En effet les techniques de communication de l'UMP ne trompent plus personne, et ils ne s'en cachent d'ailleurs même plus : on a carrément vu au cours d'une émission récente Benjamin Lancar, le président des Jeunes Populaires, avouer benoîtement bien maîtriser ses "éléments de langage", provoquant l'hilarité des autres invités devant tant de candeur.COMMENT L’UMP UTILISE LE TROLL POLITIQUE POUR ACCAPARER LE DÉBAT
Nicolas Sarkozy doit beaucoup à Léon Zitrone. A une maxime surtout : « Qu’on parle de moi en bien ou en mal, peu importe. L’essentiel, c’est qu’on parle de moi ! » Une leçon d’homme de télévision assimilée par le Président de la République comme une leçon de communication : dans une société du bruit médiatique, gueuler le plus fort est ce qui compte, quitte à dire n’importe quoi. A ceci prêt que ce « n’importe quoi » doit être assez efficacement conçu pour marquer les esprits dans le sens où la politique veut les mener.
Depuis la rentrée, le gouvernement a déployé un arsenal de communication prodigieux pour occuper tout l’espace médiatique, couvrant de ses déclarations fracassantes ou édifiantes les moindres mots de mise en garde ou d’indignation de l’opposition, des syndicats ou des penseurs qui se débattent à pointer ce qui a été défait par la « rupture ». Et ce simple fait marque la force d’un gouvernement sûr de lui : en 2007, c’est en remportant la bataille du discours que Nicolas Sarkozy a marqué les esprits. Sur chaque sujet, ses concurrents, à commencer par Ségolène Royal, ne faisaient que s’aligner, réagir dans le débat lancé par l’UMP. La plus grande défaite de la gauche ayant été de voir sa « vie chère » recallée par le « pouvoir d’achat » du programme de la droite.
Cette rentrée, la dernière avant le début de la campagne, marque une accélération dans un accaparement du débat qui, à première vue, ressemble à un troll massif de l’agora médiatique. Mais dont les effets de manche consistent surtout en trois techniques redoutables maquillée en grossièreté politique.
La mithridatisation ou « les sourds préfèrent qu’on leur parle doucement »
En déclarant qu’il aurait préféré que « le Luxembourg n’existe pas », après la critique de Viviane Reding sur la politique de la France envers les Roms, le sénateur Philippe Marini a battu des records d’indignité. Ses déclarations étaient jugées par le ministre des Affaires étrangères du Grand Duché « du même niveau que les discours de Mahmoud Ahmdinejad ». Remarquable en effet.
Car, en fixant la barre aussi haut dans la violence verbale, toute proposition un cran au dessous est considérée comme « relativement raisonnable ». De quoi couper l’herbe sous le pied de tout parti d’opposition qui, à moins de vouloir rentrer dans un concours se retrouve le souffle coupé au premier round. En lançant des projets de loi absurdes ou honteux, le même Philippe Marini avait opéré un joli coup en décembre 2008 : proposant de déduire des impôts les pertes de ceux qui avaient joué en Bourse et perdu avec la crise, il avait été déboutté… Permettant au gouvernement de jouer les redresseurs de tort en ne faisant que corriger l’un des siens !
Durant toute la passe d’arme qui a opposé la France à l’Union européenne, la méthode a fait florès : de Jean-François Copé à Chantal Brunel, la majorité s’est arrogé le droit de s’en prendre frontalement aux institutions, aux États membres, etc. Devant quoi l’opposition ne pouvait que s’indigner. Las, l’indignation est une posture passive : l’UMP restait à l’initiative et au premier plan à l’écran.
L’internalisation du débat ou « je suis content que nous ayons cette discussion au sein de l’UMP »
Pas de mérite à relever cette technique : c’est Xavier Bertand lui-même qui a vendu la mèche sur France inter lundi 20 septembre. Le week-end entier avait été animé du débat suscité par les propositions de Brice Hortefeux pour réformer la justice, notamment l’instauration de jurys populaires et l’élection des juges. Cacophonie dans la majorité : Gérard Larcher et François Fillon se déclarent contre le principe d’élection, Michèle Alliot-Marie déclare avoir ses idées (encore heureux, c’est elle la ministre de la Justice…). Bonhomme, Xavier Bertrand se félicite de l’ambiance :« qui fait vivre ce débat ? Notre famille politique et la majorité, moi je m’en réjouis. »
Car en gardant en son sein toute la palette des options sur un sujet ou un autre, l’UMP coupe encore une fois l’herbe sous le pied de l’opposition. Vous êtes pour l’élection des juges ? Hortefeux aussi ! Vous êtes contre ? Ah, comme François Fillon alors ! Une fois le sujet imposé, l’Élysée pose chacun de ses pions sur une case avant de prendre sa décision : la place est prise, la gauche n’a plus qu’à réagir. L’UMP conserve la main.
