CAMUS au Panthéon
Refuser l'idée que Camus puisse être «panthéonisé» sous prétexte que Nicolas Sarkozy aurait quelques arrières pensées politiciennes, c'est aussi une forme d'instrumentalisation.
Nicolas Sarkozy a le projet de faire transférer les cendres d'Albert Camus au Panthéon et ça fait déjà polémique! François Bayrou parle de récupération politique, Olivier Todd, le grand spécialiste de Camus, craint l'ensevelissement de la pensée de l'écrivain sous les honneurs républicains, certaines voix à gauche dénoncent une nouvelle forme de l'ouverture-débauchage par la dépouille d'un écrivain de gauche... à moins que ce ne soit une ruse pour raviver de vieilles plaies qui ont meurtri la gauche intellectuelle du temps des oppositions Sartre / Camus sur l'idée de la révolution et la justification de la violence.
Jean Daniel, le fondateur du Nouvel Observateur et qui fut l'ami d'Albert Camus, estime que l'homme de «l'héroïsme de la mesure» ne pourrait pas se trouver bien dans un temple de la démesure. Jean Camus, le fils d'Albert, semble penser la même chose. Plus inattendu, plus «n'importe quoi» aussi, il y a Jean-Marie Le Pen qui voit dans l'initiative du président de la République une tactique pour piquer des voix au Front national puisque Camus était pied-noir! D'autres, plus moqueurs, s'amusent qu'un président bling-bling en mal de stature cherche par tous les moyens - cérémonies, symboles ostentatoires de la pompe et de la grandiloquence que lui fournit sa fonction - à se tricoter un habit de grand chef d'État. Nicolas Sarkozy serait en pleine opération de re-présidentialisation.
Ce déluge de critiques est assez significatif de l'image qu'a maintenant Nicolas Sarkozy. Sur le papier, l'initiative a tout pour être consensuelle. Si elle suscite tant d'oppositions, c'est parce que d'autres initiatives, comparables en terme de fabrication de ce qu'il est convenu d'appeler maintenant notre «roman national», je veux parler de la lecture de la lettre de Guy Môquet ou de l'appel à débattre sur l'identité française, sentaient trop l'opportunisme symbolique.
La façon dont le candidat Sarkozy avait tordu la pensée de Jaurès et Blum pour l'inclure dans un «travailler plus pour gagner plus», à l'époque d'essence libérale, en a échaudé plus d'un. Maintenant toute initiative un tant soi peu symbolique est frappée de soupçon. Mais, en l'occurrence, c'est assez injuste parce que finalement la seule question, au-delà de la réelle motivation du Président, la seule question qui vaille c'est: Camus au Panthéon, est-ce une bonne idée?
On peut très bien trouver toute Panthéonisation ridicule mais si l'on est sensible au rite républicain, si l'on pense que le «Aux grands hommes la patrie reconnaissante» du fronton du Panthéon a un sens, que la liste des personnalités qui y reposent compose une sorte d'ADN de l'esprit français, de ce en quoi nous croyons collectivement, alors, on ne voit pas comment on pourrait s'opposer à ce qu'Albert Camus repose à côté de Victor Hugo, Pierre et Marie Curie, Emile Zola, Victor Schœlcher, Jean Jaurès ou Jean Moulin. En quoi serait-ce trahir Camus que de l'honorer?
Certes, il était l'homme opposé à tous les pouvoirs mais contrairement à Sartre, il n'a pas refusé le Nobel ou la légion d'honneur. En quoi son œuvre serait-elle «ensevelie sous tant d'honneur». Celles d'Hugo, de Zola ou de Dumas ne l'ont pas été. Camus est à tous. La plupart des lycéens ont eu à lire et étudier «L'Étranger» et puis, certes, il était de gauche mais tout le monde peut se retrouver dans la morale, la philosophie, l'humanisme et même les contradictions ou les ambiguïtés, bref l'œuvre d'Albert Camus. Et puis Camus, vu du XXIe siècle, c'est l'homme qui avait raison au XXe. Etre de gauche et dénoncer le goulag dans les années 50! Jean Daniel, lui-même, qui s'est opposé à son ami au moment de la guerre d'Algérie, le reconnaît dans la très belle conclusion de son éditorial cette semaine: «Qui peut dire en ce moment, avec ce que vit une Algérie dont tant d'enfants ne songent qu'à rejoindre la France, si la vérité n'était pas à partager entre ses positions et les miennes».
