Bureaucratie à la française: le témoignage choc d'un patron de PME
INTERVIEW Alors que le gouvernement veut se réconcilier avec les entreprises, Frédéric Melki explique pourquoi la paperasse administrative reste un enfer pour les entrepreneurs.
Frédéric Melki, 52 ans, a créé en 1993 un cabinet d’experts en écologie spécialisée dans la biodiversité. A l'heure où le gouvernement préconise un "choc de simplification", il témoigne des pesanteurs administratives qui entravent le développement de son entreprise, et du sentiment d'insécurité généré par l'instabilité juridique.
Quelle est votre activité ?
Je suis PDG de Biotope, une entreprise de 250 personnes implantée à Montpellier et dans 17 villes de France. Nous aidons l’Etat, les collectivités et les entreprises à prendre en compte la dimension environnementale dans leurs projets de développement.
Quelles sont les obligations administratives auxquelles vous ou votre entreprise sont confrontés ?
Elles sont innombrables et consomment un temps fou... mais avant de les évoquer je voudrais insister sur le phénomène des “effets de seuil”. A chaque fois qu’une entreprise franchit une étape dans sa croissance, les obligations administratives deviennent plus lourdes et plus nombreuses. Dès qu’elle atteint 10 salariés, elle doit organiser l’élection des délégués du personnel. Bon, ça, c’est encore gérable. A 50 salariés, le nombre de délégués du personnel augmente et elle doit créer un Comité d’entreprise, qu’elle doit financer. Les charges sociales augmentent, aussi... Mais là, disons que ça va encore. A 200 salariés, vous devez en outre créer un Comité Hygiène et Sécurité, bien distinct du Comité d’entreprise. Rappelons que les délégués du personnel peuvent cumuler jusqu’à 30 heures de délégation par mois pour leurs activités, et que ces heures sont rémunérées par l’employeur. Pour ce qui nous concerne, nous fonctionnons avec 12 délégués du personnel et 10 membres du Comité d’entreprise.
Oui mais une entreprise de 250 personnes est de taille à faire face à ces obligations ?
Pas tant que ça... Par exemple, Biotope a 17 établissements en France. Ce qui confine parfois au cauchemar : par exemple, nous sommes tenus de mettre cinq documents réglementaires à la disposition des salariés: convention collective, livre unique du personnel, le plan “seniors”, le plan “handicapés” et le plan “égalité hommes-femmes”. Au lieu de faire imprimer 17 exemplaires de chacun des documents, nous avons demandé à l’inspection du travail de mettre ces documents sur l’intranet, par raison d’économie et de praticité. Refusé...
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