Dans les Scop, « les salariés ont tendance à se sentir plus impliqués »
Les sociétés coopératives et participatives (Scop) sont des entreprises un peu particulières: les salariés détiennent la majorité du capital, et ça change pas mal de choses...
Imaginez une entreprise où les salariés détiennent la majorité du capital, votent pour choisir leur patron et se partagent les bénéfices. Peu connu, et pourtant ancien, le statut des Scop - pour «sociétés coopératives et participatives» - a plutôt bien survécu à la crise économique. A l'occasion du mois de l'économie sociale et solidaire, focus sur ces entreprises pas tout à fait comme les autres.
On compte aujourd'hui en France quelque 2000 entreprises Scop, employant 40.000 personnes, dans des secteurs d'activités très différents. Développé au XIXe siècle dans l'industrie, l'imprimerie et le bâtiment (qui représente encore 20% des Scop), le statut de Scop s'est fait une nouvelle jeunesse ces quinze dernières années avec les services à la personne (nettoyage, jardinage...) ou des projets originaux, parfois à dimension sociale.
Le modèle des Scop repose sur trois principes démocratiques: une partie des salariés possèdent au moins 51% du capital. Sociétaires de leur boîte, ils élisent le patron en assemblée générale, où se votent aussi les comptes et se discutent les orientations stratégiques. Quelle que soit la somme investie dans le capital, ils possèdent une voix. Quant à la répartition des bénéfices, au moins un quart des bénéfices annuels est reversé aux salariés, qu'ils soient sociétaires ou non.
«On n'est pas chez les Bisounours»
Pour autant, «on n'est pas chez les Bisounours! lance Pascal Trideau, le directeur de la Confédération générale des Scop. Nous avons la même exigence d'efficacité que les entreprises classiques».
«C'est leur entreprise, leur fric. Les salariés ont donc tendance à se sentir plus impliqués, plus motivés. C'est un atout économique réel, quand on voit par exemple les dégâts que peuvent engendrer les changements d'actionnaires», explique Guillaume Duval, rédacteur en chef d'Alternatives économiques, l'une des seules entreprises de presse à avoir conservé le statut de Scop.
Du coup, font valoir les promoteurs des Scop, les salariés se sentent bien dans leur entreprise. La preuve: l'ancienneté y est importante, et les arrêts maladie plus rares que dans une boîte classique.
Autre avantage: «Le fait d'avoir une AG où un homme égale une voix, cela suppose la possibilité d'un désaccord. Même si ça se produit très rarement, l'impact est très net sur le comportement du patron, sur sa manière de s'adresser aux gens», poursuit Guillaume Duval. «Le management est forcément plus participatif», ajoute Sylvie Nourry, de l'Union régionale des Scop Ile-de-France. «Le dirigeant ne peut pas décider tout seul dans son bureau. Il doit avoir envie de partager ses idées, sa stratégie», complète Pascal Trideau, avant de préciser: «On ne se réunit pas non plus tous les jours pour décider de tout.»
«La principale limite, c'est la complexité du business»
Plus la taille de l'entreprise grandit, plus le fonctionnement démocratique se complexifie. La moitié des Scop compte plus de dix salariés, mais 9% dépassent les 50 employés. «A deux, vous discutez le vendredi. A 50, vous faites des réunions par petits groupes. Et dans des entreprises comme Chèque déjeuner [1 800 salariés en 2009, ndlr], la démocratie se structure: les membres du conseil d'administration vont en faire le compte-rendu. Les informations sont communiquées, et à l'inverse sont aussi remontées du terrain vers les dirigeants», explique Sylvie Nourry.
«La principale limite, c'est la complexité du business, analyse Guillaume Duval. Chez nous, par exemple, la politique tarifaire concernant les abonnements est très complexe, il faut vraiment être dedans pour comprendre et intervenir. Certains salariés peuvent rester en chemin....Pour compenser, on fait un travail très régulier d'information».
Charles-Henri Montaut, PDG d'UTB, une grosse Scop du bâtiment en région parisienne, pointe une autre difficulté: «Du fait du partage des bénéfices avec les salariés-sociétaires, fatalement le chef d'entreprise récupère moins d'argent à la fin de l'année que dans une entreprise classique... Pas évident d'attirer des patrons, il faut une forme de vocation», conclut-il.
http://www.liberation.fr/economie/01012 ... -impliques
Le SCOP ne sont probablement pas une solution miracle, mais un bon moyen de lutter contre l'influence des marchés financiers sur nos entreprises. Et tout instrument de lutte contre la financiarisation de l'économie est bon à prendre...