Un article intéressant sur Mediapart qui montre la coquille vide autoritaire en baudruche que représente LREM. L'article est payant mais je vous propose quelques morceaux :
Des déceptions que confirme l'instabilité qui règne dans l'organigramme de LREM. Depuis le renouvellement post-élections de septembre 2017, Mediapart a comptabilisé un minimum de 20 démissions sur 130 référents départementaux en France. Soit plus de 15 % de turn-over sur une année.
« Il n’y a plus de base militante sur le terrain », affirme tout de go Jacques Toustou. Animateur d’un comité local dans la Nièvre, cet ancien militant au PS avait rejoint dès 2016 la campagne du candidat Macron. Il a démissionné de son collectif en mai 2018 en compagnie de trois autres militants, écœuré par l’absence de démocratie dans le mouvement au niveau local.
Un membre du bureau exécutif, interrogé par Mediapart sur cette donnée, reconnaît que le noyau de militants s’établirait plutôt aux alentours de 40 000, soit ceux qui ont participé au seul rendez-vous d’ampleur après la présidentielle, c’est-à-dire la « grande marche pour l’Europe » au printemps 2018. Pour mémoire, malgré la déconfiture du Parti socialiste, l’élection d’Olivier Faure à sa tête en mars 2018 a réuni à peu près le même nombre de votants, à jour de cotisation.
Certains militants vont encore plus loin et estiment que même le chiffre de 40 000 serait surestimé. « C’était une vaste blague, dénonce Laurent*, un militant de Loire-Atlantique, à propos de la « marche pour l'Europe », une opération de porte-à-porte sur le sentiment des Français à l'égard de l'Union européenne. Dans ma circonscription, on était quatre ou cinq à y participer. Tout au plus 80 personnes se sont mobilisées dans le département. Le chiffre de Castaner, c’est du pipeau. »
Alors que le macronisme a pris corps sur une promesse de démocratie participative et de bienveillance, l’absence d’écoute, et plus généralement de fonctionnement démocratique interne, irrite un grand nombre de militants. À propos du mouvement, Laurène*, militante parisienne, auparavant active au Parti socialiste, livre sa désillusion : « Je me suis rendu compte que c’était un fan-club, des groupies. Nous ne sommes que de la chair à canon pour distribuer des tracts. » Elle a définitivement quitté LREM en juin 2018, non sans avoir eu des difficultés à faire reconnaître sa démission, faute de réponses à ses messages.
Dans une lettre partagée durant l’été, que Mediapart a pu consulter, une responsable d’un comité local de Savoie résume son sentiment dans un paragraphe intitulé « Où en sommes-nous ? » : « Un mouvement structuré aux forceps, avec une opacité de fonctionnement relevée par les adhérents… une verticalité indéniable, où la parole contraire est sanctionnée, où l’action est contrôlée, où tout esprit de liberté original est réformé. Des adhérents qui se sont sentis utilisés, puis abandonnés s’ils ne sont pas dans le mouvement, s’ils n’obéissent pas. »
À cette époque, Emmanuelle Reeves, qui fut proche du futur patron de LREM durant la campagne et à l'origine de la démission des 100 militants au moment de l'intronisation de Christophe Castaner, avait dénoncé la mise en œuvre d’une organisation verrouillée où le débat ne peut vivre. Dans une adresse publique à ses « amis marcheurs », elle écrivait : « On tente de vous asservir. Cette élection, c’est la vôtre. Ce n’est pas facile, la politique. Ce n’est pas facile, la démocratie. Mais c’est à vous aujourd’hui qu’il revient de la faire vivre. [...] C’est à vous de faire en sorte que LREM ne devienne pas la caution d’un système qui veut déjà nous faire retourner dans l’ancien monde. »
Il est en tout cas bien difficile, selon différents témoignages, de sortir du « prêt à penser » qui règne à LREM. Philippe Cattuzato résume : « On fait des débats sans échange. On écoute les députés, on boit un kir, et c’est tout. » Malgré des groupes thématiques sur le terrain, rien ne semble être repris par la tête du mouvement.
« Au PS, où j’ai milité, il y avait un vague corpus idéologique. Là, on a des loulous de 20 ans qui maîtrisent la novlangue et qui sont persuadés de participer à une aventure futuriste », raille Laurène, qui a fini par quitter LREM. Elle se souvient d’un message du QG annonçant la mise en place d’un « service après-vente » pour les responsables locaux. « C’est très bizarre », euphémise-t-elle.
Dans le Béarn, fief de François Bayrou, une ancienne animatrice d’un comité local a jeté l’éponge face aux pressions du Modem, allié principal de LREM au plan national. « J’étais venue sur la promesse de la moralisation de la vie politique, de faire autrement. Aujourd’hui, on fait l’inverse, c’est caricatural », dit-elle, résignée.
Mais à Paris, rue Sainte-Anne (IIe arrondissement), où travaillent les 80 salariés de LREM, la vie semble s’écouler comme si de rien n’était. La direction du mouvement semble toujours aussi sourde aux mécontentements de sa base. Les statuts déjà votés en juillet 2017 ne permettent pas d’expression démocratique et les critiques qui fusent au moment de la première convention de LREM en novembre 2017 ne rencontrent pas plus d’écho que celles qui, déjà, avaient parcouru le mouvement, une fois les scrutins nationaux passés.
Le reportage est plutôt long, je vous mets le lien si vous voulez l'acheter :
https://www.mediapart.fr/journal/france ... deceptions?