Refuser l'idée qu'Albert Camus puisse être «panthéonisé» sous prétexte que Nicolas Sarkozy aurait quelques arrières pensées politiciennes, c'est une forme d'instrumentalisation du Panthéon plus flagrante que l'instrumentalisation présidentielle que dénoncent les opposants au transfert.
Si les restes d'Albert Camus devaient être transférer au Panthéon en 2010, pour le cinquantenaire de sa mort, il y a fort à parier que dans quelques années, tout le monde aura oublié quel est le Président qui a voulu que l'écrivain méditerranéen repose parmi les «grands hommes».
Thomas Legrand
Je suis d'accord que c'est avec une arrière pensée de coup politique que TI Nicolas veut mettre Camus au Panthéon. Mais la levée de bouclier de toute la gauche contre cette opération est aussi politicienne. Fera t'on une loi pour que les grands hommes soient désignés panthéonisables uniquement par leur courant politique! Moi ce n'est pas ce qui me dérange le plus dans cette affaire, mais de vouloir contre sa volonté propre le démenager à Paris alors qu'il avait souhaité être enterré à Lourmarin, village du Lubéron où il avait élu domicile.
Mais pourquoi ne déménagerions nous pâs Grand Charles de Colombey; s'il y en a un qui mérite le Panthéon c'est bien lui!
Nicolas Sarkozy a le projet de faire transférer les cendres d'Albert Camus au Panthéon et ça fait déjà polémique! François Bayrou parle de récupération politique, Olivier Todd, le grand spécialiste de Camus, craint l'ensevelissement de la pensée de l'écrivain sous les honneurs républicains, certaines voix à gauche dénoncent une nouvelle forme de l'ouverture-débauchage par la dépouille d'un écrivain de gauche... à moins que ce ne soit une ruse pour raviver de vieilles plaies qui ont meurtri la gauche intellectuelle du temps des oppositions Sartre / Camus sur l'idée de la révolution et la justification de la violence.
Jean Daniel, le fondateur du Nouvel Observateur et qui fut l'ami d'Albert Camus, estime que l'homme de «l'héroïsme de la mesure» ne pourrait pas se trouver bien dans un temple de la démesure. Jean Camus, le fils d'Albert, semble penser la même chose. Plus inattendu, plus «n'importe quoi» aussi, il y a Jean-Marie Le Pen qui voit dans l'initiative du président de la République une tactique pour piquer des voix au Front national puisque Camus était pied-noir! D'autres, plus moqueurs, s'amusent qu'un président bling-bling en mal de stature cherche par tous les moyens - cérémonies, symboles ostentatoires de la pompe et de la grandiloquence que lui fournit sa fonction - à se tricoter un habit de grand chef d'État. Nicolas Sarkozy serait en pleine opération de re-présidentialisation.
Ce déluge de critiques est assez significatif de l'image qu'a maintenant Nicolas Sarkozy. Sur le papier, l'initiative a tout pour être consensuelle. Si elle suscite tant d'oppositions, c'est parce que d'autres initiatives, comparables en terme de fabrication de ce qu'il est convenu d'appeler maintenant notre «roman national», je veux parler de la lecture de la lettre de Guy Môquet ou de l'appel à débattre sur l'identité française, sentaient trop l'opportunisme symbolique.
La façon dont le candidat Sarkozy avait tordu la pensée de Jaurès et Blum pour l'inclure dans un «travailler plus pour gagner plus», à l'époque d'essence libérale, en a échaudé plus d'un. Maintenant toute initiative un tant soi peu symbolique est frappée de soupçon. Mais, en l'occurrence, c'est assez injuste parce que finalement la seule question, au-delà de la réelle motivation du Président, la seule question qui vaille c'est: Camus au Panthéon, est-ce une bonne idée?
