Eric Woerth démissionne du gouvernement !
Le départ d'Eric Woerth du gouvernement a fait l'effet d'une bombe. Premier membre du gouvernement à réagir, Roselyne Bachelot salue le "panache" du ministre du Travail. "C'est le premier homme politique qui choisisse au nom de l'éthique en politique de sortir d'un gouvernement alors même qu'il n'y est pas obligé".
A l'Assemblée nationale, la démission d'un poids lourd gouvernement est diversement commentée. A droite, le groupe UMP exprime à "l'unanimité" son "amitié, sa solidarité et sa confiance" à Eric Woerth. "Sa démission va priver le gouvernement d'un ministre de talent dont les députés de la majorité ont pu apprécier l'efficacité, la compétence et la capacité d'écoute", poursuivent les députés UMP dans un communiqué commun.
Pour Jean-François Copé, le président du groupe UMP, cette démission est "celle de la dignité et de la responsabilité".
François Sauvadet, pour le Nouveau Centre, pense que "'c'est une décision sage".
A gauche, si l'on salue également la sagesse de la décision à l'instar de Jean-Marc Ayrault (PS), on ironise sur un départ précipité qui prive l'Assemblée d'un débat sur cette affaire. Pour Noël Mamère (Les Verts) : "Eric Woerth se soustrait aux questions des députés". "Il est évident que le gouvernement avait un boulet considérable à porter" mais pour le député de la Gironde "la démission de M. Woerth ne va pas régler le problème".
Le PS Arnaud Montebourg se dit choqué par l'affaire Bettencourt qui est "extrêmement grave au regard de la fraude fiscale, très grave du fait du nombre et de la qualité des responsables UMP qui sont impliqués, très grave par les soupçons pour certains d'entre eux de violation des règles de financement des partis politiques".
Ségolène Royal (PS) observe que "l'on est ministre pour rendre service à son pays". Et selon Benoît Hamon, "la démission s'imposait à partir du moment où il y avait suspicion ou doute". Lors de la séance des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale du 6 juillet, l'opposition attaque violemment le gouvernement, notamment au sujet de l'examen le 24 juin par le Sénat d'un amendement à la loi sur les prises illégales d'intérêt.
François Fillon répond très fermement à ces attaques. Le Premier ministre affirme qu'il n'y a "pas eu de financement politique de l'UMP par Mme Bettencourt". Répondant à une question du député PS Bruno Le Roux, le Premier ministre explique: "en ce qui me concerne, mon seul rapport avec Mme Bettencourt est le suivant: c'est quand je me douche tous les matins avec mon shampooing l'Oréal". "Vous ne trouverez rien d'autre me concernant", assure-t-il.
Avec force, il affirme aux députés: "Donc, je vous redis que personnellement, politiquement, fonctionnellement, je suis totalement étranger à Mme Bettencourt". "Si vous cherchez un système organisé où fonctionnement institutionnel et fonctionnement partisan, où gestion d'une structure et avantages personnels ont été intimement liés pendant 20 ans, ne regardez pas de mon côté", lance ainsi le Premier ministre.
M. Fillon vise sans le dire les affaires de financement du PS dans les années 90, pour lequel le trésorier Henri Emmanuelli fut condamné en 1997 dans l'affaire Urba. Mais dans la soirée, la Première Secrétaire du PS Martine Aubry fait part de "son étonnement à la suite des propos tenus par le Premier ministre" à l'Assemblée nationale, en affirmant que "l'insinuation ne sert jamais la vérité".
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Avouez, vous y avez cru, non ? En réalité tous ces propos concernent la démission de Dominique Strauss-Kahn en 2000 en pleine affaire MNEF, à ceci près que les camps sont inversés aujourd'hui. Eric Woerth devrait en tirer les conclusions : en démissionnant maintenant, il peut espérer d'ici quelques années obtenir un bon poste à Washington, et pourquoi pas l'investiture suprême ? En attendant il est savoureux avec le recul d'observer les réactions outrées de la droite, dénonçant une chasse à l'homme et une campagne de calomnie, défendant l'honneur d'un homme blessé, et lançant des accusations nauséabondes en direction de l'opposition qui l'avait pourtant mise en garde il y a quelques mois au sujet des dangers d'un tel conflit d'intérêt. Eric Woerth pense-t-il toujours que cette question était stupide ?