Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

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El Fredo
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Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par El Fredo » 23 nov. 2011, 23:40:54

http://econoclaste.org.free.fr/dotclear ... europeenne
Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

On assiste depuis peu à un véritable concert, de toute part, demandant à la BCE d'intervenir pour soutenir les dettes publiques des pays de la zone euro, et déplorant qu'elle ne le fasse qu'à doses homéopathiques, sans calmer la panique des marchés. J'ai participé au concert. Pourquoi ne le fait-elle pas? L'explication la plus souvent rencontrée consiste à reprocher aux dirigeants de la BCE leur jusqu'au boutisme idéologique : la BCE serait un repaire d'idéologues romantiques, qui préfèrent un champ de ruines à déroger à leurs principes, hérités de la phobie allemande pour l'inflation. Cette explication est tout à fait plausible.

Mais on peut en trouver une autre : la BCE agit en fait de façon tout à fait rationnelle. Pour le comprendre, il faut absolument lire ces deux articles de Jacob Kirkegaard (premier, deuxième).

Pour comprendre le comportement de la BCE, il faut commencer par oublier la macroéconomie et l'analyse standard de la politique monétaire et des banques centrales. Il faut par contre utiliser la théorie des jeux et la stratégie : Schelling et Liddel Hart, plutôt que le modèle IS-LM. La macroéconomie considère la banque centrale comme un acteur technique, qui agit sur la conjoncture (inflation, croissance, chômage) à l'aide d'instruments plus ou moins bien maitrisés.

On ne peut comprendre l'action de la BCE qu'en comprenant qu'elle agit en acteur politique, et pas en agent technique. C'est de ce point de vue une banque centrale sans équivalent ailleurs. Une banque centrale normale agirait en fonction de la conjoncture, avec une politique expansionniste en cas de récession, voire en se comportant en prêteur en dernier ressort; pas la BCE. Elle est aujourd'hui engagée dans un bras de fer avec les gouvernements nationaux, dont l'enjeu est l'architecture institutionnelle de la zone euro à l'avenir. Dans ce but, elle mène une stratégie du bord du gouffre : s'approcher de la catastrophe pour obtenir ce qu'elle veut.

Le cas de l'Italie est exemplaire. En aout, Trichet a envoyé une lettre à Berlusconi indiquant la liste des réformes à accomplir pour "restaurer la confiance des investisseurs". Sous la pression d'une hausse des taux d'intérêts sur la dette publique, le gouvernement italien a entrepris certaines de ces réformes, et la BCE a dans un premier temps mené des interventions sur la dette italienne pour calmer les marchés. Mais dès que les intérêts sur la dette italienne ont cessé de monter, Berlusconi a cessé de pousser les réformes au parlement; les interventions de la BCE se sont aussitôt ralenties. Les taux italiens se sont remis à augmenter de plus belle, jusqu'à ce que Berlusconi soit contraint à la démission. Si la BCE avait annoncé qu'elle ferait tout pour soutenir la dette italienne, Berlusconi serait encore au pouvoir. Berlusconi a d'ailleurs bien compris qui l'a fait déguerpir.

Pour tout le monde, en ce moment, l'Europe est sous la dictature des marchés, de leurs attaques spéculatives qui obligent à mettre des séides de la pieuvre Goldman Sachs aux commandes. Mais plutôt que se focaliser sur le méchant commode de service, quitte à déformer la réalité (Papademos n'a jamais travaillé pour GS, contrairement à ce qu'on lit partout) on ferait mieux de constater que Draghi, Monti, et Papademos, sont avant tout des technocrates européens...

