La terre était belle, ce matin-là. Il est vrai que pour moi elle est toujours belle. Mais souvent elle montre une figure rude, et d’un abord difficile, surtout à l’homme de labeur qui ne l’affronte guère que pour lui imposer les marques de son travail. Elle s’étendait devant moi, grise comme le temps, mais douces comme ses mottes qui fondaient sous les pieds. Sous les gouttelettes encore fraiches de la nuit, brillaient des herbes courtes et l’odeur amère du chiendent, à chaque pas broyé par les semelles, montait autour de moi, qui avançais par grandes et lentes enjambées dans la glèbe luisante et noir. Chaque fois que je la touchais, mon souliers s’enfonçait en elle jusqu’à la cheville et sur le cuir je sentais sa matière friable qui prenait mon pied et cherchait à le retenir.
Texte extrait - " Le mas Téotime ".
Henri Bosco est un écrivain de talent qui rend perceptible les sentiments qu’il éprouve et le plaisir des mots.