On peut très bien trouver toute Panthéonisation ridicule mais si l'on est sensible au rite républicain, si l'on pense que le «Aux grands hommes la patrie reconnaissante» du fronton du Panthéon a un sens, que la liste des personnalités qui y reposent compose une sorte d'ADN de l'esprit français, de ce en quoi nous croyons collectivement, alors, on ne voit pas comment on pourrait s'opposer à ce qu'Albert Camus repose à côté de Victor Hugo, Pierre et Marie Curie, Emile Zola, Victor Schœlcher, Jean Jaurès ou Jean Moulin. En quoi serait-ce trahir Camus que de l'honorer?
Certes, il était l'homme opposé à tous les pouvoirs mais contrairement à Sartre, il n'a pas refusé le Nobel ou la légion d'honneur. En quoi son œuvre serait-elle «ensevelie sous tant d'honneur». Celles d'Hugo, de Zola ou de Dumas ne l'ont pas été. Camus est à tous. La plupart des lycéens ont eu à lire et étudier «L'Étranger» et puis, certes, il était de gauche mais tout le monde peut se retrouver dans la morale, la philosophie, l'humanisme et même les contradictions ou les ambiguïtés, bref l'œuvre d'Albert Camus. Et puis Camus, vu du XXIe siècle, c'est l'homme qui avait raison au XXe. Etre de gauche et dénoncer le goulag dans les années 50! Jean Daniel, lui-même, qui s'est opposé à son ami au moment de la guerre d'Algérie, le reconnaît dans la très belle conclusion de son éditorial cette semaine: «Qui peut dire en ce moment, avec ce que vit une Algérie dont tant d'enfants ne songent qu'à rejoindre la France, si la vérité n'était pas à partager entre ses positions et les miennes».
Refuser l'idée qu'Albert Camus puisse être «panthéonisé» sous prétexte que Nicolas Sarkozy aurait quelques arrières pensées politiciennes, c'est une forme d'instrumentalisation du Panthéon plus flagrante que l'instrumentalisation présidentielle que dénoncent les opposants au transfert.
Si les restes d'Albert Camus devaient être transférer au Panthéon en 2010, pour le cinquantenaire de sa mort, il y a fort à parier que dans quelques années, tout le monde aura oublié quel est le Président qui a voulu que l'écrivain méditerranéen repose parmi les «grands hommes».
Thomas Legrand
Je suis d'accord que c'est avec une arrière pensée de coup politique que TI Nicolas veut mettre Camus au Panthéon. Mais la levée de bouclier de toute la gauche contre cette opération est aussi politicienne. Fera t'on une loi pour que les grands hommes soient désignés panthéonisables uniquement par leur courant politique! Moi ce n'est pas ce qui me dérange le plus dans cette affaire, mais de vouloir contre sa volonté propre le démenager à Paris alors qu'il avait souhaité être enterré à Lourmarin, village du Lubéron où il avait élu domicile.
Mais pourquoi ne déménagerions nous pâs Grand Charles de Colombey; s'il y en a un qui mérite le Panthéon c'est bien lui!
JC
"Jouis et fais jouir, sans faire de mal ni à toi ni à personne..."
Chamfort
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Décidément, cette pauvre gauche aux abois tente de revigorer sa décrépitude par les moyens les plus crétins. La très discutable pyramide du Louvre a-t-elle été une "solution contemporaine" à un accès, ou aurait-elle dû être interdite parce qu'elle venait de Mitterand ? Et cette mocheté de Beaubourg, qui a fait la gloire de Pompidou ?
Et bien non. Sarkozy cherche simplement à glorifier la culture nationale, sans a priori politique, et n'a rien à gagner ou à perdre que tel tas d'ossements soient au Panthéon ou ailleurs. Il "ose" proposer un hommage à un écrivain atypique, qui n'a d'ailleurs jamais écrit "plus à gauche qu'à droite" ... et il en récolte que La Peste !!!
Pauvre pays, la mesquinerie le ruine.
Et bien non. Sarkozy cherche simplement à glorifier la culture nationale, sans a priori politique, et n'a rien à gagner ou à perdre que tel tas d'ossements soient au Panthéon ou ailleurs. Il "ose" proposer un hommage à un écrivain atypique, qui n'a d'ailleurs jamais écrit "plus à gauche qu'à droite" ... et il en récolte que La Peste !!!
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C'est quand on a raison qu'il est difficile de prouver qu'on n'a pas tort. (Pierre Dac)
- Libre penseur
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icon_biggrin icon_biggrin icon_biggrin Il a souhaité reposer à Lourmarin, simplement parce que personne ne demande dans ses dernières volontés d'être enterré au Panthéon !!!
