Logos a écrit : ↑06 août 2018, 17:55:15
Je vois qu'on parle beaucoup des filières universitaires sans débouchés. Mais ce n'est pas le cœur du problème.
Les pics de chômage ne se retrouvent pas chez les Bac+5 en Histoire de l'Art mais à des niveaux CAP/Bac Pro.
Y compris plusieurs années après la sortie d'étude.
Les Bac+5 en Histoire de l'Art galèrent plus que d'autres Bac+5 ou même Bac+2. Mais après un certain temps ils finissent
quand même par faire leur trou. Alors certes sans rapport avec leur formation ou leur "niveau", et donc c'est du gâchis.
Mais leur taux de chômage moyen reste faible. C'est sans doute que pour avoir un Bac+5 même "inutile", il faut quand même avoir un minimum de capacités d'apprentissage, d'expression et de motivation. Et que beaucoup utilisent ces capacités pour faire d'autres formations, passer des concours ou évoluer en interne dans les grosses entreprises.
Malheureusement du coup ils "prennent la place" des CAP/Bac Pro/BTS à qui ces emplois étaient initialement destinés.
Le chômage se transmet "en cascade" par le jeu des dévalorisation respectives des diplômes.
J'ai deux exemples d'amies ayant fait une licence de lettres et qui ont passé ensuite un CAP Pâtisserie ensembles. Les deux ont très bien réussi. Un ami avec un Master en communication devenu maçon et qui a fini par reprendre la boîte de son patron qui tourne très bien. Tout simplement car au-delà de la technique, pour gérer une boite de BTP il faut savoir manipuler des chiffres, gérer des hommes, comprendre le droit, bien parler, savoir communiquer. Autre exemple : une mère au foyer de 45 ans n'ayant que le Bac et qui décide tout à coup de devenir infirmière. Personne n'y croyait. Et bien elle a réussi ses études et a décrocher un poste en hôpital.
Tout le monde n'a pas cette capacité ou le temps libre pour cela. Mais en France (dans les institutions, les entreprises) on a l'obsession de la formation initiale et du CV. Ce qu'on fait à 20 ans devrait nous définir toute notre vie. On ne conçoit pas qu'on puisse reprendre des études à 30, 40 ou même 50 ans. Et qu'on soit capable de faire autre chose que ce qu'on a toujours fait. Qu'un diplômé en lettres puisse devenir informaticien. Et qu'un mécano puisse devenir éducateur spécialisé. On ne laisse pas sa chance à celui qui n'a pas le bon CV mais qui est motivé et capable d'apprendre.
Je suis complètement d'accord avec ça, dans l'ensemble. Ce que je voudrait juste préciser, c'est qu'effectivement les diplômés d'études supérieures ont un meilleur accès au travail simplement parce qu'ils présentent une culture générale, donc un état d'esprit favorable, une capacité à réagir, analyser, comprendre. Mais c'est bien sur souvent le cas: on les retrouve souvent travaillant dans des filières qui normalement recrutaient du BAC pro ou du CAP, mais vu 10 ou 15 ans d'échec et d'insatisfaction, les employeurs cherchent des universitaires en reconversion. En tout cas les plus malins d'entre eux. Bémol pour les BTS, qui fournissent encore dans certaines filières des jeunes très intéressants et bien formés. Et les CAP reprennent de la valeur précisément par l'arrivée de plus en plus consistante, de jeunes universitaires s'adressant à des CFA de la Chambre de Métiers, pour obtenir une alternance.
Alors c'est grandement dommage pour les jeunes en échec, issus de 3ème de collège, qui sont bien souvent au CFA parce que c'est le dernier endroit ou on les accepte, mais dont on ne fera rien, parce qu'on apprend pas au éléphants à voler, ni au poisson à respirer, comme le déclarait justement Einstein. Pourtant, notre système éducatif, sous la pression idéologique que l'on sait, voudrait que les éléphants volent.
Du reste, le CFA avec qui je suis en rapport de manière permanente pour mes apprentis, m'annonce que vu la défection générale des entreprises pour former en CAP, va ouvrir l'année prochaine, une cession spéciale pour ex universitaires en reconversion dans les métiers techniques tels que métalliers chaudronnier soudeur, menuisier bois... c'est juste positif.
Et puisqu'on me reprochait de casser du jeune, il est clair que je ne tiens pas le jeune responsable de son relatif égarement (car il s'agit bien d'égarement subit). Le responsable est son parent, et la politique éducative, qui se déclarait dès les années 70, libératrice et révolutionnaire. D'aucun ne veut faire l'inventaire, sauf peut être actuellement sous ce gouvernement, et encore, on ne comprend pas encore quelle est vraiment la fibre des macronistes. Sauf à écouter Cédric Villani, intéressant au plus haut point.