Article très intéressant qui rompt avec la stratégie de culpabilisation en vogue depuis des décennies. Le sentiment décrit ici comme celui de la "quatrième génération" est réel. La majorité des gens de mon âge considèrent que la Shoah prend trop de place dans la mémoire collective actuelle, dans le débat public, la littérature, les arts... Finkielkraut a raison.FIGAROVOX/ESSAIS: Dans La Shoah de Monsieur Durand, Nathalie Skowronek décrit une réalité inéluctable: la disparition progressive de la mémoire de l'Holocauste. Un essai aussi amer que cinglant, qui pose une question essentielle à notre temps.
«La Shoah n'a plus le vent en poupe. Elle n'est plus un territoire sacré. Ceux qui ne le comprennent pas deviennent des ringards. Ils s'accrochent à un bateau qui coule. Personne pour raconter, personne pour écouter. C'est violent». Dans un essai amer et cinglant, La Shoah de Monsieur Durand (Gallimard, 2015), Nathalie Skowronek cisèle en quelques pages une évolution lente et décisive: l'oubli progressif, mais inéluctable de la mémoire de la Shoah.
La première génération, celle des rescapés, s'est muré dans le silence, incapable de mettre les mots sur l'enfer qu'elle avait vécu. La deuxième a obéi à ce devoir de réserve dans la douleur: «On n'en parlait pas». La troisième, celle de l'auteur, a fouillé inlassablement ce passé, se roulant dans les plaies de l'histoire avec une ferveur qui confinait parfois à la thérapie. La quatrième, celle qui a vingt ans aujourd'hui, veut rompre avec la contrainte mémorielle et s'émanciper de ce passé pesant. L'oubli volontaire des survivants rejoint l'oubli désinvolte des descendants. La boucle est bouclée. La vie continue.
«L'antisémitisme a produit la Shoah, le souvenir de la Shoah a protégé les survivants de l'antisémitisme» écrit Nathalie Skowronek. Eteindre ce souvenir, n'est-ce-pas donner du grain à moudre aux négationnistes, aux ennemis d'Israël et aux antisémites? Ou alors faut-il plutôt penser, comme Alain Finkielkraut l'écrivait dernièrement dans Télérama, que «la mémoire, qui devait éteindre l'antisémitisme, aujourd'hui en entretient la flamme»?
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On ne peut pas en vouloir aux jeunes générations d'oublier cet événement. Par contre, sans doute seront-elles plus sensibles que leurs aînés aux attentats du 11 septembre.