Il n’y aurait pas un changement de direction pour la politique européenne, en cas de victoire socialiste.Comment les Allemands voient-ils François Hollande ?
1. Hollande, le socialiste qui fait peur aux conservateurs
Il y a deux mois encore, François Hollande était un pestiféré. Le magazine allemand le Spiegel, révèle qu’Angela Merkel mais aussi David Cameron (premier ministre britannique), Mario Monti (président du conseil italien) et Mariano Rajoy (chef du gouvernement espagnol) refusent de recevoir François Hollande pendant la campagne électorale. Pourtant, en 2007, Angela Merkel avait aussi bien reçu Nicolas Sarkozy que Ségolène Royal.
François Hollande ferait-il peur aux dirigeants conservateurs européens ? Sa volonté de renégocier le pacte budgétaire, pour l’associer à un mécanisme favorisant la croissance fait grincer des dents : Angela Merkel s’est longtemps battu pour obtenir ce texte et ne compte pas faire machine arrière.
Dans la même veine, François Hollande soutient, au niveau européen, l’introduction d’eurobonds, c’est-à-dire un titre de dette commun aux pays de l’UE. Une stratégie vivement refusée par Angela Merkel, qui y voit un trop fort investissement de son pays en terme de responsabilité financière.
2. Lune de miel avec le SPD
"J'ai plus de facilité à trouver des compromis avec mes amis du SPD que Nicolas Sarkozy a pu en trouver jusque-là avec Mme Merkel", déclare le candidat socialiste lors du congrès du parti allemand en décembre 2011. S’il est boudé par la CDU d’Angela Merkel, le SPD (parti social-démocrate allemand), l’accueille, lui, à bras ouverts. Sigmar Gabriel, son dirigeant, viendra même à Paris lors d’un meeting au cirque d'hiver.
Comme d’autres politiciens européens, il voit dans une possible victoire de Hollande une façon de redonner de la puissance à la gauche européenne. D’autant que les prochaines élections législatives allemandes pourraient changer l’équilibre des forces.
3. Les équipes de Merkel prêtes à travailler avec Hollande
Parallèlement, à la mi-mars, les relations entre Nicolas Sarkozy et Angela Merkel se dégradent. Tout à sa campagne électorale, le président français annonce finalement sur Europe 1 qu’il ne recevra pas la chancelière lors d’un meeting. “La campagne électorale est l'affaire des Français”, explique-t-il. Pour le Financial Times Deutschland, à ce moment-là, “Merkozy, c’est fini”.
Un moyen pour Nicolas Sarkozy de prendre ses distances vis-à-vis de l’Europe et des plans mis en place jusqu’alors, qui ne semblent pas satisfaire les Français. Il appellera même à davantage de participation de la BCE dans les plans de sauvetage. Un affront pour Angela Merkel, vexée.
En parallèle, les médias allemands décrivent de plus en plus un François Hollande “pragmatique”, davantage “social-démocrate” que socialiste : il fait de moins en moins peur. Surtout, il n'aurait finalement que peu de latitude pour imposer des changements au niveau européen.
La presse lui trouve même des points communs avec Angela Merkel : volonté de favoriser le régionalisme face à la centralisation, donner plus de poids à l’Assemblée nationale, etc. Et point essentiel : les caractères des deux politiciens seraient plus proches et compatibles...
Le candidat socialiste français promet pour sa part de réserver sa première visite à l’étranger à l’Allemagne et insiste sur l’importance du couple européen historique. Ce vendredi, le Sueddeutsche Zeitung révèle que des représentants de la chancellerie allemande sont entrés en contact avec les équipes de François Hollande : "la peur d'Hollande diminue à la chancellerie", titre le quotidien.
Selon l'entourage de la chancelière, il n’y aurait pas un changement de direction pour la politique européenne, en cas de victoire socialiste, juste un recul de Merkel sur des points précis.
La chancelière, elle, voudrait apparemment juger Hollande sur “ce qu’il fera” et non sur ce qu’il a promis pendant la campagne. Mais de là à pouvoir parler de “Merkhollande”, rien n’est fait...
Pourtant, il paraîtrait que la chancelière souhaite travailler plus étroitement avec le chef du gouvernement italien Mario Monti.
La presse italienne a annoncé que Rome pourrait bientôt se substituer à Paris dans la relation privilégiée de l'Allemagne en Europe.