Ce qui serait assez outrecuidant, tu ne pense pas ? icon_biggrin icon_biggrin icon_biggrin
Ce qui serait assez outrecuidant, tu ne pense pas ? icon_biggrin icon_biggrin icon_biggrin
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Je crois qu'il ne s'est même jamais posé la question.
Mais il est incroyable de vouloir aujourf'hui lui coller une étiquette de gauche, alors que précisément il a toujours réfuté cette idéologie ... et est mor en Facel Vega !
En marge des courants philosophiques, il s'est opposé au christianisme, au marxisme et à l'existentialisme. Il n'a cessé de lutter contre toutes les idéologies et les abstractions qui détournent de l'humain. En ce sens, il incarne une des plus hautes consciences morales du XXe siècle - l'humanisme de ses écrits ayant été forgé dans l'expérience des pires moments de l'espèce humaine.
Encore une des récupérations de ces chiffoniers de l'Histoire que sont les gauchistes icon_biggrin icon_biggrin icon_biggrin
Mais il est incroyable de vouloir aujourf'hui lui coller une étiquette de gauche, alors que précisément il a toujours réfuté cette idéologie ... et est mor en Facel Vega !
En marge des courants philosophiques, il s'est opposé au christianisme, au marxisme et à l'existentialisme. Il n'a cessé de lutter contre toutes les idéologies et les abstractions qui détournent de l'humain. En ce sens, il incarne une des plus hautes consciences morales du XXe siècle - l'humanisme de ses écrits ayant été forgé dans l'expérience des pires moments de l'espèce humaine.
Encore une des récupérations de ces chiffoniers de l'Histoire que sont les gauchistes icon_biggrin icon_biggrin icon_biggrin
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C'est évident Camus était de gauche et je crois qu'il le serait encore aujourd'hui. Mais il ne serait certainement pas adhérent chez le facteur. Lui, au contraire de Sartre et de sa copine Simone n'a pas défendu les cocos stalinistes.Libre penseur a écrit :A vrais dire, Camus était un collectiviste libertaire, donc si il est bien de gauche, cette gauche très proche de l'idéologie anarchiste. icon_biggrin
JC
"Jouis et fais jouir, sans faire de mal ni à toi ni à personne..."
Chamfort
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MPS : [table cellpadding="3" cellspacing="1" border="0" width="100%"][tr][td valign="top"][table cellpadding="0" cellspacing="0" border="0" width="100%"][tr][td colspan="2"]Camus est avant tout un humaniste, un observateur, et un homme indépendant mais de bon sens.[/td][/tr][/table][/td][/tr][tr][td colspan="2"][/td][/tr][/table]
ben .... un homme de gauche quoi .... :lol:
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Il ne suffit pas d'aller sur wikipédia pour connaitre l'oeuvre de Camus... smile;mps a écrit :A croire que vous n'avez pas lu son oeuvre ... Pouvez-vous me citer UNE phrase corroborant vos dires ? Camus est avant tout un humaniste, un observateur, et un homme indépendant mais de bon sens.
N'importe qui, doté d'une certaine culture politique, qui a lu son oeuvre, sait très bien que Camus fait parti de la gauche dont j'ai parlé plus haut, mais encore faut t'il savoir nuancer les différents courants de gauche.
L'opposition idéologique Sartre/Camus reflète bien ces deux gauches qui s'opposent, l'une marxiste l'autre collectiviste, l'une autoritaire l'autre libertaire.
"La liberté est un bagne aussi longtemps qu’un seul homme est asservi sur la terre."
"On a déclaré qu’il fallait d’abord la justice et que, pour la liberté, on verrait après ; comme si des esclaves pouvaient jamais espérer obtenir la justice."
"Ce n’est pas la révolte en elle-même qui est noble, mais ce qu’elle exige. "
" La société politique contemporaine : une machine à désespérer les hommes. "
" J’ai compris qu’il ne suffisait pas de dénoncer l’injustice, il fallait donner sa vie pour la combattre."
"Si l’homme échoue à concilier la justice et la liberté, alors il échoue à tout."
Albert Camus.
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