Ce ne sont pas les marchés qui imposent leur loi : ils ne sont que l'instrument de la BCE. Ce que les investisseurs veulent est facile à voir, la presse financière (notamment anglo-saxonne) est très claire; ils veulent que la BCE soutienne les dettes publiques et le système financier en jouant les prêteurs en dernier ressort, comme l'a fait la Fed au moment de la crise des subprimes. Les fluctuations de l'euro, les inquiétudes sur les dettes publiques, sont autant d'occasion pour les investisseurs de subir des pertes et des appels de marge. Si l'Europe était vraiment inféodée aux marchés, la politique de la BCE serait celle du soutien inconditionnel et sans failles aux dettes publiques. MF Global en a récemment fait les frais.

La BCE pourrait arrêter la panique des marchés en un instant, en imposant un plancher inconditionnel aux dettes publiques, mais ne le fait pas : elle n'accordera son soutien que lorsque que ses demandes d'action de la part des gouvernements européens auront suffisamment de chances d'être satisfaites. C'est à dire, une intégration européenne fédérale faite à ses conditions, et une perte drastique d'autonomie des gouvernements nationaux. Dans la stratégie de Liddel Hart, la guerre a pour objectif une paix satisfaisante. C'est exactement ce que fait la BCE : elle maintient la pression des marchés, juste assez pour que les gouvernements nationaux n'aient pas d'autre choix que de redresser leurs finances en menant les plans d'austérité et les réformes économiques souhaitées. Réforme du marché du travail en Espagne, de la rémunération de la fonction publique au Portugal, programme de Monti en Italie.

Et maintenant, c'est la France qui est dans le collimateur. Précisément, c'est la conception gaulliste de l'Europe, défendue par Chirac puis Sarkozy: celle d'une Europe gouvernée par les chefs d'Etat, au premier rang desquels, bien évidemment, la France. Depuis deux semaines, les taux de la dette publique française explosent, au point que les menaces sur le triple A français se font de plus en plus précises : de fait, la France n'emprunte plus aujourd'hui aux conditions d'un pays AAA, et le cours des CDS sur sa dette correspondent à une note largement inférieure. La tactique est simple : instrumentaliser la pression des marchés jusqu'au point ou, pour éviter de trop creuser l'écart avec l'Allemagne, les français seront obligés de céder et d'accepter un immense abandon de souveraineté, un contrôle strict de l'Europe sur le budget et les politiques nationales. La France sera alors un peu plus allemande, bien moins souveraine, et l'Europe plus fédérale.

Entretemps, on peut s'attendre à lire des pressions de toute part. Des dirigeants français demandant des efforts à la BCE, voire des rumeurs de désaccords entre ses dirigeants; des articles de la presse financière appelant la BCE à la rescousse du système financier; et des articles sur l'irrationalité des dirigeants de la BCE. C'est oublier que dans la stratégie du bord du gouffre, c'est celui qui apparaît le moins rationnel qui gagne. La rigidité idéologique apparente de la BCE prend tout son sens dans cette perspective.

Ce n'est pas la première fois que l'on voit une banque centrale faire de la politique. La dernière fois, c'était en 1993, au moment des attaques sur le système monétaire européen. A l'époque, Trichet avait défendu la parité franc-mark au prix du plus fort taux de chômage depuis la seconde guerre mondiale. Et la Bundesbank avait soigneusement choisi ceux qu'elle aidait, et ceux qu'elle laissait tomber (au premier rang, la livre sterling).

Il y a énormément de raison de redouter cette stratégie. Tout d'abord, elle se fait sur le dos des populations européennes. Le cas le plus tragique est celui de l'Espagne, dont le gouvernement a fait presque tout ce qu'on lui a demandé, subi malgré tout un taux de chômage effarant (pratiquement 50% de chômage des jeunes), et perdu les élections au profit de partisans de l'austérité budgétaire encore plus zélés. Surtout, cela revient à imposer de force l'intégration fédérale européenne, aux conditions de la BCE, par le chantage : c'est cela ou le chaos. Il se peut que le coût de cette politique finisse par apparaître tellement élevé que la tentation de quitter la zone euro soit la plus forte, parce que l'austérité qui restaure la croissance, ça ne fonctionne pas; même si cela fonctionne, cela revient à imposer le mariage à deux adolescents parce que la jeune fille est tombée enceinte. Ce genre de mariage est rarement heureux, et le ressentiment des populations européennes pourrait devenir explosif. L'exercice d'un tel pouvoir par la BCE est totalement antidémocratique.

