François Hollande a-t-il choisi de faire cette sortie ? A-t-il parlé trop vite ? Toujours est-il que la comparaison opérée dimanche 19 avril par le chef de l'Etat entre le FN de Marine Le Pen et le Parti communiste des années 1970 a déclenché la fureur du PCF de 2015.
Pierre Laurent, son premier secrétaire, exige des excuses, tandis que Jean-Luc Mélenchon estime qu'en « insultant le Parti communiste des années 1970, François Hollande oublie que c'était alors le programme commun qui conduisit à la grande victoire de 1981 ».
Ce qu'a dit François Hollande :
Marine Le Pen « parle comme un tract du Parti communiste des années 1970 (…) sauf que le Parti communiste, il ne demandait pas qu'on chasse les étrangers, qu'on fasse la chasse aux pauvres ».
Peut-on faire cette comparaison ? Sans doute pas avec le « Parti communiste des années 1970 ». D'un point de vue historique, en effet, François Hollande s'est un peu raté : il aurait fallu parler des tentations nationalistes qui ont eu cours au PCF à la toute fin des années 1970 et au début des années 1980.
1. Le programme commun ne parlait que peu d'immigration
De 1972 à 1977, Parti socialiste et Parti communiste étaient alliés. En ce sens, le « Programme commun » de 1972, signé par le PS, le PCF et les radicaux de gauche, ambitionne de grandes réformes en termes d'emploi, une nationalisation de groupes industriels, une décentralisation des institutions…
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3. « L'immigration nuit aux travailleurs » : le discours de Marchais
Plus largement, le discours que porte Georges Marchais, premier secrétaire et candidat, réclame une limitation de l'immigration, perçue comme nuisible aux droits et aux conditions des travailleurs.
« En raison de la présence en France de près de quatre millions et demi de travailleurs immigrés et de membres de leurs familles, la poursuite de l'immigration pose aujourd'hui de graves problèmes. Il faut stopper l'immigration officielle et clandestine », déclarait ainsi Georges Marchais, le 6 janvier 1981.
Georges Marchais se défend alors de tout racisme et dit parler dans l'intérêt de tous :
« Nous pensons que tous les travailleurs sont frères, indépendamment du pays où ils sont nés (...) » Mais « dans la crise actuelle, elle [l'immigration] constitue pour les patrons et le gouvernement un moyen d'aggraver le chômage, les bas salaires, les mauvaises conditions de travail, la répression contre tous les travailleurs, aussi bien immigrés que français. C'est pourquoi nous disons : il faut arrêter l'immigration, sous peine de jeter de nouveaux travailleurs au chômage. »
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4. Difficile de comparer deux époques si lointaines
Le PCF a donc connu une phase où il tenait des positions opposées à l'immigration et à la présence de travailleurs immigrés, c'est un fait. Peut-on pour autant le comparer à l'actuel FN ?
Marine Le Pen a opéré un glissement « à gauche » de son parti sur les thématiques économiques. Le FN n'hésite plus à critiquer les dérives du capitalisme ou du libéralisme, et à les opposer aux « travailleurs », reprenant une dichotomie classique à gauche. Surtout, le FN a su faire son nid dans nombre d'anciens bastions communistes et populaires, en jouant sur cette double rhétorique, contre l'immigration et contre le « grand patronat », qui peut présenter des similarités avec le discours communiste de 1981.
Mais sur l'Europe, par exemple, si les positions peuvent être proches (Georges Marchais souhaitait une « protection de notre marché intérieur », et le slogan du PCF en 1981 était « Produisons français ! »), il est difficile de comparer. En 1981, la formation européenne est encore embryonnaire et concerne surtout des accords économiques à l'intérieur de ses frontières, sans monnaie unique et avec une plus grande marge de manœuvre pour les Etats membres.
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