « approuve (le) refus (du maire de Vitry) de laisser s’accroître dans sa commune le nombre, déjà élevé, de travailleurs immigrés ».
Ce que craint Marchais, c’est le coût de l’immigration dans les communes les plus pauvres : « Les charges d’aide sociale nécessaire pour les familles immigrées plongées dans la misère deviennent insupportables pour les budgets des communes peuplées d’ouvriers et d’employés ». Il dénonce aussi une pression sur les salariés les plus précaires : « Quant aux patrons et au gouvernement français, ils recourent à l’immigration massive, comme on pratiquait autrefois la traite des Noirs, pour se procurer une main-d’œuvre d’esclaves modernes, surexploitée et sous-payée ». Et il conclut : « C’est pourquoi nous disons : il faut arrêter l’immigration, sous peine de jeter de nouveaux travailleurs au chômage ».
Marchais lie donc fermeté sur l’immigration et pensée communiste. Pour lui, la limitation de l’immigration relève bel et bien de la protection des travailleurs et non de préjugés racistes. Sauf à penser que le dirigeant d’un parti historiquement anti-colonialiste et antifasciste serait en fait un agent double de l’extrême droite, haïssant l’islam et les Maghrébins.
En février 1981, Marchais récidive. Il se rend à Montigny-les-Cormeilles, ville dirigée par un certain Robert Hue. A l’époque, le futur successeur de Marchais venait de manifester devant le logement d’une famille accusée de trafic de drogue. Dans son discours, Marchais, vient une fois de plus au secours de son élu : « Nous posons le problème de l’immigration, ce serait pour favoriser le racisme ; nous menons la lutte contre la drogue, ce serait parce que nous ne voulons pas combattre l’alcoolisme prise par notre clientèle (…) Pour la jeunesse, je choisis l’étude, le sport, la lutte et non la drogue (…) Alors, comme l’autre jour un dirigeant socialiste, ils crient tous en chœur : ‘pétainisme !’ Quelle honte, quelle idée lamentable ces gens-la se font des travailleurs (…) Je le dis avec toute la force de mon indignation, de telles attaques ne déshonorent que leurs auteurs et ils ne méritent que le mépris ».
On répondra que Marchais cherchait déjà à éviter la concurrence du FN. Sauf que début 81, le FN est groupusculaire. En 1980, le parti frontiste ne compte que 270 adhérents. Aux législatives de 78, le FN n’a obtenu que 0,33% des voix. Il faudra attendre Dreux et les élections cantonales de 82 pour assister à la première éclosion du Front. A cette époque, la concurrence au PCF vient plus du PS et de Mitterrand que de Jean-Marie Le Pen.
La ligne Marchais n’est donc une surenchère autour de l’extrême droite. Au contraire, défendre l’autorité de l’Etat, réguler les frontières, c’est défendre les classes populaires. C’est s’assurer que les habitants des HLM ne croisent plus de dealers en bas de leur immeuble, c’est équilibrer le marché du travail au profit des plus précaires. De même, défendre la laïcité et l’intégration, c’est assurer la cohésion républicaine contre le repli sur soi dans les quartiers les plus pauvres.
Aujourd’hui, les choses ont changé. Au delà des prises de positions de Gérin et autre, le PCF a adopté une ligne laxiste en matière d’immigration, de laïcité et de sécurité par hostilité à tout ce qui ressemble de près ou de loin à du lepénisme. Cette évolution est facile à comprendre. La rupture du PCF avec les positions de Marchais va de pair avec la perte de son identité ouvrière et sa recherche d’un nouvel électorat. Mais le parti va-t-il finir comme le PS et succomber au discours de Terra Nova, abandonnant ainsi les classes populaires au profit des jeunes, des diplômés, des femmes et des minorités ? Triste destin. En cherchant à gagner quelques voix chez les bobos, le PCF perdra à coup sûr son âme. Mais n’est-ce pas déjà le cas ?
Il y a une trentaine d'années, le PCF tenait donc sur l'immigration des positions qui n'avaient rien à envier aux positions actuelles du FN. Et à l'époque, le PCF était le premier parti ouvrier de France. Par la suite, le PCF a adopté une ligne laxiste, cherchant probablement à plaire à quel électorat bobo. Ce faisant, il a perdu son électorat traditionnel...