Message non lu
par johanono » 24 mars 2014, 20:06:11
L'argument qui dit que nous devrions voter au motif que nous percevons des prestations sociales, et que quiconque ne vote pas ne devrait plus avoir droit à ces prestations, me semble inapproprié. Il y a là une confusion entre droit de vote et prestations sociales. On retrouve cette confusion dans l'argument selon lequel il faut accorder le droit de vote aux étrangers au motif qu'ils paient des impôts et perçoivent des prestations sociales. Or le droit de vote est d'abord un attribut de la nationalité : on a le droit de vote parce que l'on est Français. Inversement, le droit aux services publics et aux prestations sociales est la contrepartie du fait de payer des impôts et des cotisations : ce droit n'a rien à voir avec la nationalité, c'est pour cela qu'on ne saurait refuser les prestations sociales aux étrangers sous prétexte qu'ils sont étrangers (d'ailleurs, les extrémistes de droite qui veulent réserver les prestations sociales aux seuls Français entretiennent eux-mêmes cette confusion entre droit de vote et droits sociaux).
Ceci dit, je ne partage pas l'idée selon laquelle le vote obligatoire serait une "atteinte aux libertés individuelles". De quelle liberté fondamentale parle-t-on ? La liberté de ne pas voter serait-elle donc un droit fondamental que l'Etat devrait garantir ? Curieuse conception des libertés individuelles... Nous vivons en société. La vie de la cité doit donc être l'affaire de tous, chaque citoyen devrait faire l'effort de s'intéresser sans qu'on vienne le prendre par la main. Ceux qui disent qu'ils se foutent de la politique font preuve, soit d'égoïsme, soit de paresse intellectuelle... Selon moi, le vote obligatoire n'aurait de choquant. Reste à voir s'il résoudrait vraiment les problèmes.
En effet, l'augmentation de l'abstention (qui n'est pas un phénomène nouveau et qui ne touche pas que la France) provient très probablement de ressentiments de plus en plus forts ressentis par de plus en plus de citoyens, qui ont le sentiment que les élus sont tous des pourris et que, de toute façon, il ne sert à rien de voter puisqu'ils mènent tous la même politique. La disparition des grandes idéologies politiques (avec notamment la chute du bloc communiste) accentue également ce sentiment qu'il n'y a plus vraiment d'alternatives : il y a probablement un lien entre la "Fin de l'Histoire" décrite par Francis Fukuyama et l'augmentation de l'abstention, qui touche toutes les démocraties occidentales.
Il y a donc des ressentiments chez beaucoup de Français, matérialisés notamment par une abstention massive ou par des votes extrêmes. Le vote obligatoire, même s'il n'est selon moi pas choquant moralement, ne serait qu'un moyen de casser le thermomètre qui indique la fièvre...