La capitalisation, grande absente de la réforme des retraites

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johanono
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La capitalisation, grande absente de la réforme des retraites

Message non lu par johanono » 24 mars 2023, 09:05:13

Nous avons assez peu débattu de la retraite par capitalisation. Voici un article intéressant, que je recopie pour extraits :
La capitalisation, grande absente de la réforme des retraites

DÉCRYPTAGE - Elle apparaît pourtant comme un moyen de résorber le déficit des retraites, tout en préservant les Français de la baisse des pensions.

C’est un tabou national que le gouvernement n’a pas voulu lever. La capitalisation reste totalement absente du projet de réforme des retraites. Le système français reste centré sur la répartition, où les cotisations des actifs paient directement les pensions des retraités. Exit la capitalisation, adoptée dans de nombreux pays où les cotisations sont épargnées et investies pour produire des dividendes, reversés aux actifs lorsqu’ils prennent leur retraite.

(...)

Les Français peuvent certes déjà compléter leur future retraite par des mécanismes d’épargne, mais ceux-ci restent largement individuels (assurance-vie, PER, etc.), donc réservés à ceux qui peuvent faire un effort en plus des cotisations obligatoires ; et ils coûtent cher en frais de gestion. Plusieurs figures de la droite, du député Philippe Juvin au sénateur Bruno Retailleau en passant par le maire de Cannes, David Lisnard, ont donc plaidé, pour l’introduction d’un pilier de capitalisation collective obligatoire, à côté du système par répartition actuel. En vain. Les sénateurs ont voté le lancement d’une étude sur le sujet… mais même cette simple disposition a été rejetée en commission mixte paritaire.

Le sujet reste clivant: les opposants y voient une logique de financiarisation, qui livrerait les retraites aux fonds de pension et ferait fi de la solidarité. «La répartition est souvent affublée d’oripeaux moraux: on l’a longtemps présentée comme un gentil système favorisant la justice sociale et l’équité entre générations alors que la capitalisation n’aurait pour vocation que de favoriser les plus aisés. Notre débat politique est trop souvent biaisé par les idées reçues qui empêchent une réflexion sereine», estime Bruno Chrétien, président de l’Institut de la protection sociale.

Pour les fonctionnaires


D’autant que le système a, pour certains, fait ses preuves. Paradoxalement, l’État a instauré un régime de capitalisation obligatoire pour ses fonctionnaires via le régime additionnel de la fonction publique (Rafp), mis en place par la réforme Fillon de 2003. Grâce à ce régime, opérationnel depuis le 1er janvier 2005, près de 4,5 millions d’agents épargnent en vue d’un supplément de retraite. «C’est une vraie réussite. C’est un vrai fonds de pension collectif à la française géré par les partenaires sociaux, avec 42 milliards d’encours et 5,6 % de rentabilité par an depuis sa création», observe Nicolas Marques, directeur de l’Institut Molinari. «Pourquoi ce qui est bon pour les fonctionnaires ne le serait pas pour les salariés ?», interroge un assureur. Les pharmaciens ont, eux aussi, compris depuis longtemps l’intérêt d’un tel système: leur régime, créé en 1948, repose sur un modèle mixte où la capitalisation assure aujourd’hui 50 % des retraites.

(...)

En drainant une épargne de long terme, la capitalisation permettrait par ailleurs d’assurer un meilleur financement de l’économie française et d’investir dans les entreprises, qui manquent de fonds propres. C’est un moyen de soutenir la croissance et l’emploi, mais aussi de financer l’innovation. «La capitalisation permet de mobiliser les sommes considérables dont les entreprises ont besoin, notamment pour financer la transition énergétique, indique Mathias Cormann, secrétaire général de l’OCDE. Les fonds placés pour la retraite sont particulièrement adaptés pour répondre à ce défi car ce sont des sommes placées sur le long terme, pour vingt-cinq ou trente ans. Elles peuvent donc financer les infrastructures, actifs peu liquides, dont tous les pays ont besoin.»

Financer l’innovation

C’est d’ailleurs cette épargne de long terme qui a soutenu le développement économique durant la révolution industrielle, époque où la France avait opté pour la capitalisation. «Au XIXe siècle, les notaires récupéraient l’argent dans les campagnes, les sociétés de secours mutuel plaçaient les capitaux», rappelle Nicolas Marques. Cela a permis de financer les chemins de fer, les canaux, l’industrie. «On lui a ensuite imputé l’échec du système des rentes ouvrières et paysannes instauré en 1910, alors que la Première Guerre mondiale en fut la raison principale», observe Bruno Chrétien. Dans l’urgence de la reconstruction, le système s’est remodelé en 1945 sur le principe de la répartition, jugé plus solidaire.

