Qu'en pensez vous ?La "lutte des places", à une poignée de jours du premier tour de l'élection présidentielle, prend un tour plus intense autour du candidat du Parti socialiste. Bien trop prudent, François Hollande, pour sa part, ne pipe mot de ses desseins en matière de casting gouvernemental. La cour socialiste, cependant, bruisse plus que jamais de rumeurs, de manoeuvres de placement et d'angoisses.
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Le parfum de la victoire, indéniablement, échauffe bien des esprits. "Il y en a beaucoup qui ont déjà composé leur cabinet ministériel et choisi leurs directeurs d'administration centrale", s'agace notamment un des patrons de la campagne socialiste. "Tout ça est un peu prématuré", met en garde un vieux routier du parti. Mais rien n'y fait. A chaque ministère ses impétrants et ses stratégies.
MATIGNON
"Le choix du premier ministre dépend beaucoup des conditions de l'élection", a prévenu M. Hollande. Il devrait, quoi qu'il en soit, s'opérer parmi ceux qu'un proche du candidat recense comme les "incontournables" : Martine Aubry, Jean-Marc Ayrault, Laurent Fabius ou, dans une moindre mesure, Pierre Moscovici, Michel Sapin ou Manuel Valls.
Mme Aubry, qui s'est illustrée dans un positionnement social et plus à gauche que M. Hollande, pourrait bénéficier d'une percée du candidat du Front de gauche. "Si les chiffres mettent Jean-Luc Mélenchon à 16 % ou 17 %, il est clair que François doit aller chercher Martine", insiste un de ses alliés.
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M. Ayrault, s'est montré beaucoup plus présent ces derniers temps, fournissant des notes sur les premiers mois de gouvernement. Sur le plan législatif, mais aussi sur la réorganisation de l'appareil d'Etat, des directions et des autorités administratives.
Dans toutes ses réunions publiques, le maire de Nantes déroule ce qui ressemble fort à un discours de politique générale, avec les premières mesures immédiates et les textes législatifs soumis lors de la session extraordinaire de juillet. Le patron des députés PS, à l'évidence, s'y voit bien.
Autre option, celle de Laurent Fabius, qui présente l'avantage d'avoir planché sur l'échéancier des réformes de la première année et celui d'avoir déjà occupé le poste ; mais l'inconvénient de l'avoir occupé il y a près de trente ans... "Ça pourrait être une solution si c'est pour une mission ponctuelle", type gouvernement de mission, estime un dirigeant du PS.
Cette "guerre des trois" exceptée, le député Michel Sapin a coordonné le projet du candidat, qu'il accompagne depuis l'ENA. Il est plus expérimenté que MM. Moscovici et Valls, pour lesquels certains proches envisagent Matignon mais dans l'hypothèse du deuxième gouvernement du quinquennat. "La révélation de ce gouvernement pourrait être Sapin, qui est bon, rassurant et 200 % loyal", estime un proche du candidat. Que que soit le choix du futur occupant de Matignon, s'ensuivra un "Rubik's Cube", sorte de jeu de casse-tête gouvernemental pour placer tous les autres "incontournables" dans les ministères régaliens de la République.
BERCY
Qui pour piloter le ministère de l'économie et des finances, qui sera le coeur du réacteur du début de mandat ? Outre les solutions Michel Sapin, qui a déjà l'expérience du job, et aussi de Pierre Moscovici, qui s'y verrait volontiers, Jérôme Cahuzac s'est très tôt et clairement positionné.
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AFFAIRES ÉTRANGÈRES
Pour le futur patron du Quai d'Orsay qui sera vite dans le grand bain avec le sommet du G8 et celui du G20, Laurent Fabius apparaît comme le mieux placé pour ce portefeuille. Les voyages qu'il a effectués pour le compte de M. Hollande au Proche-Orient et en Asie, avec des fortunes diverses, l'ont conforté. "Fabius a préempté le Quai", s'amuse un membre de l'équipe du candidat socialiste, pour qui l'ancien premier ministre aurait le profil : "C'est la seule position où le problème du has been ne se pose pas. Il pourrait être le Juppé de la gauche."
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INTÉRIEUR
Les candidats les plus sérieux pour la Place Beauvau sont François Rebsamen, responsable du pôle sécurité dans l'équipe de M. Hollande, et Manuel Valls, le directeur de la communication du candidat PS.
Du côté des policiers, on ne croit guère dans les chances du premier, qui cultive les anciens réseaux "Joxe". Ce qui n'est pas pour rassurer chez les commissaires et les syndicats, avec une partie desquels M. Rebsamen n'a que peu de contacts. Certes, le sénateur et maire de Dijon a, dans cette campagne, effectué quelques déplacements sur la sécurité, et moult communiqués de presse. Mais au QG, un hollandais juge qu'en s'emparant de la présidence du groupe PS au Sénat il s'est lui-même mis des bâtons dans les roues.
Quant à M. Valls, c'est bouche cousue : "Je me refuse à en parler", évacue le directeur de communication, qui semble jouir des faveurs des policiers. Proche du criminologue Alain Bauer, parrain de l'un de ses fils, il n'a jamais cessé, même au coeur de la campagne, d'entretenir ses réseaux.
JUSTICE
André Vallini, responsable du pôle justice dans le staff et vieux compagnon de M. Hollande, est le prétendant officiel à la chancellerie. Le président du conseil général et sénateur de l'Isère semble à la fois très impliqué et assez sûr de son fait. La plainte aux prud'hommes d'une ex-collaboratrice, qui l'accusait de harcèlement moral, a néanmoins fait tache dans le tableau. Son principal challenger est un autre vieil ami de M. Hollande, l'avocat Jean-Pierre Mignard, 61 ans, qui n'est pas officiellement candidat. Il est le principal animateur du club DJS, (Droits, justice et sécurités) qui rassemble policiers, avocats et magistrats.
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AFFAIRES SOCIALES
Là encore, peu de concurrence pour Marisol Touraine dans la perspective d'un "grand ministère social". A la tête du pôle social dans le staff, la députée d'Indre-et-Loire a suivi la réforme des retraites pour le PS et a une bonne connaissance du financement de la Sécurité sociale. Se poserait alors la question d'un ministère délégué ou d'un secrétariat d'Etat à la santé, auquel pourraient prétendre la députée de Haute-Garonne Catherine Lemorton ou le député de Paris Jean-Marie Le Guen. Ce proche de Dominique Strauss-Kahn tente de faire oublier son tardif soutien à M. Hollande par une présence assidue sur les déplacements à thématiques santé du candidat.
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