Le hors sujet ou « la cuisine est sale mais j’ai balayé le couloir »
Les syndicats ne pourront pas dire que le gouvernement ne veut pas négocier. Certes, il refuse catégoriquement de toucher à la retraite à 62 ans et au taux plein à 67 mais il propose autre chose.En page 4 du Parisien du 21 septembre (J -2 de la deuxième mobilisation), le titre de l’interview d’Eric Woerth est clair : « Retraite : « nous allons proposer de nouveaux amendements ». » Il faut pousser à la fin du paragraphe de présentation pour apprendre que le ministre du Travail considère que « les mesures d’âges de 62 et 67 ans ne sont pas négociables ». La tête de page est passé, les gazettes pourront annoncer « Woerth prêt à des aménagements sur les retraites », le hors sujet est passé.
Et, dans ce « hors sujet » là, ce n’est pas l’élève qui est jugé mais le prof : en montrant cette fausse souplesse (on apprend en troisième colonne d’interview que Woerth ne compte pas égratigner les hauts revenus), le ministre fait passer ses critiques, les syndicats et l’opposition, pour des pinailleurs, des obsessionnels… Pire : pour des capricieux qui risquent de laisser passer l’occasion d’améliorer le sort d’une part marginale de la population. Au final, ces « amendements » ne seront peut-être même pas adoptés en séance. Mais qu’importe : syndicats et oppositions ne pourront pas dire que le gouvernement n’a rien proposé. L’UMP garde la main.
Combinées, toutes ces techniques ne donnent pas au gouvernement la capacité de « gagner » le débat sur les retraites. Ils lui donnent simplement la main sur le fameux débat, s’assurant qu’aucune déclaration de l’opinion, aucune réaction des syndicats ne sortira du cadre qu’il a défini. Que ce soit pour critiquer ou soutenir, toutes les propositions faites dans le débat sur la réforme des retraites se réfèrent à un membre de la majorité. En bien, en mal, peu importe : l’important, c’est qu’on parle d’eux.
L'UMP utilise le troll politique pour accaparer le débat
- El Fredo
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If the radiance of a thousand suns were to burst into the sky, that would be like the splendor of the Mighty One— I am become Death, the shatterer of Worlds.
Excellent article. Il évoque une thèse que je défends aussi. L'UMP est un parti obsédé par le contrôle, il met tout en oeuvre pour que le cadre du débat public (*) ne soit décidé que par le président de la République et rien que lui. Rien ne doit dépasser sous peine d'être inaudible. Maîtrise du cadre, maîtrise du tempo, maîtrise des décibels. L'UMP dialogue avec l'UMP, les autres formations politiques n'ont plus qu'à subir.
A la longue, les français stupéfiés par ce déferlement d'éléments de langage sans contre-parties ne peuvent arriver qu'à la seule conclusion qui s'impose à eux : l'opposition n'a pas d'idées ("sinon on en aurait entendu parler pas vrai ?").
* : On parle souvent de débat public mais ce débat n'a vraiment rien de public. Je ne me souviens pas que ma petite voix ait jamais été entendu par quiconque possédant un pouvoir décisionnel. Dans ce genre de débat les prolos discutent entre eux à table le dimanche et dans un autre cercle de réflexion, dans les hautes sphère au-dessus des simples mortels, les politiques font leur propagande dans les médias. Mais il n'y a aucun échange entre ces deux classes de français, le débat coule dans un seuls sens - et jamais le bon.
A la longue, les français stupéfiés par ce déferlement d'éléments de langage sans contre-parties ne peuvent arriver qu'à la seule conclusion qui s'impose à eux : l'opposition n'a pas d'idées ("sinon on en aurait entendu parler pas vrai ?").
* : On parle souvent de débat public mais ce débat n'a vraiment rien de public. Je ne me souviens pas que ma petite voix ait jamais été entendu par quiconque possédant un pouvoir décisionnel. Dans ce genre de débat les prolos discutent entre eux à table le dimanche et dans un autre cercle de réflexion, dans les hautes sphère au-dessus des simples mortels, les politiques font leur propagande dans les médias. Mais il n'y a aucun échange entre ces deux classes de français, le débat coule dans un seuls sens - et jamais le bon.
