L'Express a écrit :
Pr Renaud Piarroux : "Aujourd'hui, la France aussi est un incubateur à variants"
Le Pr Renaud Piarroux, épidémiologiste et spécialiste de la gestion des épidémies, s'inquiète de la volonté de rouvrir vite le pays, alors que le virus circule beaucoup.
Propos recueillis par Stéphanie Benz
publié le 17/04/2021 à 13:00 , mis à jour à 20:36
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Santé publique France compte moins de 5000 cas de ces variants par semaine. Mais moins de la moitié des tests positifs font l'objet d'un criblage, et tous les cas ne sont pas dépistés. Donc en réalité, le nombre de nouveaux cas de ces variants est sans doute plus proche de 2000 à 3000 par jour, ce qui est beaucoup. Mais plus que le nombre, c'est surtout la tendance qui est inquiétante : début janvier, il n'y avait pas beaucoup de cas, probablement moins de 200 par jour, et depuis leur nombre croît. Ils ne disparaissent pas, bien au contraire. Donc, oui, je suis un peu inquiet quand même. Le problème c'est que ces deux variants, ainsi que certains mutants issus du variant britannique portent tous la même mutation E 484 K qui semble gêner la réponse immunitaire générée par la souche qui circulait l'an dernier et par le variant britannique tel qu'il était à l'origine.
Cela signifie qu'une précédente infection ou une vaccination pourraient être moins protectrices contre ces variants. Il y a donc un risque de voir ces nouvelles générations de virus pouvoir continuer à se transmettre, même au sein d'une population en partie vaccinée. Il pourrait donc rester un fond de circulation virale cet été, non négligeable, qui faciliterait le redémarrage d'une épidémie à l'automne. Comme en Afrique du Sud, où une nouvelle épidémie s'est développée dans une population en partie immunisée par la vague précédente. C'est maintenant qu'il faudrait tout faire pour éviter cela ici.
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Nous ne sommes pas sur un confinement fort comme l'an dernier. Il faudrait probablement garder les écoles fermées une ou deux semaines de plus et être extrêmement prudent sur la réouverture, en se fixant des objectifs d'incidence à atteindre avant de pouvoir commencer à relâcher les mesures.
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Les vaccins et l'immunisation par la maladie ont une efficacité, même réduite, sur les variants. Donc on peut imaginer que le scénario du pire, une quatrième vague plus forte que la troisième, pourra être évité. Mais avec ces variants, on va quand même remettre une pièce dans la machine, avec le risque d'une reprise épidémique à terme.
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