Et la stratégie consistant à instrumentaliser la pression des marchés pour atteindre des objectifs politiques est très dangereuse : il se peut que ceux-ci surréagissent, finissent par ignorer toutes les actions des gouvernements, provoquant l'explosion du système bancaire et financier européen. On en détecte les premisses. Et en attendant, le coût social de cette stratégie est particulièrement élevé. S'il faut lire les stratèges militaires pour comprendre la BCE, on peut se dire, avec Clausewitz, que la montée aux extrêmes n'est jamais loin.
Bien entendu cette analyse n'engage que son auteur (l'Econoclaste), mais celui-ci est en général assez pointu (je conseille à tous la lecture de son blog), et son analyse est tout autant pertinente et étayée que sa conclusion troublante.
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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Nombrilist » 23 nov. 2011, 23:42:19

La BCE n'étant qu'une entité presque vide, il y a forcément des gens pour tirer les ficelles par derrière. Ce seraient donc les allemands ?

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GIBET
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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par GIBET » 24 nov. 2011, 01:33:24

Pour ma part je partage complètement l'analyse mais pas la tendance des conclusions
Je suis pour ma part pour un renfort du fédéralisme européen qui est la seule forme de solidarité européenne qui peut asseoir à terme un vrai processus d'intégration européenne .
je ne suis pas d'accord pour accepter l'idée que le prix à payer finira par faire sortir des membres de l'Euro. Pour l'instant ne devrait sortir que celui qui n'aurait jamais du y entrer s'il n'avait pas triché sur les chiffres. En revanche les autres ne peuvent plus être assez forts de manière autonome et nationaliste. La solidarisation des dettes est à mes yeux une évidence et on perd du temps à le voir. En revanche il faudrait que toute aide solidaire s'accompagne d'un engagement commercial vers les pays aidants inon nous retomberont dans les démons de l'Europe: crier " à l'aide" quand on est dans la m*** et jouer égoïstement quand tout va bien
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Golgoth
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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Golgoth » 24 nov. 2011, 06:53:22

Ce papier fait peur. Je rejoins l'analyse et par BCE il faut bien évidemment comprendre CDU. Ce parti est déjà en train de discuter du prochain traité plus contraignant à nous imposer.
Je le répète et très sérieusement, on doit isoler les Allemands et les menacer de faire l'euro sans eux, si on est suffisamment on pourront juste s'écraser. Espagne+France+Italie ce serait déjà pas mal.
de fait, la France n'emprunte plus aujourd'hui aux conditions d'un pays AAA,
Un peu faux. C'est sur le marché secondaire que le "spread" apparait, la vérité lors des nouvelles émissions est différente, les Allemands n'arrivant pas à emprunter à 2 %.
et le cours des CDS sur sa dette correspondent à une note largement inférieure.
C'est clair. Mais il y a une partie spéculative, même l'Allemagne à des taux de CDS digne d'un pays du quart monde.
T'es vraiment kon François, fallait créer une SCI. :mrgreen2:

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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Nombrilist » 24 nov. 2011, 07:43:26

Totalement d'accord avec Golgoth. Finalement, nos ennemis séculaires, ce ne sont pas les anglais, mais les allemands.

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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par mps » 24 nov. 2011, 07:52:40

Que la BCE joue les gendarmes, c'est évidemment une nécessité : si elle offrait des prêts en solde, la gabegie continuerait.