Ce qui distingue principalement l'ère nouvelle de l'ère ancienne, c'est que le fouet commence à se croire génial. K M
- sarkonaute
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Je suis assez d'accord, dans la limite ou je pondère ce jugement (si tu permets) en accolant à UMP le qualifiquatif "sarkozienne", car à mon sens c'est assez nouveau et date en fait de la main mise du petit sur ce parti, sans doute prédisposé, mais pas si hégémonique que cela auparavant.racaille a écrit : Excellent article. Il évoque une thèse que je défends aussi. L'UMP est un parti obsédé par le contrôle, il met tout en oeuvre pour que le cadre du débat public (*) ne soit décidé que par le président de la République et rien que lui. Rien ne doit dépasser sous peine d'être inaudible. Maîtrise du cadre, maîtrise du tempo, maîtrise des décibels. L'UMP dialogue avec l'UMP, les autres formations politiques n'ont plus qu'à subir.
A la longue, les français stupéfiés par ce déferlement d'éléments de langage sans contre-parties ne peuvent arriver qu'à la seule conclusion qui s'impose à eux : l'opposition n'a pas d'idées ("sinon on en aurait entendu parler pas vrai ?").
* : On parle souvent de débat public mais ce débat n'a vraiment rien de public. Je ne me souviens pas que ma petite voix ait jamais été entendu par quiconque possédant un pouvoir décisionnel. Dans ce genre de débat les prolos discutent entre eux à table le dimanche et dans un autre cercle de réflexion, dans les hautes sphère au-dessus des simples mortels, les politiques font leur propagande dans les médias. Mais il n'y a aucun échange entre ces deux classes de français, le débat coule dans un seuls sens - et jamais le bon.
Je pense même que c'est le coeur de la statégie naboléonienne. Il faut reconnaitre que les bertrand and co excellent dans ce role, trop peu être d'ailleurs pour que cela soit crédible.
La chute n'en sera que plus dure car une fois dans l'opposition cette posture sera intenable, et en cas de défaite en 2012, ce qui semble inéluctable, on risque de voir, à force d'avoir usé de cette mascarade eu lieu de se préoccupper du sort des français (ce qui a permis à l'opposition actuelle de gagner haut la main les élections territoriales) une gauche qui aura beau jeu, du fait de sa multiplicité, de reprendre à son compte cette réthorique, à la différence près qu'elle aura vraissemblablement réussi a obtenir la majorité dans :
- les municipalités
- les départements
- les régions
- le parlement
- la présidence
- et selon toute vraissemblance et pour le 1ere fois : le sénat.
Voila qui va réjouir notre ami sarkonaute ....
- El Fredo
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Merci pour cette tranche de rire, j'ai toujours apprécié l'humour décalé icon_cheesygrinsarkonaute a écrit :si l'UMP occupe autant l'espace médiatique, c'est qu'elle est la seule à mettre sur la table des propositions,d es idées.
elle crée un débat démocratique permanent, dont doivent se réjouir tous les citoyens : la démocratie, c'est tout le temps.
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Lancelot c'est vrai c'est très sarkozyste. Mais je pense que la stratégie décrite en point N°2 dans l'article existait déjà durant le second mandat de Chirac. Les sarkozystes, alors à l'assaut des chiraquiens et ayant pour but à court terme de faire main basse sur le parti, avaient déjà adopté la position de franc-tireurs au sein de la majorité.
La différence à mon sens c'est que ça se faisait contre l'avis de Chirac, même si cela a pu lui servir à quelques reprises. Avoir gardé Sarko dans son gouvernement alors que ce dernier passait son temps à lui faire pipi sur la tête dans tous les médias, c'est quand même quelque chose de spécial ! Ca me fait penser à Sarko gardant "sa rebelle" Rama Yade au sein du gouvernement, ça permet de renforcer l'illusion d'un débat interne, que chacun à l'UMP a droit de dire ce qu'il pense et qu'en plus c'est spontané-ça-vient-du-coeur.
La différence à mon sens c'est que ça se faisait contre l'avis de Chirac, même si cela a pu lui servir à quelques reprises. Avoir gardé Sarko dans son gouvernement alors que ce dernier passait son temps à lui faire pipi sur la tête dans tous les médias, c'est quand même quelque chose de spécial ! Ca me fait penser à Sarko gardant "sa rebelle" Rama Yade au sein du gouvernement, ça permet de renforcer l'illusion d'un débat interne, que chacun à l'UMP a droit de dire ce qu'il pense et qu'en plus c'est spontané-ça-vient-du-coeur.