Certains craignent toujours que les aléas des marchés financiers ne ruinent les retraités. Mais l’OCDE constate que ni la crise financière de 2008 ni la récente crise sanitaire n’ont remis en cause le succès de la capitalisation, dont les fonds connaissent une croissance continue pour atteindre 66 trillions de dollars fin 2021. Difficile pour la France, qui cherche à combler le déficit structurel et récurrent de son système, de passer à côté d’un tel mouvement de fond.

suite
Je ne suis pas contre la capitalisation par principe. Je me pose néanmoins une question, celle de la transition entre les deux systèmes. En effet, les actifs d'aujourd'hui devront bien continuer à cotiser pour financer les retraites de leurs aînés, tout en commençant à capitaliser pour eux-mêmes. Ne risquent-ils pas d'être pénalisés ?

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Kadavre
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Re: La capitalisation, grande absente de la réforme des retraites

Message non lu par Kadavre » 24 mars 2023, 09:51:30

johanono a écrit :
24 mars 2023, 09:05:13
Je ne suis pas contre la capitalisation par principe. Je me pose néanmoins une question, celle de la transition entre les deux systèmes. En effet, les actifs d'aujourd'hui devront bien continuer à cotiser pour financer les retraites de leurs aînés, tout en commençant à capitaliser pour eux-mêmes. Ne risquent-ils pas d'être pénalisés ?
La plupart des pays l'ont fait, et on l'a fait en France pour les fonctionnaires.... Alors pourquoi on ne pourrait pas généraliser ce système ? Bien sûr, on ne va pas basculer brutalement d'un régime à un autre, il faut faire ça progressivement, mais il faut commencer maintenant, sinon on ne le fera jamais. Il faut une partie modeste mais obligatoire qu'on fera monter en puissance, et à côté de ça une incitation fiscale à aller plus loin pour ceux qui le veulent. On a un outil de financement : la CADES. Franchement, je ne comprends pas pourquoi Macron s'est lancé dans une réforme qui rapporte peu, ne fait pas avancer la capitalisation, et est impopulaire. Quel gâchis ! il aurait mieux fait de modifier son premier projet de réforme systémique, il aurait pu embarquer la CFDT au lieu de s'en faire un ennemi.

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johanono
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Re: La capitalisation, grande absente de la réforme des retraites

Message non lu par johanono » 24 mars 2023, 10:09:50

D'accord, mais ça veut dire qu'on va bien demander aux actifs de payer deux fois, non ?

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Kadavre
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Re: La capitalisation, grande absente de la réforme des retraites

Message non lu par Kadavre » 24 mars 2023, 10:18:52

johanono a écrit :
24 mars 2023, 10:09:50
D'accord, mais ça veut dire qu'on va bien demander aux actifs de payer deux fois, non ?
Ce qu'ils paient pour la capitalisation va améliorer leur retraite, ils ne paient pas pour rien. Et si leurs contributions donnent droit à des réductions d'IR, c'est tout bénef à terme.

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Re: La capitalisation, grande absente de la réforme des retraites

Message non lu par johanono » 24 mars 2023, 10:43:45

Oui, mais dans l'immédiat, leur pouvoir d'achat va diminuer, non ? Même s'ils y trouvent leur compte à terme, même s'ils ne paient pas pour rien, les actifs verront que leur solde disponible en fin de mois va diminuer. Donc la mesure risque d'être impopulaire. Comment solutionner cette problématique ?

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Kadavre
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Re: La capitalisation, grande absente de la réforme des retraites

Message non lu par Kadavre » 24 mars 2023, 11:39:06

johanono a écrit :
24 mars 2023, 10:43:45
Oui, mais dans l'immédiat, leur pouvoir d'achat va diminuer, non ? Même s'ils y trouvent leur compte à terme, même s'ils ne paient pas pour rien, les actifs verront que leur solde disponible en fin de mois va diminuer. Donc la mesure risque d'être impopulaire. Comment solutionner cette problématique ?
Il y a des tas de moyens de rendre la chose attractive : exonérations, déductions fiscales, abondement, mais il y aura forcément une part de contribution qui sera à la charge des actifs. Je crois qu'il est + facile d'accepter un effort pour se constituer un capital personnel plutôt qu'un effort qui se perd dans des caisses collectives sans qu'on n'ait la garantie qu'on en profitera un jour.

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