Or, cette BCE n'est pas tombée du ciel : elle n'est riche que de la somme des Etats de l'UE. On ne résout pas les problèmes en faisant passer l'argent d'un côté à l'autre au sein d'une même entité .
C'est quand on a raison qu'il est difficile de prouver qu'on n'a pas tort. (Pierre Dac)

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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Nombrilist » 24 nov. 2011, 07:58:48

On ne demande pas à la BCE de prêter aux états sans conditions. Mais il aurait fallu qu'elle fasse une exception y a un an. On n'en serait pas là et la situation serait saine en Italie, au Portugal et en Espagne. Mais bon, vu que la BCE est notre adversaire et non notre allié, il ne faut rien en attendre. Golgoth a raison, il faut virer les allemands ipso facto.

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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Golgoth » 24 nov. 2011, 08:01:43

Les remettre à leur place suffirait à mon avis. Mais cela ce ne sera pas avant mai 2012, pour l'instant le caniche de Neuilly obéit à sa maîtresse.
T'es vraiment kon François, fallait créer une SCI. :mrgreen2:

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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Nombrilist » 24 nov. 2011, 08:06:24

Tu crois que Hollande va montrer les muscles ? Mélenchon, je n'ai aucun doute sur la question, il ne s'en cache pas. Mais Hollande ?

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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Golgoth » 24 nov. 2011, 08:38:11

Nous verrons. Montrer ces muscles tout seul en sert à rien, il faut être en majorité, sachant que l'Espagne et l'Italie seront prêtes à priori à suivre, vue leur situation.
T'es vraiment kon François, fallait créer une SCI. :mrgreen2:

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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Nombrilist » 24 nov. 2011, 08:39:53

Zapatero aurait probablement suivi. Le PP, j'ai un doute. Quant à Monti le conseiller de GS, n'en parlons pas.

"Montrer ces muscles tout seul en sert à rien"

C'est pourtant ce que fait Merkel, et ça marche très bien.

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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Golgoth » 24 nov. 2011, 08:49:10

Oui mais les Allemands sont en situation de force. Le PP peut suivre si ça sert son image, quand à l'Italie il va bien y avoir des élections, ou alors ce serait grave.
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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Papibilou » 24 nov. 2011, 10:00:08

L'idée que la fedéralisation forcée se ferait sans l'approbation des peuples est exacte. Mais, après tout, il existe dans chaque pays des partis qui refusent cette idée, et les peuples ont tout loisir de les mettre au pouvoir. Quand quelqu'un refuse de rester dans un club, il s'en va. Mais, je pense que les peuples réfléchiront à 2 fois avant de se résoudre à quitter l'euro et l'UE.
La comparaison avec les mariés est un peu vraie, mais qu'est-ce qui empêche les mariés de se séparer ? Il n'y a pas de loi contre le divorce dans l'UE.
Par ailleurs, l'auteur de l'article a raison. Il faudra limiter la pression sur les peuples, sinon on aura des partis extrémistes qui arriveront au pouvoir. Les allemands devraient se souvenir que la république de Weimar a enfanté le nazisme. Or, pour l'instant, ils ne se rappellent que de l'hyper inflation.

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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par Golgoth » 24 nov. 2011, 15:27:28

Paris et Berlin proposent de modifier les traités européens
Le président français a confirmé que la France et l'Allemagne feraient "dans les jours qui viennent" des propositions communes de modification des traités européens. Ces propositions seront présentées avant le 9 décembre, a précisé Nicolas Sarkozy, qui a refusé d'en dévoiler la teneur. La France, l'Allemagne et l'Italie sont "parfaitement conscientes" de la gravité de la situation dans la zone euro et sont "déterminées à travailler dans le même sens" pour soutenir la monnaie unique européenne, a ajouté le président français.
http://www.lemonde.fr/europe/article/20 ... _3214.html
La CDU propose, Sarko dispose. Comment on dit caniche déjà en allemand ? ;silv;
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Re: Le jeu dangereux de la Banque Centrale Européenne

Message non lu par El Fredo » 24 nov. 2011, 15:31:37

10 contre un que ça va se limiter à une pseudo "règle d'or" de l'orthodoxie budgétaire et que la ratification se fera dans le dos des peuples.
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