Ce qui distingue principalement l'ère nouvelle de l'ère ancienne, c'est que le fouet commence à se croire génial. K M
Oui, on pourrait d'un point de vue historique dater le sarkozisme dès le "pardon" de chirac, qui a été une grosse erreur de ce dernier mais aussi peut être la seule façon pour lui de s'en sortir.
Quoi qu'il en soit cette dérive a la fois sémantique et politique me parait rassembler toutes les conditions pour devenir dans les 20 prochaines années le summum de la dérive politique.
Après la droite complexée (complexe d'infériorité) on aura vu la droite complexée dans l'autre sens. Et finalement on n'aura rien vu de conforme a ses discours mais on aura eu ce que beaucoup de gens redoutaient. Voila qui devrait nous permettre de nettoyer ce camp, par un processus (trop) long mais néanmoins nécessaire.
Maintenant c'est à la gauche, de trouver un consensus réel et non pas interne au PS.
Quoi qu'il en soit cette dérive a la fois sémantique et politique me parait rassembler toutes les conditions pour devenir dans les 20 prochaines années le summum de la dérive politique.
Après la droite complexée (complexe d'infériorité) on aura vu la droite complexée dans l'autre sens. Et finalement on n'aura rien vu de conforme a ses discours mais on aura eu ce que beaucoup de gens redoutaient. Voila qui devrait nous permettre de nettoyer ce camp, par un processus (trop) long mais néanmoins nécessaire.
Maintenant c'est à la gauche, de trouver un consensus réel et non pas interne au PS.
Ou vois tu une grande conspiration alors qu'il ne s'agit que d'une petite salade politicienne ?mps a écrit : Ah, elle est inusable, la théorie de la grande conspiration. Un député va un peu loin, et cela devient une "stratégie de communication" !
Comme le dit golgoth, la politique est un métier, pas très reluisant par ailleurs, mais dans le cas qui nous concerne, c'est à dire le sujet, force est de constater que nulle part il n'a été développé une telle ineptie.
Il n'y a pas de conspiration, pas plus que de rêve de grand soir, il n'y a qu'un abime d'incompétence liée à une idéologie qui déroge du fait de son meneur aux principes de la république française, au sens ou l'on se moque de la justice sociale, qui encore une fois sans être celle de la révolution (il y a longtemps que les français ont digéré cela) devrait être, quelque soit le parti, la recherche de l'intérêt général et la défense des plus faibles.
l'uaimepé n'en a que faire et se prend à lui seul pour la france et légitime ses dissentions en les faisant passer pour un débat d'idées alors qu'ils ne représentent plus rien et disparaitront sans doute totalement en 2012 de la vie active politique, faute de mandats locaux, departementaux, rogionaux et ,nationaux.
Il y a le feu, mais ils le nient . ils pensent encore détenir le sort du pays entre leurs mains, mais celui ci est déjà scellé, alors ils sauvent les meubles coute que coute, quitte à tricher sur les apparences.
J'aurais admis cela de chirac, cela a toujours été son fonds de commerce, mais sarko a fédéré en 2007 sur des engagements fermes et de rupture et il les a oubliés. Ceux qui sont tombés dans le panneau (pas moi, bien sur ...) lui en tiendront griefs, c'est sur, sauf peut être 200 ou 300 gros bénéficiaires du BF,mais ils ne pèseront pas lourd.
Pour être honnête, la politique brutale et xénophobe du gouvernement depuis cet été, c'est celle que j'attendais dès 2007 au lendemain de l'élection présidentielle. J'estime qu'on a eu du bol d'avoir au moins trois ans de répit. La stratégie de l'"ouverture" a eu au moins le mérite d'anesthésier temporairement les réflexes de pitbull de la droite.
Ce qui distingue principalement l'ère nouvelle de l'ère ancienne, c'est que le fouet commence à se croire génial. K M
- wesker
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Je crois que le Président de l'UMP, qui est accessoirement aussi President de la République, risque de se prendre les pieds dans son ego surdimensionné !
Par ailleurs, le baillonnement et le detournement du debat pour faire accepter, par les français les reformes les plus injustes mais aussi les plus inefficaces, en dépit du bruit effectués à la périphérie.
Par ailleurs, le baillonnement et le detournement du debat pour faire accepter, par les français les reformes les plus injustes mais aussi les plus inefficaces, en dépit du bruit effectués à la périphérie.
- Narbonne
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Re: L'UMP utilise le troll politique pour accaparer le débat
C'est possible que le trollage UMP existe
Ils ne savaient pas que c'était impossible, alors ils l'ont fait.
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